C’est un Eric Lindros généreux et reconnaissant qui s’est confié au panel de L’Antichambre lors d’un entretien accordé dans le cadre de la présentation par RDS du documentaire Lindros revisité.

L’ancien no 88 des Flyers de Philadelphie, des Rangers de New York, des Maple Leafs de Toronto et des Stars de Dallas admet retirer une part de satisfaction dans le fait d’avoir pu jeter la lumière de façon plus claire sur le fameux incident survenu en 1991, lorsqu’il a refusé de rejoindre les Nordiques de Québec, qui en avaient fait le premier choix à l’encan amateur.

Eric Lindros et son épouse Kina LamarcheDans une des transactions les plus marquantes de l’histoire de la LNH, Lindros avait été échangé un an plus tard aux Flyers dans un pacte incluant Peter Forsberg, Steve Duchesne, Mike Ricci, Ron Hextall, Kerry Huffman, un choix de premier tour et une somme de 15 millions $.

« C’est un sujet délicat, confie-t-il d’entrée de jeu. Encore aujourd’hui, je ne raffole pas d’en parler. Mais je peux vous assurer que ça n’avait aucun lien avec la culture (du Québec) ou la langue qu’on y parle. Mon épouse vient d’ici. Si j’avais été échangé au Canadien de Montréal, en l’espace de quelques secondes j’aurais été à bord de ma voiture à traverser l’autoroute 40. »

Même s’il ressent lui-même un poids en moins sur ses épaules avec la télédiffusion de ce documentaire, le nouveau membre du Temple de la renommée du hockey insiste que c’est pour ses parents qu’il ressent le plus grand soulagement.

« Je crois que ce documentaire est une bonne chose pour eux. Ils ont souffert beaucoup durant cet épisode. Lorsqu’ils l’ont vu, les moments difficiles qu’ils ont vécu et l’injustice de toute cette situation leur sont revenus. Mais ils étaient reconnaissants », soutient-il.

Son épouse, la Québécoise Kina Lamarche, avec qui il a fondé une famille – ils sont parents de trois enfants en bas âge – l’a aidé à reconnaître la nécessité d’éclairer la lanterne de nombreuses personnes qui persistent encore à ce jour à lui en vouloir d’avoir levé le nez sur les défunts Nordiques.

« Kina m’a encouragé à accepter le projet. Elle m’a fait comprendre qu’il était temps que je m’ouvre plus amplement à ce sujet, de le faire pour ensuite passer à autre chose. Elle connaît la vérité, et plusieurs gens aussi, mais ne serait-ce que pour mes parents, il fallait que je le fasse. »

Des coéquipiers en or

Les témoignages d’une douzaine d’anciens coéquipiers et dirigeants ont touché l’ancien attaquant de puissance. En tout, pas moins de 22 intervenants des univers sportif et journalistique se sont prêtés à l’exercice.

Eric Lindros« Il y a plusieurs de mes anciens coéquipiers qui m’ont beaucoup touché par leurs propos dans le documentaire. Je pense à John LeClair, Mikael Renberg et Éric Desjardins entre autres. C’est la preuve que je me suis fait de bons amis durant ma carrière de joueur! »

Parmi les intervenants, on retrouve la légende du Canadien Guy Lafleur. Ce dernier, qui venait se terminer sa carrière à Québec au moment où les Nordiques ont sélectionné Lindros, s’est montré élogieux à l’endroit du colosse joueur de centre.

« J’ai toujours eu une opinion favorable de Guy Lafleur, mais je suis encore plus flatté de constater qu’il a pris autant de temps pour participer au documentaire. Marcel Aubut avait embauché Guy afin qu’il soit présent durant les pourparlers. Il avait été franc avec moi. Il est un grand homme et aussi une légende du hockey. Je me souviens de m’être retrouvé dans la même pièce que lui et de m’être dit : "Wow, c’est Guy Lafleur!" »

Enrayer les bagarres : pas si simple

Même si l’aspect téméraire de son jeu a nui à sa longévité dans le hockey professionnel, Lindros croit que la robustesse a sa place dans son sport et que les bagarres ne doivent pas nécessairement être enrayées.  

« Abolir les bagarres pour de bon est une proposition délicate. Il y avait une culture propre au hockey et il semble qu’elle est de plus en plus contournée de nos jours. Lorsqu’un joueur distribue une mise en échec légitime et légale, il est immédiatement pris en chasse et doit jeter les gants. Avec de l’arbitrage efficace, on peut changer la culture qui s’est installée », analyse l’homme de 43 ans.

Même s’il trouve regrettable la controverse dans laquelle sa famille et lui ont été entraînés au tournant des années 90, Eric Lindros persiste et signe : la décision qu’il a prise à l’époque s’imposait étant donné les circonstances.

« Ça aurait été une situation vouée à l’échec si je m’étais joint à l’organisation des Nordiques. Aujourd’hui, je vis bien avec les conséquences qu’aura eues ce choix. Je pense que le raisonnement ayant mené à cette décision est plus évident que jamais maintenant. Ça aura pris une équipe de tournage et de production pour y arriver, mais c’est mon histoire! »