Ah! Dommage tout de même que Denis Shapovalov laisse filer la victoire parce que le match était tellement bien embarqué face à l'Allemand Maximilian Marterer! Notre Canadien commence en lion et ne baisse pas de niveau jusqu'à ce qu'il se retrouve fort d'une avance d'un set (7-5) et d'un bris (3-0).

C'est évident qu'il est bien au courant de la valeur de son adversaire, qui connaît ses premiers grands succès sur le circuit cette année, lui qui aura 23 ans le 16 juin. Rien pour approcher l'immense brio de Denis au cours de la dernière année, mais des victoires ici et là qui prouvent qu'un jour donné, il peut vous marteler, le Marterer!

Tiens : par exemple, il a le meilleur sur le coriace Fernando Verdasco aux Internationaux d'Australie avant de se rendre au 3e tour. À Sofia, il dispose de l'accrocheur Joao Sousa, remporte le Challenger de Cherbourg et... oh! surprise, élimine à Munich l'infatigable Argentin Diego Schwartzman, 12e mondial. Avouez que ce n'est pas banal. Pour battre des compétiteurs de la trempe de Verdasco et Schwartzman, cela veut dire que vous êtes très costaud dans pas mal tous les départements du jeu, mais surtout dans l'échange.

À partir donc de 7-5, 3-0 pour notre fabuleux blondinet, je ne sais pas pourquoi, mais la belle machine, pourtant bien huilée, frappe le mur. Denis se met à faire des erreurs et à perdre ses moyens au service. Comme ça, de nulle part, l'ado relâche sa concentration et par le fait même son brio. Marterer attendait ce moment et il en profite grandement pour lui soutirer son service deux fois et ainsi remporter cinq parties de suite! Mais quel revirement! Dommage parce que Denis était brillant jusque là, car il répondait avec du tennis d'attaque bien ficelé à chaque fois que l'allemand tentait de le menotter.

Malheureusement à partir du bris d'égalité de la 2e manche perdu 7-4, Shapovalov ne sera plus jamais le même. Il n'arrivera que très rarement à faire la loi au service. Pire à 5-6 au 3e set, il livre une horrible partie farcie de deux doubles fautes pour offrir le set sur un plateau d'argent à Marterer.

Ce que j'admire quand même chez Denis, c'est qu'il reste compétitif à la 4e manche. D'abord, il se bat comme un mort de faim pour sauver quatre balles de bris à sa première partie au service et puis il vient à un cheveu de briser à 4-4 et donc potentiellement de nous amener au 5e set. Il a perdu son avance, mais il s'accroche. Il a perdu de son efficacité au service, mais il s'accroche. Il a perdu sa belle allure en retours, mais il s'accroche. Honnêtement, comment voulez-vous que je ne sois pas remplie de compassion pour ce valeureux guerrier? Il apprendra, avec le temps, avec de l'expérience, ce n'est que le début de sa carrière.

En plus, ce que je trouve de tout aussi épatant, c'est que Shapovalov est tellement honnête en conférence de presse. Il est le premier à admettre ses torts, à donner le crédit à l'adversaire qui a été meilleur sur les points importants, nous dit-il, et qui a mieux servi que moi, nous avouera-t-il. Pas de regards remplis de méchanceté envers les journalistes et leurs questions qui forcément tournent le fer dans la plaie. Il accepte, porte la part du blâme qui lui revient sans se défiler, sans faux comportements, mais en toute honnêteté, les yeux fixés vers l'avenir. Ça aussi c'est rare, dans le monde d'aujourd'hui.

La courte saison sur herbe s'en vient, une surface qui permettra un peu plus naturellement à Shapo d'exprimer son tennis champagne. Champion junior de la Coupe Davis à Madrid en 2015 et cette année en Masters 1000, il se rend en demie. Champion junior de Wimbledon en 2016, il peut nous épater dès cette année au All England Lawn Tennis and Croquet Club sur Church Road niché dans le cossu village de Wimbledon, là où les grands écrivent l'histoire du jeu, là où Shapovalov nous fera vibrer un de ses jours, vous verrez.