Claude Julien : un an plus tard
Canadiens mercredi, 14 févr. 2018. 13:15 mercredi, 11 déc. 2024. 23:51Il y a un an aujourd’hui, le Canadien congédiait Michel Therrien pour le remplacer par Claude Julien.
Un an plus tard, plusieurs amateurs se demandent en quoi ce deuxième renvoi de Therrien et surtout son remplacement pour la deuxième fois par Claude Julien a vraiment aidé le Tricolore.
Le fait que le Canadien connaisse une saison misérable et qu’il soit virtuellement éliminé des séries depuis un bon moment déjà est loin de mousser les analyses positives à l’endroit de Claude Julien. C’est normal. Le Canadien perd plus souvent qu’il ne gagne. Le Canadien multiplie les façons de perdre avec bien plus de régularité qu’il ne multiplie les façons de gagner.
Vrai que les performances de Carey Price, des performances nettement inférieures à celles qu’il a offertes au fil de sa carrière et qu’il doit offrir pour que son équipe ait une chance de gagner, n’aide pas la cause du coach. Vrai que la blessure au pied qui a miné la saison de Shea Weber et qui a mis en évidence la trop grande vulnérabilité de la « défensive renflouée » du Canadien n’aide pas la cause du coach. Vrai que l’absence perpétuelle d’un vrai centre numéro un n’aide pas la cause du coach. Mais parce qu’il lui revient la responsabilité de faire fonctionner son équipe, Claude Julien doit assumer une part des responsabilités en marge du désastre de cette année.
Et il le fait.
Mais si on se reporte à l’an dernier lorsque la grande décision a été prise, l’arrivée de Claude Julien a donné les résultats positifs attendus.
Redressement nécessaire
Rappelez-vous : les joueurs du Tricolore profitaient du congé statutaire de cinq jours lorsque la nouvelle du congédiement de Therrien et celle de l’embauche de Julien sont tombées. Ils semblaient toutefois en congé depuis un bon moment déjà.
Après le meilleur début de saison de l’histoire du Canadien qui affichait 13 victoires (13-1-1) après ses 15 premières rencontres, le club était en proie à un laisser-aller périlleux comme en témoignaient la défaite de 4-0 encaissée à Boston et les 12 défaites encaissées (6-10-2) lors des 18 dernières rencontres.
Le premier mandat donné à Claude Julien l’an dernier était de reprendre le contrôle d’une équipe qui n’en avait plus vraiment.
Il l’a fait.
Oui! Claude Julien a encaissé un revers à son premier match. Une défaite de 3-1 aux mains des Jets de Winnipeg. Et s’il est tout à fait exact que les joueurs du Tricolore n’avaient rien démontré de concluant lors de cette rencontre, Carey Price lui s’était distingué dans le revers. Sa performance tranchait avec celles multipliées depuis le revers de 4-2 aux mains des Sharks de San Jose le 16 décembre au Centre Bell. Revers au cours duquel il avait été rappelé au banc par Michel Therrien dans le cadre d’une décision que plusieurs ont identifiée comme le commencement de la fin pour l’ancien coach du Tricolore. Ce n’est pas le rappel au banc de Price qui a sonné l’arrêt de mort de Therrien. Ça non. Mais comme le coach était déjà contesté – ils le sont tous à plus ou moins grande échelle – en raison de son comportement affiché à l’endroit que quelques « souffre-douleur » appréciés par leurs coéquipiers, cette décision a entraîné une forme d’indifférence du gardien sans qui Therrien ne pouvait gagner.
Après ce premier revers aux mains des Jets, le Canadien a retrouvé son aplomb. Julien a guidé son équipe vers 16 victoires (16-7-1) et les 24 dernières parties de la saison ont ravivé les espoirs en vue des séries.
Des espoirs qui se sont vite transformés en désespoir alors que les Rangers de New York et surtout leur gardien Henrik Lundqvist ont mis en évidence les lacunes du Tricolore en matière offensive pour les éliminer en six matchs.
Partage de responsabilités
Cette élimination a fait mal. Elle a vite balayé du revers de la main les succès immédiats de Claude Julien. Elle a surtout haussé les attentes des partisans tout en réduisant au minimum leur patience.
Ce soir à Denver, contre l’Avalanche, le Canadien disputera son 56e match de la saison. Sa fiche de 22-26-7 est désolante. Et même si Claude Julien présente un bilan de 38-33-8 – en saison régulière – après 79 matchs derrière le banc du Tricolore, il est loin de pouvoir crier : mission accomplie!
Il est clair que les pertes de joueurs importants ont fait très mal au Canadien et donc à son entraîneur-chef.
Jonathan Drouin devait remplacer Alexander Radulov. C’est loin d’être arrivé. Fort de ses 21 buts et 53 points, Radulov a déjà égalé en 57 matchs avec les Stars sa production de la saison dernière avec le Tricolore. Mieux entouré à Dallas qu’à Montréal, il était clair que Radulov afficherait de meilleures statistiques avec sa nouvelle équipe. Ce n’est donc pas les performances de Radulov qui faussent l’équation autant que les contre-performances de Drouin qui n’affiche que huit buts et 28 points après 50 parties. C’est d’ailleurs son différentiel de moins-26 qui retient toute l’attention…
David Schlemko devait remplacer Andrei Markov. On rit encore de cette suggestion…
Karl Alzner devait remplacer Alexei Emelin. C’est loin d’être fait. Joe Morrow a-t-il remplacé Nathan Beaulieu? Je ne sais pas. Comprenez-moi bien : je n’étais pas un grand fan d’Emelin et de Beaulieu. Ils devaient être faciles à remplacer. Le fait qu’ils ne l’aient pas été est bien plus une faute directe à imputer à l’équipe de direction générale qu’à l’équipe d’entraîneurs.
L’entrée en scène surprise de Victor Mete et ses performances plus qu’intéressantes ne peuvent apaiser la douleur associée à la perte de Mikhail Sergachev.
Est-ce que Claude Julien a sous la main une équipe à l’image de celle qu’on lui a confiée il y a un an? Ma réponse est non. Elle est plus faible. Plus vulnérable. Et comme en plus Carey Price et Shea Weber n’ont pas été en mesure d’éviter le pire avec des performances associées à leur niveau d’excellence, le Canadien a le caquet bien bas.
Et son coach paie le prix.
Plus de poigne
Bien que je sois porté à distribuer bien des critiques du côté des joueurs et du côté du directeur général, cela ne veut pas dire que Claude Julien soit sans tache et sans reproche.
Après tout, c’est lui le coach.
Jonathan Drouin et Alex Galchenyuk ont beau donner l’impression par moments d’être des enfants gâtés sur la patinoire et d’être rois en maîtres de leur carré de sable en refusant de jouer autrement qu’ils entendent le faire, il est du mandat du coach de leur faire comprendre raison.
Certains prétendent que le système de jeu imposé par Claude Julien est trop difficile à respecter. Qu’il mine les joueurs offensifs.
Voyons donc! Les systèmes sont sensiblement les mêmes d’une équipe à une autre. En plus, les systèmes sont bien plus concentrés sur le travail en zone défensive afin de contrer l’adversaire et de récupérer les rondelles.
Lorsqu’ils sont en possession de la rondelle, c’est aux joueurs à faire appel à leur talent, à leur vision, à leurs mains, pour effectuer de bonnes lectures de jeu, de bonnes passes, décocher de bons tirs, savoir quand foncer, quand se retenir.
Ce n’est pas à cause du système que les défenseurs bousillent autant de premières et deuxièmes passes, ce n’est pas à cause du système que le Canadien se rend coupable d’autant de revirements en zone défensive et en zone neutre, ce n’est pas écrit dans le système qu’un attaquant doit cesser de jouer lorsque son tir est bloqué ou qu’il doit cesser de patiner pour venir aider son gardien et ses défenseurs après qu’il ait été victime d’un bel arrêt du gardien adverse.
Comme les coachs, les systèmes ont le dos large. Et c’est toujours quand l’équipe perd plus souvent qu’elle ne gagne.
Claude Julien impose les systèmes, mais il ne peut marquer à la place de ses joueurs. De toute façon, il n’avait pas des mains de marqueurs lorsqu’il jouait. Mais Julien était un joueur fier qui devait se battre pour obtenir son temps d’utilisation.
Et la plus grande critique que je formule à son endroit cette année est de ne pas s’être montré assez sévère à l’endroit des joueurs qui n’offrent pas leur plein rendement. Ou pis encore, qui se contentent de demi-mesures en fait d’effort et de conviction.
Que Claude Julien donne des chances à Drouin, Galchenyuk et Pacioretty de marquer, c’est normal. C’est même essentiel. Mais que ces trois joueurs gardent leur temps d’utilisation privilégié – le coach a été plus sévère à l’endroit de Galchenyuk en début de saison c’est un fait – au sein des unités spéciales me chicote de temps en temps.
Je comprends qu’un coach doive compter sur ses meilleurs joueurs pour gagner. Mais quand tes meilleurs sont non seulement moins bons que les meilleurs des équipes adverses et qu’ils jouent la tête basse, qu’ils jouent sans courage et sans conviction, pourquoi ne pas les clouer au banc un peu… et un peu plus s’il le faut?
La saison est terminée. Bien malins ceux et celles qui peuvent assurer que Pacioretty et Galchenyuk – je prends pour acquis que Drouin ne bougera pas même si le Canadien ne compte pas d’intouchables au sein de sa formation à mes yeux, ça inclut Price et Weber – seront de retour l’an prochain. Alors, pourquoi ménager les susceptibilités? Si Claude Julien veut avoir une vraie idée du caractère de ses joueurs, des limites de leur talent et des performances qu’ils peuvent offrir, il serait tout à fait normal et j’oserais écrire souhaitable, d’obliger les «meilleurs» à travailler plus fort pour mousser leurs statistiques personnelles au lieu de leur faire cadeau de petits points faciles à obtenir – en attaques massives ou en prolongation – et d’offrir ces occasions plus faciles aux gars qui le méritent – je pense à Gallagher, à Byron et à Lehkonen ici – ou à ceux qui rêvent de ces occasions pour démontrer qu’ils peuvent contribuer également. Et je pense ici aux Nicolas Deslauriers et autres joueurs de soutien…
Et si Marc Bergevin veut mettre Galchenyuk et Pacioretty dans la vitrine pour faire mousser leur valeur aux yeux des clubs qui pourraient s’intéresser à eux?
Je lui suggérerais de présenter des bandes vidéo des années passées. Car de la façon dont ils jouent cette année, ce n’est pas en les mettant sur la patinoire qu’il aidera sa cause. Pas plus que celle de son coach.
Mais bon...
Peut-être que Claude Julien a les mains liées en ce moment et qu’il les aura jusqu’à la fin de la période des transactions le 26 février prochain. Mais une fois le couperet tombé sur les transactions, j’ai bien hâte de voir comment Claude Julien prendra, ou reprendra, le contrôle sur son équipe afin de préparer ceux qui seront de retour l’an prochain à jouer au hockey de la bonne façon et surtout avec conviction.