Internationaux d'Australie : Jannik Sinner, la prouesse à parachever
MELBOURNE, Australie – Après avoir déboulonné Novak Djokovic sur son court fétiche, le no 4 mondial Jannik Sinner s'attaque à Daniil Medvedev (no 3) en finale des Internationaux d'Australie dimanche pour parachever sa prouesse avec un premier sacre en Grand Chelem.
Medvedev a l'expérience pour lui : l'ex-no 1 mondial, titré aux Internationaux des États-Unis en 2021, va disputer sa sixième finale majeure, sa troisième à Melbourne, après deux perdues en 2021 (contre Djokovic) et 2022 (contre Nadal).
À l'inverse, Sinner va découvrir ce qu'est une finale en Grand Chelem, à 22 ans.
Mais le jeune Italien à la force de frappe redoutable vient de montrer de quel bois il se chauffe en signant un exploit inédit vendredi : stopper Djokovic aux Internationaux d'Australie une fois qu'il y a atteint le dernier carré.
« Évidemment ça veut dire beaucoup pour moi de battre Novak ici, à Melbourne, mais le tournoi n'est pas terminé, tempérait-il toutefois. Il y a une finale dimanche. J'ai hâte d'y être. »
La bonne nouvelle pour Medvedev? Pour la première fois, il évite l'ombre encombrante de Rafael Nadal ou Djokovic de l'autre côté du filet.
La mauvaise? Sinner, à l'évidence, a changé de dimension dans le sillage de son premier titre en Master 1000 à Toronto l'été dernier et a su capitaliser sur ses deux victoires en trois matchs contre Djokovic en l'espace de dix jours en novembre.
Trois défaites en deux mois
Medvedev a pu le constater par lui-même. Jusqu'en septembre dernier, il menait 6 à 0 dans ses face-à-face avec Sinner. Depuis, il a perdu les trois suivants, à Pékin, à Vienne et au Masters.
« Tout simplement, il joue mieux qu'avant, résume le Russe. Il n'y a pas vraiment eu de changement tactique. Mais depuis qu'il a gagné au Canada, et surtout depuis la fin de saison, il joue à un tout autre niveau. »
Une statistique l'illustre : Sinner est sorti victorieux de neuf de ses dix derniers matchs contre des joueurs du top-10. Medvedev, d'un sur cinq seulement.
« L'éthique de travail, la détermination, la motivation, l'envie d'apprendre, le QI tennis, Jannik a tout ça », énumère l'Australien Darren Cahill, ancien entraîneur d'Andre Agassi et Lleyton Hewitt, qui a rejoint l'équipe qui entoure Sinner à l'été 2022.
« Il a les qualités que beaucoup de grands champions ont, mais il faut que ça se traduise par les résultats. Il a fait une bonne fin de saison l'année dernière. Ce qu'il a été capable de faire lui a donné beaucoup de confiance, poursuit-il. Il avait des mauvais bilans contre certains des meilleurs joueurs jusqu'à l'année dernière, et il a su faire tomber quelques barrières: battre Tsitsipas, battre Medvedev, battre Djokovic. Ce sont des victoires importantes. »
« La saison dernière, la fin surtout, m'a donné de la confiance sur le fait que je pouvais potentiellement faire des bons résultats en Grand Chelem », confirme Sinner.
Six heures d'écart
« On pourrait se dire que c'est cool parce que ce n'est pas Novak ou Rafa (en face) mais Jannik joue un tennis incroyable. Il va falloir réussir à trouver des solutions pour pouvoir le battre. C'est un gros challenge », estime Gilles Cervara, l'entraîneur français de Medvedev.
L'autre hic pour son protégé, c'est que sa quinzaine australienne a été éreintante, au contraire de celle de Sinner.
À deux occasions – soit autant de fois que dans toute sa carrière auparavant –, il a comblé un retard de deux sets à zéro avant de s'en sortir en cinq sets. Contre Alexander Zverev (no 6) en demi-finales (5-7, 3-6, 7-6 (4), 7-6 (5), 6-3), et dès le deuxième tour face au Finlandais Emil Ruusuvuori (53e), 3-6, 6-7 (1), 6-4, 7-6 (1), 6-0.
Il a également eu besoin de cinq manches pour écarter Hubert Hurkacz (no 9) 7-6 (4), 2-6, 6-3, 5-7, 6-4 en quart de finale.
Sinner, lui, n'a laissé échapper qu'une seule manche en six matchs, contre Djokovic. Au total, il a passé quasiment six heures de moins – l'équivalent d'au moins deux matchs – sur les courts du Melbourne Park.
S'il s'impose dimanche soir, il deviendra le troisième joueur italien, le cinquième femmes et hommes confondus, à inscrire son nom au palmarès d'un tournoi du Grand Chelem, après Nicola Pietrangeli (Roland-Garros 1959 et 1960), Adriano Panatta (Roland-Garros 1976), Francesca Schiavone (Roland-Garros 2010) et Flavia Pennetta (Internationaux des États-Unis 2015).