PHILADELPHIE - Demandez à Jamie Moyer de vous parler de Camp Erin et il perd contenance. Les larmes lui montent aux yeux et sa voix se noue en parlant du réseau de camps qui accueillent des enfants affligés par la perte d'un être cher.

Ensuite, quand vous écoutez ces enfants, il est facile de comprendre pourquoi le lanceur des Phillies de Philadelphie se laisse gagner par l'émotion.

Matthew Leist et sa soeur cadette, Tristana, font partie des milliers d'enfants qui ont effectué un séjour dans l'un des 18 camps mis sur pied aux quatre coins des Etats-Unis par Moyer et sa femme, Karen. Le 4 juillet 2003, les Leist ont perdu leur mère, Victoria, morte d'un cancer.

"Quand ma mère est morte, j'ai ressenti un grand vide. Rien n'avait plus aucune importance, a dit Matthew, qui était alors âgé de 9 ans. Quand je suis allé à Camp Erin et que j'ai eu la chance de rencontrer d'autres enfants qui vivaient la même chose que moi, ce fut incroyable. C'est comme si je m'étais trouvé dans le noir et que Camp Erin avait tout illuminé."

Matthew, qui vit près de Seattle, a célébré son 15e anniversaire samedi, le même jour où Moyer devait effectuer son tout premier départ en carrière en Série mondiale, alors que les Phillies et les Rays de Tampa Bay se sont disputés le troisième match.

Leist savait exactement quoi souhaiter.

"Les Moyer nous ont tellement aidé que la plus belle chose que je puisse lui souhaiter est de remporter ce match pour qu'il puisse célébrer avec sa famille", a-t-il avoué.

Tristana a de son côté déclaré que l'expérience à Camp Erin était "presque indescriptible".

"Ca m'a ouvert les yeux. Ca m'a fait voir que je n'étais pas la seule à avoir perdu un être cher", a dit la jeune fille âgée de 11 ans.

Les camps ont été nommés en l'honneur d'Erin Metcalf, une adolescente de 15 ans que les Moyer ont rencontré par le truchement de l'organisme Rêves d'enfants en 1998, alors que Jamie s'alignait avec les Mariners de Seattle.

Ils ont passé beaucoup de temps avec Erin, atteinte d'un cancer du foie, avant qu'elle ne perde sa bataille en 2000. Deux ans plus tard, ils ont inauguré le premier Camp Erin, dans l'Etat de Washington.

"Erin adorait aider les autres enfants, a déclaré Karen Moyer. C'était une adolescente très spéciale qui a perdu la vie. Nous voulions lui rendre hommage.

"De se retrouver en compagnie de jeunes qui ont vécu la même chose qu'eux redonne des forces aux enfants qui fréquentent ces camps. Quelque chose de spécial semble toujours se passer dans ces camps et nous ressentons vraiment la présence d'Erin dans chacun d'eux."

Les jeunes peuvent prendre part au même type d'activités auxquelles ils pourraient s'attendre dans un camp de vacances, en plus de pouvoir rencontrer des personnes ressources et d'interagir avec d'autres jeunes ayant vécu des expériences similaires.

Matthew s'est rappelé avoir fait du canot et de l'escalade, mais il se souvient particulièrement d'une session de bricolage. Les enfants avaient été invités à faire des étoiles pour représenter l'être cher disparu. Ils se sont ensuite dirigés vers un lac avec leurs étoiles, y ont mis le feu et les ont regardées en pensant à la personne disparue.

"De toutes les étoiles, la mienne et celle de Tristana sont les seules qui sont restées collées l'une à l'autre, s'est-il rappelé. Nous nous sentions comme si notre mère tentait de nous lancer un message. Ca nous a aidés à passer au travers."

Moyer a parlé longuement avec les reporters depuis la fin du deuxième match de la série. Si cette première présence en Série mondiale le touche, rien n'équivaut l'émotion qui l'assaille quand il parle des Camps Erin, pour lesquels il a reçu le prix Roberto-Clemente en 2003, remis au joueur qui combine excellence sur le terain et implication communautaire.

"Quand vous voyez l'impact que cela peut avoir sur la vie des enfants qui n'ont pas demandé à vivre cette expérience, de savoir qu'il existe des groupes de soutien qui peuvent leur apprendre que la vie continue et qu'ils pourront toujours se souvenir de la personne disparue d'une façon positive, vous vous dites que tout cela en valait vraiment la peine."