MONTRÉAL - Depuis qu’il porte fièrement l’emblématique culotte or du Kronk Gym de Detroit, Adonis Stevenson est devenu un tout autre boxeur.

D’élève au potentiel certain, mais sous-exploité, Stevenson s’est métamorphosé en rat de bibliothèque à la suite de son admission au sein de cette vieille institution fondée par Emanuel Steward et reprise par son neveu Javan Hill.

Stevenson y a ainsi étudié les grands classiques du noble art - Muhammad Ali, Joe Louis et Sugar Ray Robinson notamment -, mais c’est résolument un contemporain - Mike Tyson - qui demeure sa plus grande influence.

Tyson a été un véritable phénomène au milieu des années 1980 en devenant champion du monde des poids lourds à l’âge de 20 ans seulement. Il semblait littéralement invincible jusqu’à temps qu’il rencontre Buster Douglas sur son chemin en février 1990 à Tokyo.

L’Américain a ensuite remis la main sur un titre après avoir purgé une peine d’emprisonnement de quelques années. Et c’est cette résilience qui inspire le plus Stevenson, lui qui a également connu des démêlés avec la justice au tout début des années 2000, alors qu’il n’était même pas encore boxeur professionnel.

« Tyson a eu des problèmes, mais il a toujours été capable de performer dans le ring », a expliqué Stevenson à la suite d’un entraînement public tenu mardi après-midi dans un hôtel du centre-ville de Montréal. « C’est le poids lourd qui a réussi à faire le plus parler de lui après Ali et George Foreman. »

« Quand il montait dans le ring, c’était pour passer le knock-out à ses adversaires, pas pour uniquement faire 12 rounds. Il savait qu’il avait à un travail à faire et il le faisait bien. »

Stevenson est néanmoins conscient que de multiplier les victoires spectaculaires avant la limite pourrait le transformer en sorte de bête de cirque. C’est pourquoi il espère un jour être reconnu davantage pour sa technique que sa simple force de frappe.

« Pour être un puncheur, tu n’as pas le choix d’être intelligent », a répondu le gaucher. « Ce n’est pas parce que tu frappes fort que tu vas automatiquement gagner par knock-out. Ça ne marche pas comme ça à mon niveau. Tyson, par exemple, avait de bonnes esquives et savait où viser. »

« Dans le fond, plus le temps va avancer, plus je vais finir par démontrer que ce n’est pas juste une question de force de frappe. »

« Un champion bien entouré devient bien meilleur en défendant son titre qu’en allant le chercher », a ajouté le promoteur Yvon Michel. « Il a la confiance d’avoir réussi et surtout les ressources. »

Mais Stevenson ne regarde pas uniquement du côté de son idole de jeunesse. Comme son entraîneur l’a laissé entendre la semaine dernière pendant une conférence téléphonique, Stevenson épie les faits et gestes des meilleurs de la profession comme Floyd Mayweather fils.

« Mayweather, il fait tout bien », a analysé le Québécois. « Il peut ralentir la vitesse d’un combat et se mettre à accélérer soudainement. Je regarde aussi beaucoup Bernard Hopkins. Il a battu Tavoris Cloud tellement facilement. Ç’a été un vrai jeu d’enfant! »

Chose certaine, peu importe de qui Stevenson s’inspire, ses victoires spectaculaires permettent de perpétuer l’héritage d’un des plus mythiques gymnases de boxe de la planète.

Danser pour danser

À la suite de sa victoire sur Aaron Pryor fils en décembre 2011, Stevenson était encore très peu pris au sérieux en raison des carences évidentes de son jeu de pieds. Il était souvent en déséquilibre après avoir lancé ses coups, ce qui le rendait extrêmement vulnérable contre un adversaire beaucoup plus doué et expérimenté.

Steward et son assistant Derrick Coleman n’avaient d’ailleurs pas manqué de souligner que c’était l’un des premiers aspects sur lequel ils avaient travaillé avant le combat contre Jesus Gonzales - le premier de Stevenson sous l’égide du Kronk. Les mois et les combats ont passé et le Blainvillois semble aujourd’hui plus à l’aise que jamais.

« Nous avons mis l’accent sur le jeu de pieds, parce que l’équilibre et la force de frappe en découlent », a précisé Hill. « C’est pourquoi Adonis pourra connaître du succès chez les mi-lourds. En améliorant son jeu de pieds, nous avons considérablement augmenté sa puissance. »

« Je m’amuse, c’est une passion », a atténué Stevenson. « Quand tu aimes une chose, tu la fais passionnément. Je cherche constamment à repousser mes limites. »

« J’ai travaillé fort pour en arriver là, mais je sais que tout peut s’arrêter. C’est pour ça que je dois travailler encore plus fort aujourd’hui. Je me considère toujours comme le négligé. »

Comme il l’avait fait avant son combat contre Chad Dawson, Stevenson rejette du revers de la main tous les arguments quant à son manque d’expérience, même s’il n’a disputé que 22 duels depuis le début de sa carrière et ne compte que 80 rounds d’expérience.

« Cloud a trois ou quatre combats de plus que moi », a répliqué le champion des mi-lourds du WBC. « Le nombre de rounds, ça ne veut rien dire. Ça n’a tout simplement pas d’importance. »

Étant donné que Stevenson a couché Dawson en 76 secondes, il est difficile de le contredire.

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