MONTRÉAL - L'épouse de l'ancien champion du monde de boxe Arturo Gatti continue de croire que celui-ci s'est suicidé et ce, malgré les révélations d'une enquête privée, faites mercredi au New Jersey, sur la mort de son ex-conjoint.

L'enquête, financée par Pat Lynch, l'ex-gérant de Gatti, et menée par une équipe d'experts en preuves médico-légales, conclut que l'ancien pugiliste montréalais a été assassiné il y a deux ans, au Brésil.

Les conclusions du rapport ont été dévoilées au lendemain du début d'un procès civil à Montréal devant trancher qui, de la famille de Gatti ou de sa veuve, héritera de la fortune du défunt.

Gatti a été retrouvé mort, à l'âge de 37 ans, en juillet 2009, dans un logement qu'il louait avec sa famille dans la station balnéaire de Porto de Galinhas, au Brésil.

Sa veuve, Amanda Rodrigues, a été catégorique mercredi lorsqu'elle s'est adressée à une foule de reporters rassemblés au palais de justice de Montréal. Elle dit rejeter les conclusions de l'enquête parce que celle-ci a été financée par M. Lynch.

Elle a plutôt indiqué qu'elle attendrait la diffusion d'un documentaire de nouvelles sur la mort de son mari, réalisé par des réseaux télévisés du Canada et des États-Unis. Elle a aussi soutenu qu'il faudrait attendre les résultats de la seconde autopsie mais qu'elle demeurait certaine qu'il s'agissait d'un suicide.

« Je suis certaine qu'ils diront la vérité parce qu'ils ne sont pas payés par moi ou par l'autre partie », a-t-elle soutenu, en parlant des reportages.

« Il serait plus facile pour moi de me dire qu'il ne s'agit pas d'un suicide, mais je suis convaincue que ce l'est », a aussi déclaré Mme Rodrigues.

Les résultats de cette seconde autopsie, menée au Québec, n'ont toujours pas été rendus publics.

Le rapport américain a été dévoilé après dix mois d'enquête, et contredit la version officielle de la police brésilienne, qui a conclu au suicide.

« Cette enquête doit être relancée si les autorités brésiliennes ont un iota de morale, d'éthique et si elles se soucient de leur réputation », a dit le réputé pathologiste Cyril Wecht, qui a qualifié la version de l'enquête criminelle originale de « pure fiction ».

Utilisant des photos de la scène de crime, des entretiens, des rapports d'autopsie ainsi que des simulations informatiques, l'équipe d'experts du New Jersey a remis en question la version officielle sur de nombreux aspects.

Une profonde coupure à l'arrière de la tête de Gatti n'a pu être causée par une chute sur le plancher et la position dans laquelle il a été retrouvé, avec sa tête à moitié coincée sous une armoire, n'est pas compatible avec la thèse d'une pendaison, disent-ils.

Cette lacération a été causée par une arme contondante et pourrait avoir neutralisé Gatti avant qu'il ne soit étranglé, a affirmé M. Wecht.

Deux serviettes couvertes de sang, provenant probablement de la blessure à la tête, n'ont jamais été analysées par les autorités brésiliennes, selon Brent Turvey, un expert légiste de l'Alaska.

En plus, la courroie qu'il aurait utilisée n'était pas suffisamment résistante pour soutenir plus de 78 livres (35 kg) pendant plus que quelques secondes, un temps beaucoup plus court que les quelques heures dont la police brésilienne a parlé à la suite d'interrogatoires de Rodrigues.

Les autorités brésiliennes avaient tout d'abord affirmé que la conjointe de Gatti était la principale suspecte et l'avaient arrêtée, pour ensuite la relâcher lorsqu'une autopsie avait révélé que l'ex-boxeur s'était suicidé à l'aide d'une courroie de sac à main.

Eduardo Trindade, un avocat travaillant pour la famille Gatti, a déclaré mercredi qu'il verrait à ce que la rapport du groupe d'experts soit traduit en portugais et présenté aux enquêteurs brésiliens d'ici un mois ou deux et qu'il exercerait de la pression afin qu'Amanda Rodrigues soit accusée.

Bien que personne au cours de la conférence de presse tenue mercredi au New Jersey ne l'ait directement accusée d'être impliquée dans ce meurtre, plusieurs des experts l'ont laissé sous-entendre.

« Si elle était seule sur les lieux, qui a commis le meurtre? », a demandé Paul Ciolino, un enquêteur de Chicago embauché par Pat Lynch.

« Il a été assassiné parce qu'il avait de l'argent. C'est le plus vieux motif du monde. »

Procès civil

Rodrigues est actuellement impliquée dans une bataille judiciaire avec la famille Gatti à Montréal au sujet de la fortune de son défunt époux, estimée à 6 millions $ US par Ciolino.

L'impact possible du rapport dévoilé mercredi sur le déroulement du procès civil demeure inconnu pour l'instant, mais ses conclusions n'ont pas été soumises comme des pièces à conviction.

Une demande de la famille Gatti pour repousser le début du procès afin de permettre la consultation du rapport avait été rejetée la semaine dernière par la juge Claudine Roy.

Carmine Mercadante, un avocat représentant la famille Gatti, a affirmé qu'il ne commenterait pas le rapport du New Jersey.

« Je n'ai pas à parler de ça présentement parce que ce n'est pas mon procès », a-t-il affirmé.

Me Mercadante a ajouté qu'il ne ferait pas appel de la décision de la juge Roy et qu'il se pencherait sur les conclusions du rapport afin de déterminer s'il peut en faire davantage à ce chapitre.

Le procès s'est poursuivi mercredi avec le témoignage d'amis de Gatti décrivant la relation du couple.

La validité de deux testaments est au coeur du litige, alors que chacun désigne des bénéficiaires différents.

Les avocats de la famille Gatti affirment que l'homme ne comprenait pas le testament enregistré en 2009, quelques semaines avant sa mort. Ce document lègue tout à Mme Rodrigues.

Ils plaident qu'un testament précédant - qui n'a jamais été retrouvé - est valide et désigne la famille de Gatti comme les héritiers de la fortune du boxeur.

Surnommé « Thunder », Gatti a livré plusieurs de ses combats les plus mémorables à Atlantic City, dont trois sanglants affrontements contre Mickey Ward - le premier en 2002 - qui lui ont valu l'affection de plusieurs amateurs de boxe.