Il lui arrivait de se rendre sur la piste ovale de Calgary pour courir car Mathieu Bilodeau, né à Québec, a séjourné dix ans en Alberta.

 

Un jour, il remarque par hasard une bague olympique que porte au doigt une femme sur place qui dispense des cours. Graduellement, ils font connaissance et une belle discussion s’installe. Il apprendra alors qu’il s’entretient avec une ex-olympienne en marche rapide.

 

Il demande à Janice McCaffrey si elle voudrait lui enseigner la technique de cette discipline. « Je courais pour le plaisir en 2014. Elle a accepté. De retour à la maison, j’en ai discuté avec ma conjointe Marie-Pier Blais. Je n’étais pas plus intéressé que ça. Marie-Pier m’a expliqué qu’à son avis, mon style deBilodeau coureur s’apparentait très bien à la marche olympique. »

 

Mathieu l’a pris au mot.

 

À son retour à l’ovale, il annonce à Janice son désir d’apprendre et surtout qu’il aspire rien de moins à une participation aux Jeux Olympiques de Rio de Janeiro prévus 18 mois plus tard. Sceptique, Janice trouvait que les intentions de Mathieu étaient grandement exagérées. « Je vais vous démontrer que je suis capable d’y arriver. Je vais me défoncer.»

 

Nombreux sont ceux et celles qui s’entendaient pour dire que déjà, à 30 ans, il était trop vieux pour réaliser un tel exploit.

 

 

IL S’EFFONDRE

 

Mathieu réalise son rêve et s’y retrouve. Janice lui confirmera qu’elle n’a jamais vu un athlète apprendre aussi rapidement qu’il ne la fait. Ça tient pratiquement du miracle. Toutefois, il va en payer le prix. Lés répercussions seront des plus néfastes. Il encaissera une série de blessures dans les mois, les années qui suivront.

 

Comptable de métier, il continue à travailler. Par conséquent, il ne peut prendre part au pré-camp olympique. Il se contente d’un camp d’entraînement, seul à Banff avec des températures qui tournaient aux alentours de 10 à 12 degrés Celsius. Lorsqu’il se présente à Rio, la température frisait les 30 degrés Celsius. Il s’effondre au 38e kilomètre. Visiblement, il doit sévèrement subir les conséquences de son inexpérience et d’une progression beaucoup trop rapide.

 

« Je m’étais surentraîné et la fatigue mentale se faisait sentir. Plusieurs éléments sont venus contrecarrer mes plans. Puis, je te dirais que la marche n’a jamais vraiment été une passion pour moi. Le ski de fond et le triathlon venaient davantage me satisfaire. »

 

Il admet qu’il ne dispose pas du profil idéal pour un marcheur. Il estime qu’il est beaucoup trop lourd avec au moins 15 kilos de trop. Alors, lorsqu’il fait chaud et que le soleil lui tape sur la tête, il n’est jamais à la hauteur de ses capacités. C’est ce qui lui est arrivé lorsqu’il s’est présenté aux jeux de Tokyo sur la distance de 50 km. Il a dû se contenter du 45e rang.

 

Pourtant, aux Mondiaux de 2019, lors d’une épreuve qui s’était déroulée durant la nuit, il avait récolté le 14e échelon, ce qui représentait davantage ses talents athlétiques.

 

 

L’ARRIVÉE DE WILLOW-ÈVE

 

Le voilà maintenant rendu à 38 ans et il ne veut toujours pas abandonner. Toutefois, 2022 représente une année de transition. Les distances traditionnelles auxquelles il s’était habitué, ont disparu et la flamme s’est quelque peu éteinte pour lui lorsqu’il a appris que son unique porte de sortie représentait le relais mixte pour se qualifier aux jeux de Paris.

 

« Les championnats du monde approchent pour le 35 km. Avril-mai laissera place à diverses compétitions en Europe. J’ignore pour le moment comment mon Bilodeau 4avenir va se dessiner. On verra si les résultats seront au rendez-vous. Je n’en ai aucune idée. »

 

Son corps hypothéqué commence à le faire souffrir.

 

Lorsque nous avons réalisé l’entrevue, il s’entraînait en Floride, incapable de porter le masque sur la piste à Québec.

 

Jusqu’à présent, il se dit satisfait de ses temps mais on sent nettement une certaine inquiétude dans ses propos.

 

Que dire de la naissance de la petite Willow-Ève, 5 mois qui l’incite à dire que les priorités changent dans la vie.

 

« Tu sais, si j’avais pu commencer ce sport plus tôt dans ma vie, la suite aurait assurément été différente. »

 

J’ai adoré notre conversation.

 

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