Un retour couronné de succès pour Rebecca Marino
WTA jeudi, 10 mai 2018. 10:56 mercredi, 11 déc. 2024. 17:50Trois titres en quatre finales sur un total de sept tournois pour amorcer la saison 2018 sur le circuit de la Fédération internationale de tennis (ITF). On ne croirait pas lire la fiche d’une joueuse qui revient au jeu après une absence de cinq ans.
C’est pourtant bel et bien la feuille de route qui défile sous le nom de la Canadienne Rebecca Marino sur le site de la WTA en ce début d’année.
Après s’être inclinée devant l’Américaine Alexa Glatch en qualifications au tournoi de Memphis en 2013, celle qui avait déjà occupé le 38e échelon au classement de la WTA décidait alors de se retirer du monde du tennis. Quelques années plus tard, elle révélera qu’une dépression avait été à l’origine de cette décision. La Britanno-Colombienne n’avait cependant pas fait une croix définitive sur son sport, alors qu’elle a décidé en août 2017 de tenter un retour à la compétition. Évidemment, après une si longue absence, les attentes étaient modestes.
« Je voulais voir si j’allais à nouveau être confortable sur le terrain et comment j’allais jouer. Il y avait tellement de points d’interrogation au départ en raison de mon absence que je voulais tout simplement revenir et avoir du plaisir », a-t-elle mentionné lors d’une entrevue accordée à RDS.ca.
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« Je veux garder mes attentes basses, mais c’est certain qu’il y a une partie de moi qui va se comparer à la manière dont je jouais lorsque j’étais à mon mieux avant d’arrêter », a-t-elle avoué.
Même si les résultats ne sont pas la priorité de celle qui occupait en date du 12 février dernier le 917e rang au classement de la WTA, celui qui a travaillé à ses côtés à ses débuts, Sylvain Bruneau, sait très bien qu’elle ne veut pas uniquement faire acte de présence.
« On a un plan et des aspirations, mais elle voulait revenir et ne pas faire les choses à moitié. On va voir comment les choses vont, mais elle met les bouchées doubles sur le terrain, en gymnase, dans tout ce qu’elle fait. Je pense qu’elle va avoir des retombées et qu’elle a le potentiel d’être une très belle histoire », illustre-t-il.
Les récentes lignes de ce récit donnent raison à l’entraîneur. À son premier tournoi à Antalya en Turquie à la fin janvier, Marino parvient non seulement à passer au travers des qualifications, mais à soulever le trophée de championne au terme de la finale.
« Je ne pensais pas à gagner au départ, même si le sentiment est évidemment agréable, a-t-elle convenu. Après une si longue pause, déjà de pouvoir revivre une situation de match était satisfaisant. »
« J’ai eu une bonne dose de confiance lorsque j’ai vu que je pouvais disputer une finale aussi tôt. J’ai continué de croire que je pouvais connaître du succès », a-t-elle expliqué.
Marino retrouve non seulement ses marques, mais fait écarquiller les yeux en sol turc, mettant la main sur trois titres en autant de tournois. Si elle se concentrait à éviter les qualifications des différentes compétitions afin d’accéder directement au tableau principal, les résultats ont dépassé les attentes.
« Après un certain point, je tentais de ne pas me mettre trop de pression sur les épaules en me disant que je devais absolument gagner, mais en même temps, j’étais heureuse d’y arriver. Mon objectif principal était de ne pas jouer toutes les qualifications, donc en faisant la demi-finale ou mieux au tournoi précédent, je pouvais les éviter et c’était mon objectif d’avoir une exemption chaque semaine. Les victoires en finale étaient un extra », a-t-elle laissé échapper en riant.
Sylvain Bruneau ne peut cacher cependant qu’il s’attendait à ce que sa protégée connaisse du succès.
« Je mentirais si je disais que j’étais complètement surpris, mais on ne savait pas non plus à quoi s’attendre exactement en raison de sa pause. En voyant le nombre de matchs qu’elle a gagnés consécutivement, j’étais super satisfait et je suis vraiment excité avec ce qui s’en vient », a-t-il maintenu.
La première défaite en 2018 est finalement survenue aux mains de la Slovène Nina Potocnik en quarts de finale d’un autre tournoi en Turquie. En un peu moins d’un mois, la Canadienne aura enregistré un impressionnant total de 20 victoires en 21 sorties. Une pause de quelques semaines s’imposait donc afin de ne pas brûler trop rapidement l’essence dans le réservoir.
« Après le quatrième tournoi, je commençais à ressentir de la fatigue. Mais je ne m’en faisais pas trop, car j’étais contente d’avoir disputé autant de matchs et de voir que je ne me fatiguais pas trop rapidement non plus », a-t-elle convenu.
Son repos lui a permis d’attaquer cette fois une série de tournois au Japon. Marino a baissé pavillon en quarts de finale à Kofu devant la 95e raquette mondiale, Luksika Kumkhum. Après une sortie rapide à Kashiwa, Marino s’est inclinée lors de la finale du tournoi d’Osaka, en battant au passage la 91e joueuse au classement de la WTA, Kurumi Nara. Tous ces résultats lui ont permis de faire un prodigieux bond de 353 places au classement durant cette période.
Rien n’était cependant laissé au hasard pour ce retour à la compétition et les conditions étaient maximales pour que la Canadienne puisse se sentir dans son élément. Cette dernière a pu compter sur l’appui d’un entraîneur tant en Turquie, qu’au Japon.
« Je ne voulais pas qu’elle soit seule pour ses premiers tournois, a affirmé Sylvain Bruneau. Le tennis est un monde de solitude et je voulais qu’elle soit bien encadrée. J’étais au Japon aussi, mais Simon Larose était également auprès d’elle.»
Compléter le travail « inachevé »
Marino a elle-même annoncé son désir de renouer avec le circuit professionnel à Sylvain Bruneau. Ce dernier se souvient de la joie qu’il a ressentie lorsqu’il a reçu ce coup de fil au mois d’août dernier.
« Lorsqu’elle m’a appelé pour me dire qu’elle songeait revenir au tennis compétitif, j’avais la chair de poule tellement j’étais content », s’est-il remémoré.
« Ça me faisait plaisir de lui ouvrir les portes du Centre national afin de s’entraîner avec nous et compléter le travail inachevé en quelque sorte », a-t-il ajouté.
La tâche n’était pas des plus aisées pour la Canadienne. Même si elle s’est maintenue en forme, notamment en faisant partie d’une équipe d’aviron, tout en ne s’éloignant pas trop des terrains de tennis avec son rôle d’entraîneuse en Colombie-Britannique, elle devait être en mesure de disputer plusieurs matchs à haute intensité sur une courte période de temps. Après un retour progressif en septembre, l’intensité a grimpé de plus en plus à l’entraînement afin qu’elle puisse effacer cinq années loin du circuit à son retour sur le terrain.
« Il y avait beaucoup de travail en vue de mon retour, a enchaîné l’athlète de 27 ans. J’ai recommencé en douceur en septembre, mais je n’ai pas arrêté de m’entraîner jusqu’à mon retour en janvier. Je voulais enlever la rouille de mes frappes et me sentir à un niveau adéquat afin d’effectuer un retour. »
« Cinq ans c’est une longue période. Heureusement elle avait pris sa pause alors qu’elle était jeune, donc elle revient tout en étant encore dans la vingtaine. Il demeure que c’est très long comme période », a soutenu Sylvain Bruneau.
Les portes pourraient s’ouvrir
Celle qui occupe désormais le 438e échelon du classement de la WTA se prépare afin de reprendre la route après trois semaines passées au Stade IGA à s’entraîner. Celle qui disputera son prochain tournoi en Floride était d’ailleurs aux côtés de ses compatriotes lorsqu’elles ont vaincu l’Ukraine lors de la rencontre de barrage du Groupe Mondial II de la Coupe Fed.
Bien que la principale intéressée aurait voulu contribuer sur le terrain à la victoire canadienne, elle était bien heureuse d’avoir été auprès de l’équipe.
« J’étais très contente qu’ils m’incluent et d’avoir pu me retrouver sur le banc avec l’équipe afin d’encourager. Évidemment, comme toute joueuse le dirait, j’aurais préféré être sur le terrain et jouer », explique celle qui a bien apprécié représenter son pays par le passé. Une expérience qui pourrait bien se répéter selon le capitaine de l’équipe.
« Je pense qu’elle va rejouer en Coupe Fed et sera de retour au sein de l’équipe. J’étais donc content qu’elle puisse s’imbiber de l’atmosphère. Elle a déjà participé comme joueuse, mais pas beaucoup. C’était vraiment bien de l’avoir avec nous », a-t-il affirmé.
Marino ne veut cependant pas se projeter trop loin, alors que ce qui importe pour elle c’est le prochain tournoi. Celle qui ne souhaite pas divulguer toutes ses attentes en vue de la saison apprécie les moments qu’elle passe sur le terrain et l’expérience acquise lui permet d'accepter que certains moments seront parfois plus difficiles que d’autres.
« Je savoure chacun des moments sur le terrain et je travaille aussi fort que je peux. C’est certain qu’il y a des journées où c’est plus difficile d’être sur le terrain, mais je me sens encore plus motivée. On verra comment je me sentirai dans quelques mois avec la fatigue », a énoncé celle qui aimerait évidemment participer à la Coupe Rogers à Montréal en août prochain.
Sylvain Bruneau a précisé que plusieurs facteurs allaient être pris en compte en vue de la sélection des joueuses qui pourront prendre part au tournoi en sol montréalais. Malgré son classement, Marino pourrait tout de même être considérée d’une façon ou d’une autre, à la lumière de ses résultats, que ce soit par l’entremise d’un laissez-passer pour les qualifications ou d’un tournoi de pré-qualifications.