MONTRÉAL - Comme tout le monde, j’ai bien hâte de voir Cole Caufield disputer son premier match dans l’uniforme du Canadien. En fait non : j’ai hâte de le voir disputer ses premiers matchs dans l’uniforme tricolore.

Car depuis le premier match en carrière de Ryan Poehling et surtout la dure réalité qui a suivi cette arrivée trop belle pour être vraie, nous devrions tous avoir compris qu’il faut bien plus qu’un match, aussi bon soit-il ou à l’inverse aussi désolant puisse-t-il avoir été, pour avoir une bonne idée de ce que les projections et les espoirs donneront de concret.

À titre informatif, je rappelle ici que Ryan Poehling a réussi un tour du chapeau en plus d’ajouter le but décisif en tirs de barrage dans une victoire de 6-5 du Canadien aux dépens des Maple Leafs le 6 avril 2019. Depuis ce match « historique », Poehling a marqué un but et a ajouté une passe dans les 27 matchs qu’il a disputés dans la LNH. Le centre américain connaît de très bons moments avec le Rocket de Laval. Ce qui est certainement très encourageant pour lui, ses fans et l’organisation. Mais plus de deux ans après avoir disputé son premier match en carrière dans la LNH, c’est dans la Ligue américaine que Poehling est ancré.

Pas question de prétendre que Cole Caufield suivra les traces de Ryan Poehling. En fait, je lui souhaite d’avoir autant de succès lors de son premier match, mais d’éviter le long passage à vide qui l’a suivi.

Mais alors que tout le monde réclame l’entrée en scène de Caufield, j’aimerais insister sur le fait qu’il faudra bien plus que la contribution du dernier récipiendaire du trophée Hobey Baker – joueur par excellence de la dernière saison dans les rangs universitaires américains – pour aider le Canadien à gagner ne serait-ce que juste assez pour consolider sa place en séries.

Caufield a des mains sensationnelles. Il l’a prouvé au sein de toutes les équipes avec qui il a évolué, dans toutes les ligues au sein desquelles il a évolué, et dans toutes les circonstances qu’il a affrontées.

Mais aussi bon soit-il, Caufield n’arrivera pas à sortir le Canadien du petit carré de sable dans lequel il patine en ce moment.

Il faudra beaucoup plus que Caufield pour que le Canadien freine sa glissade de neuf revers à ses 13 derniers matchs. Neuf revers encaissés en temps réglementaires est-il besoin de le rappeler.

Cette glissade n’est pas encore périlleuse alors que le Canadien jouit toujours d’une avance de quatre points sur les Flames et qu’il a un match de plus à disputer. Mais elle commence à donner un brin la nausée à ceux et celles qui ont le cœur fragile, la confiance plus fragile encore ou un malheureux mélange des deux.

Est-ce qu’un but ici ou là de Caufield à forces égales ou en attaque massive ferait du bien au Canadien?

Bien sûr!

Et maintenant que Tomas Tatar est lui aussi tombé au combat, peut-être que Caufield aura l’occasion de marquer ce premier but en carrière dès lundi.

Mais pour donner le coup de barre qui devra être donné afin de redresser cette équipe qui est à la dérive, il faudra surtout que les Weber, Chiarot, Petry et Edmundson soient meilleurs et assument les rôles importants et difficiles à remplir associés à leur niveau de talent et au leadership associé à leurs noms.

Il faudra que les attaquants qui ont de l’expérience et qui ont déjà marqué sur une base régulière dans la LNH jouent mieux qu’ils ne le font actuellement. Qu’ils jouent avec plus de conviction. Qu’ils jouent comme ils l’ont fait en première période samedi à Calgary sans baisser la tête et les bras aussitôt qu’ils ont l’impression qu’un autre match est en voie de leur filer entre les doigts.

Il faudra aussi que l’entraîneur-chef cesse d’agir comme un coach par intérim et qu’il donne vraiment le ton. Qu’il s’impose lui aussi. Qu’il inspire confiance et motive sa troupe au lieu de donner l’impression – et je suis convaincu que ce n’est qu’une impression – qu’il est dépassé par les fluctuations entre le bon et le mauvais hockey que ses joueurs offrent d’un match à un autre, d’une période à une autre, d’une présence à une autre.

Car oui ça va vite dans la LNH. Autant pour les joueurs que pour les coachs.

Si les leaders de cette équipe n’assument pas leur rôle, si la défense s’effrite trop souvent au lieu de se solidifier, si l’attaque se barre les pieds dès qu’elle a de la vive opposition le long des bandes et dans les coins de patinoire, l’entrée en scène de Caufield, comme le ou les buts qu’il pourrait marquer une fois en uniforme, ne serviront qu’à impressionner les fans au lieu de faire du Canadien un club à prendre au sérieux une fois en séries.

Parlant de leadership, le Canadien n’a gagné que trois fois en 11 matchs (3-8-0-0) depuis qu’Alexander Romanov a mis un terme hâtif à la saison de Brendan Gallagher en lui fracturant un pouce avec un tir frappé qui s’est trompé de cible.

S’il restait une ou deux personnes pour douter de l’importance de Gallagher au sein du Canadien, la séquence noire actuelle, de loin la pire que le Tricolore ait eue à traverser cette année, devrait les avoir déjà convaincus.

Pourquoi Jake Evans?

Au lieu de se plier à la ferveur populaire, c’est vers Jake Evans et non Cole Caufield que l’état-major du Canadien s’est tourné pour remplacer Jonathan Drouin qui a raté un deuxième match de suite en raison de malaises qui ne sont pas associés à la COVID. Du moins, c’est la version officielle.

Plusieurs ont conclu que le Canadien a choisi Evans au détriment de Caufield. Cette conclusion est fausse.

Car dès le moment où l’état-major a pris la décision de donner le match de samedi à Cayden Primeau pour offrir une soirée de congé à Jake Allen, Cole Caufield ne pouvait plus être rappelé en urgence pour remplacer Drouin parce qu’il n’y avait pas assez d’espace sous le plafond – marge de 1 093 334 $ – pour insérer son salaire et les primes qui l’accompagnent : 1 308 333 $.

Avec Primeau dans le filet, Jake Evans et Michael Frolik – ils touchent tous deux 750 000 $ – étaient les seules options.

Mais attention! Le Canadien ne pouvait pas les prendre les deux, car un seul salaire pouvait être ajouté à la masse du tricolore. L’état-major devait choisir entre l’un ou l’autre, même si Paul Byron a lui aussi déclaré forfait en raison d’une blessure.

Parce qu’il était impossible d’ajouter les deux attaquants disponibles au sein de l’équipe de réserve, c’est Erik Gustafsson qui a disputé un deuxième match de suite à titre de septième défenseur.

Pourquoi Gustafsson pouvait jouer et non Frolik? Parce que le salaire de Gustafsson est déjà inclus dans la masse salariale de l’équipe.

Pour faire une place à Caufield, le Canadien devait remplacer Cayden Primeau par Charlie Lindgren afin de se donner les quelque 215 000 $ nécessaires pour « s’offrir » le jeune Américain.

Ceux et celles qui trépignent d’impatience de voir Caufield auraient préféré voir le Canadien garder Jake Allen – Charlie Lindgren est un plan D, E ou F – devant la cage un match de plus et procéder à l’inversion des gardiens auxiliaires pour ainsi ouvrir la porte à Caufield.

Je veux bien.

Mais Cayden Primeau est plus près du vestiaire du Canadien que ne l’est Caufield pour le moment. Le jeune gardien risque d’ailleurs de jouer un grand rôle avec le Tricolore l’an prochain si Jake Allen est repêché par le Kraken de Seattle.

Sans oublier que le mystère persiste quant à l’état de santé de Carey Price qui compose avec les conséquences d’une commotion cérébrale. De retour à Montréal pour y subir des examens plus approfondis, pourra-t-il reprendre sa place mercredi prochain, au Centre Bell, alors que le Canadien amorcera le dernier droit de la saison régulière?

Est-ce que quelqu’un le sait vraiment?

Si Price prolonge sa convalescence et que Jake Allen doit être encore plus sollicité qu’initialement prévu, on peut comprendre l’état-major d’avoir tenu à lui donner congé samedi.

Même si cette décision a donné de l’urticaire aux partisans qui n’en peuvent plus d’attendre l’entrée en scène de Caufield.

Il sera intéressant de voir si l’état-major prendra maintenant les moyens à sa disposition pour faire une place à son premier choix de 2019.

Mais j’insiste encore : il faudra bien plus que Cole Caufield pour que le Canadien joue comme un club qui mérite sa place en séries et donne l’impression de pouvoir rivaliser avec Edmonton, Winnipeg et même Toronto une fois en séries.

Solide sortie malgré les quatre buts accordés

Si Cayden Primeau avait failli à la tâche, samedi, on pourrait critiquer davantage les décisions prises par le Canadien avant le deuxième des trois matchs consécutifs contre les Flames.

Mais le jeune gardien a été solide en dépit les quatre buts marqués à ses dépens.

Tôt en première, il a accordé un vilain retour dans l’enclave après un arrêt de la jambière gauche. Après cette largesse dont les Flames n’ont pas su profiter, Primeau est redevenu le gardien qui fait de lui le plus bel espoir du Canadien devant le but. Bien positionné, il a souvent été frappé par les rondelles qu’il a absorbées en limitant au minimum les retours.

Et les buts?

Johnny Gaudreau l’a déjoué avec un tir parfait sur le premier. La couverture défensive déficiente de Romanov et Merrill a permis à Gaudreau d’obtenir un angle de tir très favorable. L’as marqueur des Flames a su en profiter.

Milan Lucic a marqué dès une mise en jeu perdue à la gauche du gardien. Est-ce que le tir était foudroyant? Non! Mais regardez la séquence sous l’angle que vous voudrez, Primeau n’a jamais vu la rondelle entrer. Les arbitres n’ont plus d’ailleurs puisqu’ils ont eu besoin d’une reprise pour confirmer qu’il y avait bel et bien eu but.

Sur les deux autres buts, Gaudreau, encore lui, et Brett Ritchie ont tiré dans des cages désertes après des passes parfaites qui ont mystifié les joueurs du Canadien qui étaient alors complètement perdus. Une passe molle de Nick Suzuki, des mains plus molles encore de Jeff Petry qui a mal reçu cette passe de Suzuki et une affreuse perte de rondelle de Kotkaniemi à la ligne bleue du Canadien sont bien plus responsables des troisième et quatrième buts des Flames que la tenue du jeune gardien.

Le cinquième a été marqué dans un filet désert.

Primeau a donc accordé quatre buts sur 33 tirs. Statistiquement, ce n’est pas fort. Mais quand tu regardes la manière dont il s’est comporté devant la cage, le petit gars a fait du bon boulot.

Personne ne peut lui imputer la responsabilité de la défaite.

Entre les lignes

-      Nick Suzuki a marqué son neuvième but de la saison samedi à Calgary. C’était son premier en sept matchs et son deuxième à ses 15 dernières parties. Cela dit, c’était la sixième fois sur ces neuf buts que Suzuki donnait les devants 1-0 à son équipe...

-      C’est toutefois Suzuki qui a perdu la mise en jeu qui a conduit au deuxième but des Flames. Le jeune centre a gagné seulement cinq des 14 mises en jeu qu’il a disputées samedi. Grâce à Phillip Danault (14 en 21, 67 %) et Jake Evans (5 en 7, 71 %), le Canadien a toutefois terminé avec un taux de réussite de 52 % samedi. Comme quoi gagner des mises en jeu ça aide, mais qu’il faut surtout éviter de perdre les mises en jeu les plus importantes...

-      Malgré la victoire, les Flames demeurent conscients de l’immense défi qui se dresse devant eux. « Il fallait gagner les deux premières parties et nous l’avons fait. Mais la prochaine sera tout aussi importante. Montréal a encore quatre points d’avance et un match en mains », a indiqué le capitaine Mark Giordano après la rencontre...

-      Giordano et ses coéquipiers espèrent que les deux victoires consécutives pourront amorcer une séquence victorieuse qui les propulsera en séries. « Nous n’avons pas surfé sur des séquences de victoires cette année. En maintenant notre niveau de jeu actuel, en marquant comme on le fait pour se donner des avances et les maintenir, on se donne la chance de coller des victoires. Ce serait le meilleur temps de l’année pour y arriver », a commenté le capitaine des Flames après la victoire de samedi.

-      Les Flames seront en quête lundi d’une troisième victoire de suite. Ce serait la quatrième fois cette saison qu’ils colleraient trois gains. Mais comme le Canadien, ils n’ont pas encore gagné quatre matchs consécutifs cette saison...

-      Les Flames se sont défendus à cinq défenseurs samedi. Noah Hanifin a quitté le match dès sa deuxième présence après une vilaine chute qui a suivi un contact avec Corey Perry...

-      Dans la défaite, Erik Gustafsson a récolté ses deux premières passes avec le Canadien, dont l’une lors d’une attaque massive...

-      En 19 présences totalisant 11:40 de temps d’utilisation, Jake Evans a été beaucoup plus utile au Tricolore qu’Eric Staal qui n’a rien cassé encore samedi. En plus de récolter une passe sur le premier but, Evans a eu le nez dans l’action et a été efficace dans tous les aspects du jeu. Il a fait ce qu’on attend d’un bon joueur de soutien...

-      On a remarqué Eric Staal en fin de match lorsqu’il a raté une chance en or devant le filet des Flames. La cause était déjà perdue, mais quand même. En plus d’être trop discret sur la glace, Staal a perdu quatre des dix mises en jeu qu’il a disputées...

-      Bon dimanche...​