Les joueurs de football ont la chance de bénéficier d'une saison morte assez longue. C'est une période qui sert à se refaire des forces, même s'il est vrai qu'il incombe à chacun de s'entraîner en solo pendant une période de deux à trois mois.

On s'attend du côté du personnel d'entraîneurs que chacun se présente à Kansas City au mois d'avril avec un certain niveau de forme, de manière à bien attaquer les entraînements planifiés par l'équipe. Pour moi, ça a toujours représenté un défi puisqu'en raison de mes études en médecine, je me rapportais plus tard à ces camps printaniers.

Il devait donc y avoir une communication entre les instructeurs et moi pour que je puisse me rapporter à l'équipe sur la même page que mes coéquipiers, prêt à tout assimiler au même rythme qu'eux.

Étant maintenant diplômé, j'ai pu pour la première fois depuis mes débuts dans la NFL passer à travers le programme prévu pour la saison morte et me présenter au complexe d'entraînement à la mi-avril, en même temps que tout le monde.

Cette fenêtre de temps supplémentaire m'a permis de consacrer autant d'énergies que je le voulais à ma réhabilitation, à ma condition physique générale, à mon cardio, et tout le reste.

Ensuite, ce fut le moment de débuter le camp estival, le 25 juillet.

Je crois qu’il existe à travers les 32 organisations de la NFL plusieurs écoles de pensée en ce qui a trait aux camps estivaux. J’ai été à même de le constater en discutant avec des coéquipiers qui sont passés ailleurs dans la ligue avant d’aboutir à KC.

Pour sa part, Andy Reid a pour philosophie d’imposer à ses joueurs un programme d’entraînement très exigeant. Ce l’est physiquement, psychologiquement et émotivement.

Ce ne sont pas toutes les équipes qui s’éloignent de leur complexe d’entraînement durant cette période de l’été. Chez les Chiefs, la tradition est de se rendre à St. Joseph, une banlieue située à une heure de Kansas City.

L’objectif derrière ça – enfin, c’est ce que j’en pense – est de créer un contexte un peu militaire, mais aussi familial. En vérité, 100 % des énergies de chacun est consacré au football.

On est hébergés dans des dortoirs et on mange dans une cafétéria. Tout est pensé dans une mentalité d’égalitarisme, où chacun a les mêmes conditions peu importe son rôle anticipé avec l’équipe ou le salaire qu’il empoche. Ce sont les mêmes chambres et les mêmes règlements pour tous.

C’est sain d’une certaine manière car ça met l’équipe à l’avant-plan. On passe environ trois semaines à St. Joseph, et on obtient une journée de congé pour chaque tranche de cinq ou six jours d’entraînement.

Il n’y pas d’autre mot pour le décrire : c’est un réel « grind » de tous les instants. Les pratiques débutent tôt le matin et durent entre 3 heures et 3 heures 15. Règle générale, on déploie plus de 100 jeux offensifs durant cette séance. Ce sont des pratiques très taxantes.

Ça s’ensuit du dîner, de rencontres d’équipe, puis d’une autre séance sur le terrain, cette  fois-ci à la marche. On enchaîne avec des entraînements de musculation et d’autres rencontres. Ça nous amène souvent jusqu’à 21 h 30. Bref, ce sont des journées avoisinant les 13 heures.

Un camp très intense a plusieurs avantages

À travers tout ça, il ne faut pas perdre de vue que c’est un marathon. Il y aura des journées moins bonnes que d’autres, et les entraîneurs en sont conscients. Ils ne te reprocheront pas nécessairement une mauvaise journée. Ils vont plutôt s’attendre à ce que tu démontres ta capacité à te ressaisir à faire mieux le lendemain. Le volume d’entraînement, combiné à la chaleur et l’humidité du Mid-Ouest américain, ça fait beaucoup. Surtout pour un joueur originaire de Montréal qui n’est pas habitué à de telles chaleurs!

Mais c’est un mal nécessaire qui prépare le terrain pour la saison. Ça la rend d’une certaine façon plus facile, car tu auras vécu des épreuves physiques intenses avant même de l’avoir commencée. C’est de cette manière que Coach Reid aime bâtir les fondations de l’équipe.

Je peux vous dire que ça aide grandement d’apprendre à être toujours aux aguets par rapport à son habileté à analyser la défense adverse ou à faire des appels à la ligne d’engagement, et ce même quand tu es complètement épuisé. En plus, c’est souvent au quatrième quart, dans des moments cruciaux, que cette fatigue se manifeste.

On est en épaulettes à tous les jours – j’ai entendu que dans certains clubs, par exemple, ça pouvait n’arriver qu’une fois aux trois jours – et on met la pédale au plancher. C’est le seul type de camp que j’ai connu à l’aube de ma sixième saison, et j’apprécie ce que ça m’apporte. C’est payant plus tard dans l’année.

Comme je le disais, ce camp à St. Joseph débute le 25 juillet. Il s’est terminé le 18 août, au lendemain de notre rencontre préparatoire face aux Steelers de Pittsburgh. Par la suite, les horaires sont raccourcis, mais le fonctionnement des pratiques reste sensiblement le même. Au lieu de terminer à 21 h 30, on obtient  notre congé vers 17 h.

Depuis que je suis à Kansas City, l’utilisation des joueurs de l’unité partante dans les matchs préparatoires a toujours été la même. Au premier match, les partants jouent le premier quart. Au deuxième match, ils sont là jusqu’au deuxième quart. Au troisième, ils jouent la première demie et une portion du troisième quart. Et finalement dans le dernier match présaison, les partants obtiennent un congé.

Il n’y a pas de meilleure pratique qu’un match pour se préparer. Même si ce n’est pas à aussi grande intensité que dans la saison régulière, c’est bien de se tester contre différents fronts adverses, différentes structures et différentes pressions. Ça nous permet de mettre à exécution nos algorithmes de protection. C’est toujours pertinent.

Les retranchements, un moment qu'on n'aime pas vivre

Jusqu’en 2017, il y avait des vagues de retranchements au fur et à mesure que le camp avançait. Puis depuis deux ans, c’est une seule annonce, qui est faite le samedi suivant le dernier match préparatoire. Dans notre cas, c’était au retour d’un voyage à Green Bay cette année. Le temps de le dire, on passe d’un effectif de 95 joueurs à un alignement de 53 joueurs.

C’est toujours un moment assez particulier parce que tu vis des moments intenses avec des coéquipiers depuis un mois et demi, et à la fin, des 15 joueurs de ligne offensive présents, il va n’en rester que huit.

Tout au long du camp, il ne faut pas compter les places disponibles et tenter de calculer qui y sera et qui n’y sera pas. C’est du moins ce que je me dis. Ce sont les décisions des entraîneurs, et moi, je me concentre sur ce que je peux contrôler.

Mais assurément, je peux vous dire que ça fait un pincement au cœur de voir des gars qui se sont donné corps et âme tout au long du camp partir sans cérémonie. Évidemment, je leur souhaite la meilleure des chances pour la suite des choses si j’ai la chance de les recroiser, mais ça ne se produit pas toujours comme ça.

Si un joueur est retranché, il passe automatiquement par le ballottage. Pendant une période de 24 heures, il peut être réclamé par un club qui souhaite l’inclure dans sa propre liste des 53. Ensuite, s’il ne trouve pas preneur, il a la possibilité de se joindre à l’équipe d’entraînement de la formation qui vient de le retrancher.

Je pense à Kahlil McKenzie, que j’ai côtoyé durant tout le camp. Après le dernier match, on est revenus à 2 h du matin. On s’est dit « bye » comme si on allait se revoir bientôt, mais il a été retranché et a immédiatement été réclamé par les Seahawks de Seattle. Il a tout de suite dû prendre un vol pour s’y rendre.

C’est la « business » du sport, mais c’est le genre de chose à laquelle on ne s’habitue pas. Ça te rappelle le privilège que tu as d’avoir la stabilité de faire partie d’une même équipe saison après saison.

Sur ce, je souhaite une excellente saison de NFL à tous les lecteurs du RDS.ca!

* propos recueillis par Maxime Desroches

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