Guy Lafleur a eu droit à l’hommage qu’il méritait : un hommage simple comme l’homme qu’il a toujours été; un hommage qui a soulevé les passions comme le « Démon Blond »  les soulevait dès qu’il posait les patins sur la patinoire.

 

Un hommage grandiose et d'une grande classe

Un hommage à la hauteur de Guy Lafleur.

 

Les premiers Guy! Guy! Guy! ont résonné aux quatre coins du Centre Bell trois bonnes minutes avant que la cérémonie ne commence. Le ton était donné.

 

C’est au rythme de « L'Essentiel », chanté par Ginette Reno, que les premières photos mettant en vedette le grand disparu se sont mises à défiler sur la patinoire.

 

Une patinoire belle, lisse, parfaite. Une patinoire ceinturée de bandes sur lesquelles le nom de Guy Lafleur, son célèbre numéro 10 et l’autographe que ses partisans par dizaines de milliers ont obtenus au fil des cinquante dernières années avaient remplacé les habituelles publicités.

 

Une patinoire sur laquelle on aurait tant voulu revoir Lafleur s’élancer à l’épouvante pour faire voler ses cheveux blonds avant de soulever la foule avec un de ses buts.

 

Bien choisies, bien présentées, les photos ont fait contrepoids à l’absence de la vedette de la soirée.

 

De Thurso, où il a terrorisé ses premiers gardiens de but, à Québec avec les Remparts qu’il a transformé en or, à Montréal où il a permis au Canadien de soulever la coupe Stanley à cinq reprises pendant son règne, les photos ont permis de parcourir les grands moments de sa grande carrière. Qu’il soit entouré de coéquipiers, qu’il soit porté en triomphe dans le vestiaire, qu’il ait les mains remplies de trophées dont la coupe Stanley, ces photos de Lafleur mettaient toujours en évidence le sourire généreux du héros de la soirée.

 

Entre le grand succès de Ginette Reno et « My Way » de Frank Sinatra – les deux chansons préférées du «Démon Blond» – les amateurs ont pu entendre la voix de Guy Lafleur indiquant qu’il a toujours voulu être le meilleur, qu’il a toujours joué avec fierté, avec passion, qu’il s’est demandé s’il rêvait ou que c’était bien la réalité lorsqu’il s’est retrouvé dans le vestiaire du Canadien avec toutes les plaques sur lesquelles étaient inscrites les noms des grands joueurs de l’organisation. Des plaques sur lesquelles son nom s’est bien sûr ajouté à ces deux autres grands qui l’ont précédé.

 

Lorsque Sinatra a poussé les dernières notes de « My Way » et que le numéro 10 est apparu à l’écran géant, les partisans ont pris la relève.

 

Et ils l’ont fait de brillante façon.

 

Pendant un peu plus de neuf minutes, les partisans ont ovationné Lafleur à tout rompre. En plus des applaudissements nourris, ses partisans ont scandé tantôt des Guy! Guy! Guy! puissants, tantôt des Olé! Olé! Olé! tout aussi puissants.

 

Debout à leur banc respectif, les joueurs des deux équipes regardaient l’écran géant et se laissaient porter par une ovation qui n’en finissait plus de finir. Carey Price du côté du Canadien et Nick Foligno dans le camp des Bruins applaudissaient au rythme imposé par les partisans. Les autres tapaient la glace de leur bâton.

 

Onze anciens ayant partagé le vestiaire du Canadien avec Guy Lafleur occupaient les deux premières rangées derrière le banc du Canadien. Lorsqu’ils apparaissaient à l’écran géant, les partisans ajoutaient une dose d’amour dans leur ovation pour qu’ils puissent la partager avec leur ancien coéquipier.

 

Guy Lafleur, bourreau des Bruins

Yvan Cournoyer, le doyen du groupe, peinait à refouler ses larmes.

 

Il faut dire que Cournoyer a vénéré Guy Lafleur qui s’ajoute à la liste de grands joueurs que le «Roadrunner» a vu quitter trop vite.

 

Après le grand Maurice Richard, après Jean Béliveau, son capitaine à qui il a rendu hommage lors des obsèques nationales qui lui avaient été consacrées, Cournoyer perd aujourd’hui un ami.

 

« Je perds un coéquipier. Un membre de ma famille », que Cournoyer m’a indiqué lors d’une mêlée de presse avant le match.

 

C’est lors d’un entraînement qu’Yvan Cournoyer a vu Guy Lafleur pour la première fois.

 

« Je l’ai regardé aller et je me suis dit : wow! J’avais déjà gagné cinq coupes Stanley et juste à le voir aller j’ai aussitôt réalisé que j’allais en gagner d’autres. Il m’a permis d’en soulever cinq de plus », a lancé fièrement Cournoyer qui compte dix conquêtes.

 

Yvan Cournoyer et Henri Richard ont pris Lafleur sous leur aile lorsqu’il est débarqué à Montréal avec le Canadien.

 

« Ce n’a pas toujours été facile pour lui lors des trois premières années. On a beaucoup parlé du casque qu’il portait et qu’il enlevait. Mais le vrai problème, c’est qu’on le faisait jouer au centre alors que Guy était un ailier. Une fois qu’il a été envoyé à l’aile droite, il a décollé », racontait Cournoyer.

 

Comment Guy Lafleur a-t-il pu se démarquer autant alors que le Canadien comptait autant de joueurs ayant déjà en poche une invitation au Temple de la renommée?

 

« Dans le vestiaire, Guy était fidèle à la tradition de l’époque. On parlait peu. On était tous égaux. Mais dès qu’il embarquait sur la patinoire, Guy devenait un autre. Il était dans une classe à part », a lancé Cournoyer alors qu’autour de lui d’autres anciens coéquipiers lançaient des éloges similaires en parlant de sa vitesse sur patin, de la force de son tir.

Adieu, Démon blond

 

Cournoyer, les autres anciens, les joueurs des deux équipes et les quelque 20 000 partisans ovationneraient encore Lafleur n’eut été de l’intervention de l’annonceur maison Michel Lacroix.

 

Des interventions de Michel Lacroix en fait.

 

Car lors de sa première tentative, les partisans n’ont fait qu’accentuer leur ovation au lieu de la laisser s’éteindre.

 

Même chose à la deuxième.

 

À sa troisième tentative, Michel Lacroix a eu le dessus en invitant les partisans à se recueillir un instant à l’honneur du disparu. Une invitation qui a été partiellement respectée alors que des amateurs tenaient à prolonger leur ovation en criant le nom de Lafleur ici et là.

 

La cérémonie s’est terminée sur des Guy! Guy! Guy! scandés après que Michel Lacroix et lancé en guise de conclusion et pour une dernière fois :  « Mesdames, messieurs; le numéro 10 : Guy Lafleur! »

 

Bergeron tenait à gagner

 

Pour que la soirée soit vraiment parfaite, les joueurs du CH et leurs partisans auraient bien sûr préféré une victoire.

 

Bien qu’elle ne soit pas venue, les partisans du Tricolore pourront se consoler à l’idée que Patrice Bergeron, avec les premier et dernier buts de la rencontre, a joué un rôle de premier plan dans la victoire des Bruins.

 

ContentId(3.1405560):Guy Lafleur : Patrice Bergeron motivé par la cérémonie (L'Antichambre)
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«Je comprends la déception des amateurs, mais à titre de Québécois, c’était important pour moi de sortir d’ici avec une victoire. J’avais cinq ans lorsque Guy Lafleur a disputé sa dernière saison dans la LNH avec les Nordiques à Québec. Bien que je ne l’ai pas vraiment vu jouer, je suis très conscient de son importance dans l’histoire du hockey. De ce qu’il représentait. Mes parents étaient ici ce soir. Et pour mon père, Guy Lafleur a été un joueur très important à l’époque où il défendait les couleurs des Remparts. L’hommage rendu était vraiment impressionnant. C’était une belle soirée et je suis bien content d’avoir gagné», a indiqué le capitaine des Bruins qui s’est approché à deux buts du plateau des 400 en carrière dans la LNH.

 

Bergeron tenait tellement à prendre part au match qu’il a balayé du revers de la main l’offre que lui a faite l’état-major de prendre congé dans le cadre d’un deuxième match en deux soirs.

 

Entraîneur-chef des Bruins, Bruce Cassidy a reconnu que les choses se sont corsées un peu plus qu’il ne l’aurait voulu en fin de rencontre.

 

Il a d’ailleurs esquissé un sourire lorsqu’on lui a demandé s’il a craint une pénalité pour avoir eu trop d’hommes sur la patinoire en fin de rencontre. Une situation qui avait ouvert la porte au but égalisateur de Guy Lafleur au printemps 1979 et à la victoire en prolongation du Canadien qui avait éliminé les Bruins dans le cadre du septième match de la demi-finale. Une victoire qui avait propulsé le Canadien vers une conquête de la coupe Stanley aux dépens des Rangers de New York.

 

«Ç’aurait été vraiment spécial», que Cassidy a reconnu d’emblée.

 

«Le pire, c’est que nous avons joué avec le feu en fin de rencontre alors que nous avons connu un changement de défenseurs. On aurait peut-être pu se faire prendre. Mais bon. On a écopé quelques pénalités d’indiscipline. On a aussi envoyé une rondelle dans les gradins – ce qui a ouvert la porte au but de Mike Hoffman, le deuxième du Canadien – alors on a eu notre part d’ennuis avec les pénalités. C’était un très bon match de hockey. Il y avait beaucoup d’intensité. La rivalité Bruins-Canadien était palpable. Les deux clubs jouaient avec émotions pour des raisons évidentes.»

 

Si les fantômes du Forum ne sont pas venus hanter les Bruins en fin de rencontre, on a senti leur présence plus tôt dans le match lorsque Erik Haula a amorcé sa descente sur un tir de pénalité en oubliant la rondelle au centre de la patinoire.

 

«Je ne sais pas ce qui s’est passé. Je suis simplement passé dans le vide, a candidement admis le Finlandais.

 

«Je ne savais pas vraiment quoi faire. Il y avait tellement de bruit que je n’ai jamais pu savoir si les arbitres avaient sifflé ou non. Je suis donc revenu saisir la rondelle et amorcé ma descente sans me poser de question. Je suis très heureux d’avoir finalement marqué. Ça me permettra peut-être de ne plus en entendre parler…»

 

C’était beau. C’était magique. C’était parfait!

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