Brad Collinson : la tête de l'emploi et peut-être plus
Universitaire mardi, 14 août 2018. 22:29 mercredi, 4 déc. 2024. 20:26MONTRÉAL – On entend deux choses au sujet du nouvel entraîneur-chef des Stingers de Concordia, Brad Collinson : il est très exigeant envers ses joueurs et c’est l’une des bonnes « têtes » de football au Québec.
Même s’il a encore énormément de chemin à parcourir, certains vont jusqu’à prétendre que Collinson pourrait devenir un futur Glen Constantin ou Danny Maciocia. Le compliment le surprend et le fait rougir, mais il ne demanderait pas mieux que d’atteindre ce niveau si respecté.
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« Mon but a toujours été d’être un entraîneur-chef, je n’ai jamais été intéressé par l’avenue d’être un coordonnateur. J’aime gérer une équipe et faire les choses pour que tout fonctionne », a-t-il confié dans une généreuse entrevue en français avec le RDS.ca et un confrère de Québec.
« C’est drôle, quand je parlais avec ma femme, je lui disais que mon but était de le devenir avant mes 40 ans. J’ai réussi, même si ce n’est pas la meilleure situation, mais c’est fait. Je suis loin d’être Danny ou Glen, j’aspire à être eux éventuellement », a poursuivi l’homme de 39 ans qui a été embauché pour pallier au départ-surprise de Pat Donovan.
Fort occupé, Constantin a trouvé du temps pour parler de Collinson et on sentait son plaisir à le faire.
« Je n’ai aucune difficulté à croire qu’il aura du succès. Il est prêt, ordonné et structuré. Il a fait ses preuves et il a touché à tout avec Justin (Éthier, le coordonnateur offensif) et moi en plus de ses expériences avec Équipe Québec et Équipe Canada », a vanté Constantin.
Collinson revient donc à son alma mater. En plus d’avoir joué avec les Stingers (de 2000 à 2002), il a fait ses classes parmi le personnel d’entraîneurs de 2007 à 2010. Son curriculum vitae s’est ensuite garni avec sept saisons comme adjoint avec le Rouge et Or de l’Université Laval, deux années comme entraîneur-chef d’Équipe Canada U18 et quatre avec le même poste pour Équipe Québec.
Cela dit, un retour à la « maison » demeure toujours précieux. Par contre, l’image qui vient en tête serait celle d’un entrepreneur qui hérite d’une maison qui a été laissée inachevée par l’ancien constructeur alors qu’elle doit être remise aux acheteurs sous peu.
« Oui, c’est spécial, ce n’est pas une situation normale. Mais c’est une équipe de vétérans et les gars sont venus me voir en me disant ‘Ne t’inquiète pas, on sait où on s’en va’ », a-t-il mis en contexte, heureux de sentir le leadership qui émanait de sa nouvelle troupe.
Mais cette maison, il l’a récupérée dans quelles conditions?
« Je trouve que c’était en bon état. Les Donovan ont bien fait les choses, ils ont bâti quelque chose. L’état d’esprit a été implanté. Je n’étais pas trop certain en arrivant à la première journée, mais c’est au-dessus de ce que je m’attendais. »
Redevenir un programme élite
Dès les premières minutes d’une visite sur le « chantier » des Stingers, on constate que Collinson doit malgré tout jouer du marteau. Le ton est ferme, intense et répété plus d’une fois.
« Brad, c’est quelqu’un d’autoritaire. Quand c’est le temps de travailler, il faut le faire. Mais il aime aussi rire quand c’est correct. Si tu ne fais pas ce que tu dois faire, il ne sera pas gêné de te le dire. Je n’ai jamais perdu avec lui, j’espère que ça va rester comme ça », a décrit Samuel Brodrique avec une référence à son association avec Collinson au sein d’Équipe Québec.
« J’ai vu que c’est une bonne tête de foot. Il est capable de bien s’entourer, il gère bien ses adjoints et le temps, c’est important pour lui. On en fait beaucoup en peu de temps. Je vois juste du positif de l’avoir avec nous. Il fait de belles choses, de beaux changements, on est bien traités et tout va bien présentement. On voit juste rose en ce moment, on est bien contents de l’avoir avec nous et non contre nous », a ajouté Brodrique.
« Je sais que c’est un gars exigeant. Il l’était avec Équipe Québec et ça n’a pas changé depuis comme on peut le voir depuis le début du camp. Mais il est toujours reconnaissant. Quand tu donnes, il l’est », a décrit Maxime Bouffard, un quart-arrière recrue à Concordia.
« Eux, ils me connaissent, ils savent comment que je fonctionne. Je pense que le mot s’est passé, c’est sérieux. Moi, je trouve que Concordia, c’est un programme élite et il faut qu’on pense comme ça et qu’on fasse les choses comme un programme élite. C’est bien beau de parler, mais ça prend une structure et un sens des responsabilités », a noté le jeune dirigeant qui est père de deux garçons.
La rigueur déployée par Collinson n’étonne personne puisqu’il a grandi à l’école du Rouge et Or. Il souhaite implanter des fondations aussi solides.
« Une structure et une façon de faire, j’ai appris ça de Glen. Au début, tu regardes sa formation et tu te demandes qui est ce joueur. Au final, c’est un joueur étoile. C’est parce qu’ils ont une façon de faire. C’est certain que ma mentalité n’est pas la même que les Donovan, mais je suis un gars de communication, ma porte est toujours ouverte et je veux jaser avec les gars. Je veux avoir le pouls de l’équipe.
« Comme Glen me disait ‘Tu vas voir, les gars que tu as recrutés, ils vont virer de bord devant ton bureau. C’est normal, c’est moi le boss et je dois faire des choix, mais je vais faire les meilleurs pour l’équipe », a exposé l’ancien joueur de ligne offensive.
Bouffard reconnaît que la culture gagnante de l’Université Laval sera la bienvenue à Concordia.
« Il sait ce que ça prend pour gagner, c’est assurément quelque chose qu’il peut transposer ici. Sinon, tout ce qui est de la discipline et du sérieux, c’est bon pour l’équipe. »
Collinson n’était pas prêt la première fois
Ce qui est étonnant dans son association avec le Rouge et Or, c’est que cette organisation tissée serrée embauche rarement des entraîneurs de l’extérieur. Collinson s’est donc assuré d’en profiter au maximum.
« J’ai pris ma place, je n’avais pas peur de poser des questions et d’en demander plus. Je voulais apprendre. C’est certain que j’étais un outsider à Laval, je pense que j’étais le premier qui n’a pas joué là. Glen m’a ouvert sa porte et je suis entré. Il m’a montré comment faire les choses comme il le faut. C’est grâce à lui que je suis rendu ici », a remercié le nouvel entraîneur-chef.
« C’est vrai que c’est rare qu’on ouvre nos portes à d’autres que nos anciens parce qu’on a nos propres valeurs. Mais il a su s’acclimater très bien, il a été très travaillant. Il a travaillé comme recruteur au début, mais ça n’a pas été long qu’on l’a ajouté au personnel d’entraîneurs », a témoigné Constantin qui avait été approché par Collinson.
Son passage à Québec ne l’a pas empêché d’essuyer un échec, celui de voir Mickey Donovan obtenir le poste lorsqu’il a postulé une première fois pour diriger les Stingers.
« Je pensais que j’étais prêt, mais je suis content d’avoir eu ces années de plus. J’ai pu me regarder dans le miroir et voir ce que je devais travailler. J’ai appris bien plus après. C’est sûr que c’est un choc sur l’égo, mais Glen m’en a donné encore davantage », a-t-il avoué.
Constantin n’a pas été réfractaire à l’idée de partager ses précieuses connaissances.
« C’est donnant-donnant. Honnêtement, il a consacré huit années de sa vie à notre organisation et même quand sa famille était à Montréal. Ça me fait hyper plaisir de voir qu’il a progressé. C’est une belle fierté. Je souhaite le meilleur pour mes entraîneurs. Si ça arrive ici, tant mieux, sinon c’est correct que ce soit ailleurs », a évalué Constantin.
Par un hasard fascinant, Collinson effectuera ses premiers vrais travaux comme entraîneur-chef contre ses deux anciens patrons. D’abord, le 17 août, contre Warren Craney, de l’Université York, qui l’avait embauché à Concordia et ensuite contre Constantin, le 1er septembre à Québec. Ce rendez-vous bien spécial rend fébriles les deux hommes.
À long terme, Collinson rêve bien sûr de chauffer et même battre Constantin. Il sait que la bataille sera féroce pour y parvenir, mais n’allez surtout pas lui parler du fameux problème de l’argent. Il n’a rien à cirer des histoires des budgets plus limités à Concordia.
« Si quelqu’un te donne un million, mais que l’argent est dépensé sur de nouveaux uniformes, tu n’es pas plus avancé. C’est surtout une question de mieux structurer les choses », a-t-il avancé.
L’outil le plus important sera toujours le recrutement. L’idée serait de freiner l’exode vers les universités américaines et ontariennes. En tant qu’institution anglophone, Concordia doit absolument « gagner ses batailles dans sa cour » en recrutant les meilleurs espoirs de Vanier, John Abbott et Champlain.
Son bilinguisme constitue sans doute un atout intéressant dans son coffre pour attirer plus d’athlètes.
« Ce n’est rien contre personne, mais juste de parler avec leur entraîneur en français, dans leur langue, c’est le fun pour eux », a convenu Collinson.
Étant donné qu’il a enfilé l’uniforme des Alouettes de Montréal en 2003, on aurait pu déduire que Collinson ambitionne de grimper chez les professionnels à moyen terme. Un parent d’un joueur lui a d’ailleurs posé la question.
« Je veux rester. Je n’ai pas d’aspirations pour ça. Ma femme est avocate ici, j’ai deux jeunes enfants et je ne bouge pas. Ce serait impossible de partir à l’extérieur. S’ils veulent me garder jusqu’à ma retraite, je serais bien content », a conclu Collinson à propos de l’équipe a bien besoin de stabilité.