Le gouvernement canadien gèle les millions de dollars de financement fédéral octroyés à Hockey Canada jusqu'à ce que l'organisation signe une entente avec le Bureau de la commissaire à l’intégrité dans le sport, qui aura le pouvoir de recevoir et d'enquêter de façon indépendante sur les plaintes d'abus et d'émettre des sanctions pour les comportements inappropriés, a déclaré la ministre des Sports Pascale St-Onge dans une entrevue mercredi.

Toutes les fédérations nationales devront s’entendre avec cet organisme récemment mis sur pied, mais pour l’instant, seulement Hockey Canada est touchée par un gel des fonds fédéraux. La commissaire Sarah-Ève Pelletier a commencé à recevoir les plaintes pour abus liées aux équipes sportives nationales du Canada il y a deux jours, le 20 juin.

 

St-Onge a annoncé le gel du financement deux jours après que le président de Hockey Canada, Scott Smith, et le directeur général sortant, Tom Renney, ont témoigné devant le Comité permanent du patrimoine canadien au sujet des allégations d'une femme qui a dit avoir été agressée sexuellement par huit joueurs de la Ligue canadienne de hockey en 2018, dont certains ont joué pour l'équipe canadienne du Mondial junior 2018.
 

« Il s'agit de changer une culture profondément ancrée, il ne s'agit pas de simples solutions éphémères », a déclaré St-Onge.

La femme, qui n'a pas été identifiée dans les dossiers judiciaires, a allégué que les joueurs l'ont agressée sexuellement à plusieurs reprises dans une chambre d'hôtel de London après un tournoi de golf et un gala de Hockey Canada en juin 2018.

Smith a témoigné qu'après qu'une poursuite de 3,55 millions $ ait été lancée en avril contre Hockey Canada, l'organisation a liquidé certains de ses investissements et a réglé le litige en quelques semaines.

Hockey Canada a reçu 14 millions $ du gouvernement fédéral en 2020 et 2021, selon les dossiers du gouvernement, dont 3,4 millions $ en subventions d'urgence pour la COVID-19.

St-Onge a déclaré que Hockey Canada a récemment demandé 2,2 millions $ de fonds fédéraux pour aider l'organisation à se remettre de la pandémie de COVID-19. Cet argent ne sera pas versé tant que les conditions du gouvernement ne seront pas remplies, a-t-elle dit, ajoutant que Sport Canada a informé Hockey Canada de cette décision tôt mercredi.

« Je vais utiliser tous les outils à ma disposition pour m'assurer que les gens sont tenus responsables de ce qui se passe dans le hockey », a assuré St-Onge.

Pour recevoir plus de financement, St-Onge a déclaré que Hockey Canada doit également divulguer publiquement les recommandations qu'elle a reçues de Henein Hutchison LLP, un cabinet d'avocats de Toronto engagé par Hockey Canada pour enquêter sur les allégations d'abus sexuels.

Hockey Canada devra également détailler ses plans pour mettre en œuvre des changements au sein de l'organisation, a ajouté St-Onge.

Le Comité permanent du patrimoine canadien doit également se réunir à huis clos à Ottawa mercredi après-midi pour discuter de la tenue d'audiences publiques supplémentaires et exiger des preuves de la part de Hockey Canada au sujet de la supervision par la fédération des plaintes et des enquêtes relatives aux abus sexuels.

Hockey Canada est le premier point à l'ordre du jour du comité permanent mercredi, a déclaré une source à TSN.

Les Communes réclament une enquête indépendante

Les élus de la Chambre des communes réclament à l'unanimité une enquête indépendante sur la façon dont Hockey Canada a géré une affaire de viol collectif allégué.

Une motion présentée par le bloquiste Sébastien Lemire a été adoptée mercredi par consentement unanime entre les partis.

Viol collectif présumé : les conséquences sur Hockey Canada

Le texte de la motion précise aussi que l'enquête devrait permettre de «savoir s’il s’agissait d’un événement isolé ou s’il existe des lacunes dans la façon dont Hockey Canada traite les plaintes d’agressions sexuelles, de harcèlements sexuels et d’autres types d’inconduites qui lui sont rapportées».

Un peu plus tôt, Ottawa confirmait qu'il gèle le financement de l'organisation. Des révélations ont récemment permis de savoir que Hockey Canada avait conclu une entente à l'amiable avec une victime alléguée d'agression sexuelle par huit joueurs.

Le fédéral a qualifié les témoignages des dirigeants de l'organisation en comité parlementaire d'« extrêmement troublants et préoccupants ».

Lors d'une mêlée de presse, dans le foyer de la Chambre des communes, la ministre des Sports, Pascale St-Onge, a expliqué que Hockey Canada ne verra son financement rétabli qu'une fois qu'elle aura rempli deux conditions.

La première est de transmettre à Sport Canada le rapport du cabinet d'avocats embauché pour enquêter sur l'incident allégué et un plan qui détaille comment seront mises en œuvre les recommandations au sein de l'organisation.

La seconde est d'adhérer au Bureau du Commissaire à l'intégrité dans le sport et de travailler « en étroite collaboration pour changer la culture du silence et (...) lutter contre les violences sexuelles au sein de l'organisation ».

Actuellement, le leadership de l'organisation est « déficient, inapproprié, d'une autre époque », a-t-elle résumé.

Lundi soir, à la suite de la comparution de hauts dirigeants de l'organisation devant un comité parlementaire, Mme St-Onge avait soutenu qu'« on est face à une organisation qui perpétue la culture du silence ».

À ce moment, la ministre St-Onge avait refusé de dire si elle entendait retenir des fonds publics ou si des têtes devaient rouler tant qu'elle n'a pas reçu les conclusions de l'audit financier qu'elle a commandé.

Appelé à réagir, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a salué le travail de la ministre.

« Il n'y a pas grand monde à qui l'on décerne les méritas, mais je pense sincèrement pour avoir vu plusieurs des interventions de Mme St-Onge, (...) qu'elle est orientée vers les bonnes décisions », a-t-il dit.

M. Blanchet a ajouté que la population doit savoir ce qui s'est produit et a accusé les responsables de Hockey Canada d'avoir donné lundi « un spectacle de relations publiques gênant » qui dénotait « un grave manque de respect pour les parlementaires ».

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a pour sa part dit appuyer la décision du gouvernement Trudeau, reprochant du même souffle de tarder à agir pour régler des situations de harcèlement sexuel dans l'armée.

Selon les informations d'abord rapportées par le réseau TSN, une femme qui aurait été agressée sexuellement par huit joueurs juniors de la Ligue canadienne de hockey a abandonné une poursuite après un accord à l'amiable.

Dans les documents de cour qui ont été cités, la jeune femme allègue que les événements se sont produits dans une chambre d'hôtel après un gala de Hockey Canada en juin 2018.

Lors de la comparution devant le comité permanent du patrimoine, le chef de la direction de l'organisation, Tom Renney, a assuré que Hockey Canada n'a pas tenté de « balayer sous le tapis » l'histoire par une opération de camouflage.

Plusieurs députés ont fortement réagi en apprenant qu'il était cependant facultatif pour les joueurs de l'équipe nationale junior de 2018 qui auraient été impliqués dans une affaire de viol collectif de participer à l'enquête sur les événements.