Les joueurs frustrés par la gestion de crise
LCF lundi, 17 août 2020. 16:23 samedi, 23 nov. 2024. 19:06MONTRÉAL – Après avoir composé avec de l’incertitude pendant plusieurs mois, les joueurs la Ligue canadienne de football doivent gérer leur frustration à la suite de l’annulation de la saison 2020. Ils sont nombreux à dénoncer la gestion chaotique du commissaire Randy Ambrosie.
Vétéran du circuit canadien, Patrick Lavoie a suivi la situation de près depuis le début de la pandémie et il ne se gêne pas pour critiquer Ambrosie.
À lire également
« C’est juste dommage qu’on ait demandé aux joueurs de rester en forme pour une éventuelle saison, mais on les a un peu niaisés, ils auraient pu se trouver un autre emploi, un autre revenu pour leur famille. C’est un peu eux qui paient pour les lacunes de la Ligue », a exposé Lavoie à RDS.
« Je m’en fous de ne pas mâcher mes mots, mais ce fut une gestion horrible de tout ça, autant de la pandémie que le sort de la saison. [...] Encore une fois, ce sont les joueurs qui paient le prix », a-t-il enchaîné.
Ce qui fâche des athlètes de toutes les équipes, c'est que les joueurs n'ont pas reçu leur salaire depuis le début de la pandémie contrairement au commissaire et aux entraîneurs des clubs. Vernon Adams fils, le quart-arrière des Alouettes de Montréal, ne s'est pas gêné pour exprimer son mécontentement à ce propos.
#DefundTheCommish #DefundTheCoaches #CFL 🤷🏽♂️ #pay #the #product
— Vernon Adams Jr. (@bigplay_va) August 17, 2020
À la grande déception de Lavoie, cette conclusion laissera des traces pour l’avenir. Selon lui, c’est vraiment la gestion de l’aide financière réclamée qui a été bâclée.
« Le plan d’une ville bulle était le bon, mais la manière de le mettre en œuvre et de demander l’argent, ce fut mal élaboré depuis le premier jour. Je comprends un peu le gouvernement d’être réticent à prêter de l’argent à une organisation qui est arrivée avec rien dans les mains, pas d’entente avec ses joueurs. La Ligue doit se regarder le nombril et se dire qu’elle a mal géré ça. S’il y a un coupable, c’est un peu leur gestion de cette crise », a tranché Lavoie qui devait jouer sa dernière saison en 2020.
À ses yeux, le sauvetage économique a été si mal piloté qu’il aurait pris la même décision que le gouvernement fédéral.
« Même dans ta cour, ça ne semble pas clair, tu ne t’es pas entendu avec tes joueurs, tu ne sembles pas savoir comment tu vas dépenser l’argent, tu lances des chiffres un peu comme ça... N’importe quelle banque aurait refusé de prêter de l’argent. Tu pars avec deux prises et c’est difficile de refaire ton image par la suite. Le gouvernement avait peur de prêter l’argent et d’être déçu du fonctionnement ensuite », a témoigné Lavoie.
Par conséquent, Lavoie ne peut que voir des nuages gris pour la saison 2021 du circuit canadien alors qu’il souhaite pourtant le contraire.
« L’année prochaine, je crois qu’on verra beaucoup de départs, des joueurs qui ne reviendront pas après avoir trouvé un autre travail surtout qu’on s’attend à des diminutions de salaire dans les prochaines années. C’est sûr que ce sera difficile. Je crois qu’il y aura de grandes remises en question », a-t-il admis et souhaité du même coup.
Muamba avait prévenu ses joueurs
En tant que représentant des joueurs pour les Alouettes, le secondeur Henoc Muamba voyait malheureusement venir depuis longtemps le verdict qui a été confirmé lundi.
« Bien sûr, on savait que c’était une possibilité donc je n’étais pas sous le choc. Le sort de la saison était vraiment dépendant de la décision du gouvernement et ce n’était pas quelque chose qu’on pouvait contrôler. On pouvait seulement attendre et, plus c’était long, plus on comprenait que c’était plausible comme conclusion », a commenté Muamba à RDS.
Ainsi, très tôt dans la pandémie, Muamba a suggéré à ses pairs de se tourner vers une autre avenue pour compenser.
« Dans chaque conversation en tant que représentant des joueurs, je disais aux gars de chercher quelque chose ailleurs parce que c’était incertain de notre côté », a-t-il insisté plus d’une fois.
Muamba refuse donc de se laisser abattre par la situation et il y décèle même du positif.
« C’est la même chose pour moi, je veux essayer plusieurs choses dans la vie. Je ne vois pas cette décision comme une terrible nouvelle, je préfère changer ma perception et me dire que, normalement, on est tellement occupés par le football qu’on n’a pas le temps de faire autre chose. Cette fois, on pourra explorer d’autres options dans notre vie. Au final, le football, ça ne dure pas éternellement donc c’est une occasion pour tout le monde », a maintenu le joueur étoile.
Évidemment, il est conscient que certains athlètes doivent composer avec une plus grande précarité financière. Il espère donc que plusieurs joueurs pourront bénéficier – et de manière rétroactive – aux programmes de soutien déployés par les gouvernements.
« On nous a dit que la LCF continue de travailler sur cet enjeu et l’Association regarde ce dossier de près. Normalement, les joueurs ne sont pas payés durant la saison morte, c’est l’une des raisons pour lesquelles la LCF ne pouvait pas adhérer à certains programmes. Je crois que les critères ont été changés de manière suffisante pour qu’on puisse être admissibles à de tels programmes. Comme ça, les joueurs qui ont évolué dans la LCF en 2019 pourront se faire payer non seulement à partir de maintenant, mais pour les derniers mois aussi », a précisé Muamba.
À partir de maintenant, la LCF devra se questionner sur son avenir et mieux se préparer pour un contexte économique qui ne sera pas facile. Muamba espère avant tout que la communication sera améliorée entre les dirigeants du circuit canadien et l’Association des joueurs.
Cependant, il n’ose pas exiger le départ d’Ambrosie dont le travail a été malmené par plusieurs piliers de la LCF.
« C’est hors de notre contrôle, ce n’est vraiment pas une décision que les joueurs peuvent prendre. Mais la chose qui devrait le plus s’améliorer entre la LCF et l’Association, des joueurs, c’est la communication. L’un ne peut pas exister sans l’autre. Si on y parvient, ça va améliorer le circuit dans son ensemble », a-t-il conclu.