Champion des poids super-moyens du WBC de décembre 2000 à mai 2001, Davey Hilton a terminé sa carrière avec une fiche de 41-2-2, 26 K.-O. Il a été choisi comme étant le 9e plus grand boxeur québécois du XXIe siècle à la suite d’une consultation auprès d’experts et d’amateurs à RDS.ca.

Un talent fou. Une carrière qui n’a jamais atteint son plein potentiel malgré la conquête tardive d’un titre mondial en demi-teinte en 2000. Sixième Québécois de l’histoire à être sacré champion du monde de boxe, 13 ans après son frère Matthew : Davey Hilton a marqué, à sa manière, l’histoire de la boxe du Québec.

Le livre « Le clan Hilton – Autopsie d’un gâchis » du journaliste Robert Frosi, publié en 2003, nous fait comprendre, sans justifier ou excuser, le contexte difficile dans lequel Dave Hilton fils a grandi.

Celui que l’on surnomme Davey est l’ainé d’un clan de cinq garçons, qui ont tous été élevés de manière spartiate par l’ancien boxeur Dave Hilton père, un alcoolique violent. L’ancien promoteur de Davey, Roger Martel, dira que le fils ressemble à son père : « une face d’ange dans la vie, mais un tueur dans le ring ».

Les enfants apprennent la boxe à un très jeune âge et le patriarche présente même des combats d’exhibition entre ses fils Davey, 7 ans, Alex, 6 ans, et Matthew, 5 ans. Les plus jeunes, Stewart et Jimmy, n’échapperont pas à ce traitement de bêtes de foire.

La montée et la chute du clan

Après une carrière amateur d’une seule défaite en 184 combats, Davey Hilton amorce sa carrière professionnelle en 1981 contre Noel Torres au Centre Paul-Sauvé, alors qu’il n’a que 17 ans. Sa réputation se répand comme une trainée de poudre et Hilton enflamme les amateurs de boxe du Québec au point de remplir le Forum de Montréal quelques jours avant son 20e anniversaire pour son premier duel contre Mario Cusson. Le résultat « nul technique » écourté à 3 rounds en raison d’une coupure sur le visage de Cusson ne satisfait personne. Trois mois plus tard, ils sont près de 20 000 spectateurs présents pour la suite attendue.

En réaction à un long jab lancé par Cusson au centre du ring, Hilton contre-attaque comme un pitbull. Il s’approche de Cusson à l’aide de rapides crochets qui déstabilisent son aussi jeune et talentueux adversaire. Cusson est poussé vers les câbles alors que les coups se multiplient tout en devenant plus précis. Cusson tente une ultime riposte avec la droite. Hilton profite de l’ouverture pour asséner une dernière droite. 29 secondes seulement se sont écoulées au combat quand l’arbitre Guy Jutras constate que Cusson est hors combat. La légende Hilton est née et perdure encore à ce jour grâce à d’autres triomphes éclatants comme celui peu après sur Denis Sigouin.

C’est la boxe d’une autre époque. Celle des combats locaux, celle où la mafia tire bien des ficelles avec plus ou moins de subtilité. Quand Frank Cotroni vend les frères Hilton au promoteur Don King, tel que démontré ultérieurement par la Commission Bernier, l’avocat de la famille des boxeurs, Frank Shoofey, est abattu dans un crime qui demeure jusqu’à présent non résolu.

La vente des frères Hilton à Don King a brièvement été bénéfique pour Matthew, couronné champion des poids mi-moyens de l’IBF au Forum de Montréal en 1987 avec sa victoire par décision unanime sur Buster Drayton. Mais le riche mirage de l’aventure américaine n’a été qu’une série de déceptions qui ont engendré une spirale destructrice d’alcool et de crimes minables, comme ce pathétique hold-up d’un Dunkin’ Donuts commis par Davey et Matthew en avril 1991, pour une centaine de dollars.

Le retour de Davey

Avec les années et les commissions d’enquête, la scène de la boxe québécoise change de portrait, mais les noms des talentueux Hilton restent attrayants. Les nouvelles vedettes montantes de la scène locale des années 1990 sont donc souvent appelées à se mesurer d’abord à Alex et ensuite à Davey s’ils ont réussi l’examen d’entrée.

Stéphane Ouellet avait déjà fait ses classes contre Alain Bonnamie et Alex Hilton. Classé mondialement, Ouellet a la chance d’obtenir un combat contre le champion du monde des super-moyens du WBC Hassine Chérifi. Il doit d’abord battre Davey Hilton qui approche les 35 ans. Hilton est dans une forme splendide pour ce duel du 27 novembre 1998. Supporté par ses nombreux fidèles partisans, son jab impitoyable brise le nez de Ouellet tôt dans le combat. Malgré tout, le 1er aspirant mondial WBC contrôle bien les 10 premiers rounds du combat. Au 12e round, Hilton retrouve l’esprit du tueur. Le pitbull est de retour. Ouellet est dans l’impasse et l’arbitre Denis Langlois intervient dans une fin de combat qui change le cours de l’histoire de la boxe québécoise.

Ouellet n’aura jamais la chance de se battre en combat de championnat du monde. Sa longue et coûteuse célébration ravageuse, à coup de drogues et d’alcool, après sa victoire contre Hilton dans le 3e combat en septembre 2000 le prive d’un affrontement contre Dingaan Thobela pour le titre mondial et mène ultimement à son divorce d’Interbox.

C’est plutôt le méchant garnement qui hérite de ce combat de championnat du monde, alors qu’il séjourne dans un centre de désintoxication. Son titre de champion, acquis le 15 décembre 2000 par décision partagée et légèrement controversée sur le boxeur sud-africain, sera bref. Peu après, le WBC dépouille Hilton de sa ceinture en raison des accusations de nature sexuelles, déposées par ses propres filles et pour lesquelles il sera condamné à 7 années de prison.

Jean-Luc Legendre