MONTRÉAL - La dernière fois que le Canadien a affronté les Coyotes de l’Arizona, en janvier, ni l’une ni l’autre de ces équipes n’était prise au sérieux. Le CH était dans un état de décomposition avancée avec 12 revers à ses 13 derniers matchs, son adversaire avait trois fois plus de défaites que de victoires à sa fiche. La confrontation n’était rien d’autre qu’un prétexte pour parler de la lutte pour l’obtention du premier choix au prochain repêchage.

Ce sujet est encore bien d'actualité deux mois plus tard, mais les choses ont pris une tournure encourageante pour les deux organisations. Le Canadien a signé huit victoire à ses onze dernières parties. Les Coyotes sont tout aussi méconnaissables avec cinq gains en six tentatives depuis le début du mois de mars.

À Montréal, inutile de chercher midi à quatorze heures. Il est facile d’associer cette résurrection à l’arrivée de Martin St-Louis derrière le banc. Chez les Coyotes, l’historique de la métamorphose est un peu plus complexe.

« C’est vrai qu’on a plus de résultats récemment, mais ça fait longtemps qu’on joue mieux. Je ne pense pas que c’est quelque chose qui est arrivé comme ça », plaide l’entraîneur-chef André Tourigny en claquant des doigts.

De retour dans la Ligue nationale après un intermède de cinq ans au niveau junior majeur, l’Ours de Nicolet a perdu ses onze premiers matchs derrière le banc des Coyotes. Il a fallu que ses hommes rencontrent le pauvre Kraken de Seattle, une équipe d’expansion, pour célébrer une première fois.

« Je te dirais que ça a été là le déclic, identifie Tourigny. À partir de là, on a été 1% meilleurs à tous les jours. »

Arrivés à Noël avec seulement six victoires, les Coyotes ont depuis cumulé un dossier de 13-15-2. Depuis leur victoire au Colorado le 1er février, ils revendiquent neuf succès contre sept échecs. Et si on rétrécit encore un peu l’échantillon, ils sont carrément en feu. Cinq victoires à leurs six derniers matchs avec un total de 32 buts marqués.  

Nick Schmaltz se donne des airs de Teemu Selanne avec 16 points dans ses six derniers matchs. Clayton Keller n’a été blanchi de la feuille de pointage que trois fois depuis 25 matchs.

« Les clubs qu’on affronte, ils se battent pour les séries, il y a une urgence dans leur jeu. Quand on est revenus du match des étoiles, on l’a constaté. Nos adversaires étaient animés d’un sentiment d’urgence qu’on n’avait pas et c’est quelque chose qu’on a fait comprendre aux joueurs. Présentement, on se bat avec beaucoup d’acharnement et les gars ont du fun. Probablement un peu comme ce que vit le Canadien. »

« Une culture, ça se cultive »

Les Coyotes ne sont quand même pas sortis du bois. La purge amorcée l’été dernier avec les départs de Darcy Kuemper, Conor Carland, Christian Dvorak et Oliver Ekman-Larsson, notamment, risque de connaitre sa suite dans les prochains jours. Le jeune défenseur Jakob Chychrun est au centre de moult rumeurs de transactions. Le vétéran Phil Kessel pourrait aussi être sur son départ.

Et on a beau dire que le sujet n’est pas une source de préoccupation au quotidien, reste que l’équipe continue de patiner sur une glace mince avec son déménagement attendu dans les installations de l’Université Arizona State et son aréna de 5000 places.

Mais ça serait bien mal connaître Tourigny que de penser que ces scénarios hypothétiques lui feront faire de l’insomnie. L’ancien visage des Huskies de Rouyn-Noranda et des 67’s d’Ottawa est parti dans le désert avec une optique à long terme.

« Une culture, ça se cultive, dit-il. Ce n’est pas quelque chose que tu bâtis après un an et tu dis ‘Ok, on a une culture’. C’est pas mal plus compliqué que ça. Ça se bâtit pendant 7 à 10 ans. Ça peut aller un peu plus vite, mais il ne faut pas que tu penses que tu vas ajouter deux joueurs et que tout va mieux aller. C’est une façon de faire les choses, de se comporter, de travailler, de penser, c’est une fierté d’organisation. Pour moi, c’est important qu’on ne prenne rien pour acquis. Ça va bien, on fait de bonnes choses, les gars sont contents. C’est le fun ce qui se passe. Mais demain, c’est une autre histoire. »

Les partisans du Canadien, principalement ceux qui n’ont jamais fait de la nuance leur marque de commerce, gagneraient à prêter l’oreille aux propos de Tourigny, qui a compris que le succès ne garantit pas le succès et qu’à l’opposé, un creux de vague ne devrait pas être traité comme la tombée imminente de l’apocalypse.  

« Ce n’est pas linéaire. Le monde dit que c’est tough, ce qu’on vit. Non, ce n’est pas tough. On sait exactement ce qu’on est, on sait exactement ce qu’on a à faire, on travaille à tous les jours et on a une attitude extraordinaire. Ce qui va être tough, c’est quand on va avoir une année où [nos résultats vont chuter]. »

« Il n’y en a pas d’organisations qui rebâtissent et ça s’en va juste de même, poursuit Tourigny en pointant vers le haut et en supportant son argument en donnant l’exemple du Lightning de Tampa Bay. Ça n’arrivera pas de même. Ça va arriver que ça ne marchera pas comme on l’avait prévu, on va faire des erreurs. On est des gens qui gère des gens. Ce n’est pas des machines. Des erreurs ça va arriver, des mauvaises saisons ça va arriver. C’est là que ça va être important qu’on soit fort comme organisation et qu’on garde le cap. »