Marquis Grissom a vécu une période très particulière en 1994 et 1995. Après avoir connu la plus grande déception professionnelle de sa vie quand la grève a privé les Expos d’aspirer à la conquête de la Série mondiale, il a gagné ce précieux championnat la saison suivante avec les Braves d’Atlanta.

En 17 saisons bien remplies, Grissom a vécu l’apogée de sa carrière à ce moment car il n’a jamais pu répéter l’exploit par la suite.

À travers quelques mois, l’ancien voltigeur est donc passé du deuil ressenti avec la prometteuse édition des Expos à l’accomplissement avec les Braves.

Marquis GrissomGrissom se veut donc un témoin privilégié pour évaluer le talent de ces deux équipes 20 ans après le conflit de travail qui a provoqué un tort pratiquement irréparable au baseball à Montréal. 

« Je dis toujours aux gens que la comparaison ne pourrait être meilleure car j’ai vécu les deux situations. Avec les Expos, nous n’avons simplement pas eu l’occasion de jouer jusqu’au bout. Nous avions la même concentration et le même aplomb », a indiqué Grissom en entrevue au RDS.ca.

Celui qui s’est rapidement forgé une place dans le cœur des amateurs des Expos durant son séjour à Montréal entre 1989 et 1994 considère que les éléments étaient réunis au sein de ce groupe talentueux qui a été démantelé par une vente de feu.

« La question demeure de savoir si tout serait tombé en place parce que certains facteurs peuvent changer très rapidement une série, mais nous avions tout ce qui était nécessaire et c’est définitivement l’une des meilleures équipes de ma carrière. »

Grissom, qui sera en ville pour les matchs préparatoires des Blue Jays de Toronto face aux Mets de New York vendredi et samedi (28 et 29 mars) au Stade olympique, a ressenti des émotions partagées quand il a été cédé aux Braves en retour de Roberto Kelly, Tony Tarasco et Esteban Yan.

Il quittait l’équipe qui lui avait permis de s’établir dans le baseball majeur pour celle de sa ville d’origine. Grissom aurait aimé poursuivre l’aventure avec Montréal, mais il a compris les réalités économiques du sport quand il a traversé un premier processus d’arbitrage.

« C’était en 1993, si je me souviens bien, parce que je vieillis. Ce fut une expérience vraiment déterminante et ce n’était pas amusant à l’époque, mais j’ai découvert le côté administratif et c’est devenu tellement utile. J’ai réalisé que j’étais une petite compagnie qui travaillait pour une énorme entreprise. Je devais faire la meilleure chose pour ma carrière et je n’avais aucun contrôle sur mon échange par les Expos, l’arbitrage ou l’autonomie », a confié Grissom qui a retiré des leçons de cet événement qui est survenu en 1993.

« J’ai ensuite utilisé mes cartes comme je pouvais et je voulais seulement faire de mon mieux sur le terrain en essayant de gagner. Je m’attardais aussi à être un excellent coéquipier et grandir au fil de ma carrière », a enchaîné celui qui utilise maintenant ses atouts pour aider les jeunes.

Des souvenirs précieux à Montréal

Même s’il a joué des matchs de saison régulière avec six formations du baseball majeur, Grissom a disputé le tiers de sa carrière avec le logo des Expos. C’est à Montréal qu’il s’est bâti une solide réputation et qu’il a développé ses premières amitiés au baseball professionnel.

Ses plus beaux souvenirs vécus à Montréal se retrouvent donc très haut dans son palmarès personnel immédiatement derrière le championnat avec les Braves.

Marquis Grissom et Sandy Alomar« Mon meilleur souvenir avec les Expos sera toujours le match parfait de Dennis Martinez. Je dis souvent que de ma position au champ centre, j’avais l’impression de regarder un artiste au sommet de son art qui peint un chef-d’œuvre. Il remontait dans les comptes et se sortait de toutes les situations avec des tirs audacieux comme des balles à effet. C’était magnifique! Dans mon livre, ce souvenir se situe tout près de la Série mondiale », s’est-il remémoré. 

Pour cet événement à Montréal qui comprendra aussi un gala, Grissom renouera avec la majorité des joueurs de l’édition 1994 comme Pedro Martinez, Larry Walker, John Wetteland, Moises Alou, Ken Hill, Jeff Fassero, Wilfredo Cordero et Cliff Floyd. Ce groupe est inoubliable à ses yeux.

« C’est mon deuxième meilleur souvenir avec Montréal. Je parle de notre façon de jouer et mon amour pour Felipe (Alou) qui dirigeait d’une main de maître. Il trouvait le meilleur de chacun et il mérite d’aller au Temple de la renommée en tant qu’entraîneur. »

Mais la grève est venue anéantir tous les efforts déployés et c’est étonnant de constater que Grissom en sait toujours très peu sur les causes de ce gâchis.

« Même 20 ans plus tard, je ne connais pas encore les détails de tout ce qui s’est passé. J’ai entendu plusieurs choses, mais je ne sais pas s’ils (les dirigeants des Expos) ont fait tout le nécessaire pour éviter ce scénario. Je sais juste que Montréal est une ville des ligues majeures qui mérite une équipe. Je ne dis pas cela parce que j’ai joué pour les Expos, mais plutôt parce que les amateurs et l’amour du baseball sont présents », a-t-il dévoilé.

Deux décennies se sont écoulées depuis ce conflit déclenché le 12 août 1994. Au fil du temps, le côté économique s’est accaparé un grand rôle dans l’évolution de ce sport, mais Grissom préfère se concentrer sur l’aspect sportif. 

« Ça n’a pas tant changé depuis 20 ans. Je m’ennuie un peu du fait que la dimension de la vitesse a perdu de son importance dans les stratégies. Ce serait bien de revoir plus de joueurs excitants qui changent le cours des matchs. Sinon, c’est très semblable et je donne beaucoup de crédit à ceux qui jouent maintenant et ceux qui nous ont précédés », a jugé celui qui ne songe pas à relancer sa carrière d’entraîneur.

Visage emblématique des Expos au début des années 1990, Grissom se démarquait justement par sa vitesse, son agilité, son aisance et ses atouts défensifs. Il a eu l’intelligence d’employer ses nombreux atouts et de les mettre au profit des enfants et adolescents.

« J’adore enseigner ce sport qui a été si bon pour moi. Je veux aider les jeunes de mon mieux. Dans le fond, je suis tout simplement un « baseball man », a conclu celui qui recevra l’une des belles ovations samedi.