MONTRÉAL - Mike Bossy était aussi simple, aimable et discret qu’il était un redoutable marqueur de buts.

 

Considérant qu’il devance tous les grands de l’histoire de la LNH avec sa moyenne de ,762 but enfilé par match disputé et qu’il soit considéré par plusieurs comme l’un, sinon le, meilleur franc-tireur de l’histoire, il n’est donc pas surprenant de voir défiler les éloges en marge de son décès.

 

Un décès qui l’a emporté bien trop vite à 65 ans. Un décès trop hâtif. À l’image de sa retraite que des maux de dos l’ont contraint à annoncer après seulement dix saisons.

 

La gentillesse de Bossy n’avait d’égale que son talent. Toujours affable, réfléchi, il aimait parler de hockey. Il aimait surtout parler à ceux et celles qui s’intéressaient à lui et au sport qu’il a dominé. Même lorsqu’il était victime de moqueries, Bossy savait maintenir la gentillesse qui l’a toujours caractérisé. Un des premiers joueurs à troquer la rondelle pour le micro, Bossy a toujours su éviter les moqueries et surtout su tirer profit des critiques pour poursuivre une après-carrière qui lui a permis de partager sa passion pour le hockey et le sport en général.

 

Si seulement il avait été en mesure d’éviter avec autant de facilité les doubles-échecs à répétition qu’il a encaissés au dos au cours de sa carrière, il aurait moussé les statistiques déjà impressionnantes associées à son nom.

 

En dépit du fait que sa carrière ait été écourtée, Mike Bossy est l’un des géants de la LNH. Au même titre que Maurice Richard, Wayne Gretzky, Mario Lemieux ou Bobby Orr qui a lui aussi dû tirer sa révérence trop vite en raison de genoux trop mal en point.

 

Un géant qui s’est toujours tenu dans l’ombre des autres géants :

 

Maurice Richard a donné son nom au trophée qui récompense, depuis 1999, le meilleur franc-tireur de la LNH. Teemu Selanne a été le premier à inscrire son nom sur le trophée. Le nom d’Alexander Ovechkin y est inscrit neuf fois et Auston Matthews pourrait bien le soulever pour une deuxième fois consécutive à la fin de la saison.

 

Wayne Gretzky a marqué plus de buts et récolté plus de points qu’il est aujourd’hui possible de rêver d’en amasser. Alex Ovechkin pourrait bien égaler et battre son record de 894 buts. Mais son record de 2857 points ne sera jamais menacé. Jamais!

 

Et Mario? Mario Lemieux est le plus grand de tous.

 

Quand on pense aux exploits multipliés par Mike Bossy, on pourrait trouver injuste le fait qu’il soit dans l’ombre des autres grands qui ont marqué l’histoire du hockey.

 

Après tout, il partage le premier rang avec Wayne Gretzky qui comptent tous deux neuf saisons de 50 buts. De ces neuf saisons, Bossy en a connu cinq de 60 buts et plus.

 

Ses 39 tours du chapeau le placent au troisième rang dans l’histoire derrière la Merveille (50) et le Magnifique (40).

 

Ses 573 buts le placent au 22e rang dans l’histoire. Une 22e place qu’il aurait bien sûr améliorée si les maux de dos n’avaient pas eu raison de son immense talent.

 

Mais cette 22e place lui va très bien considérant que c’est le numéro qu’il portait avec les Islanders; le numéro qu’ils ont immortalisé en retirant le chandail de celui qui a grandement aidé cette équipe à soulever quatre coupes Stanley consécutives au début des années 1980.

 

Cette 22e place restera associée à Mike Bossy à moins que Sidney Crosby, Auston Matthews, Leon Draisaitl n’arrivent à le rejoindre d’abord, à le dépasser ensuite.

 

Plus encore, il a toujours su poursuivre son rythme une fois en séries éliminatoires. De premier qu’il est dans l’histoire avec sa moyenne de ,762 but marqué par match disputé, Bossy a glissé au deuxième rang avec une moyenne de ,659 but marqué par matchs éliminatoires disputés. Considérant qu’il n’est devancé que par Mario Lemieux – moyenne de ,710 but marqué par match disputé en séries – il n’y a pas de quoi rougir.

 

Et dire que le Canadien lui a préféré Mark Napier avec sa 10e sélection au repêchage de 1977.

 

Mais il y a pire, il y a les Maple Leafs de Toronto (John Anderson et Trevor Johansen avec les 11e et 12e sélections) et les Rangers de New York (Lucien Deblois et Ron Dugay avec les 8e et 14e sélections) qui ont levé le nez deux fois plutôt qu’une sur Bossy.

 

Un affront que le Québécois a fait chèrement payer aux deux clubs, surtout aux Blue Shirts, voisins et grands rivaux que sont depuis toujours des Islanders, au cours de son illustre carrière.

 

Mike Bossy, talentueux et très respecté

Malgré toutes ces statistiques plus éloquentes les unes que les autres, malgré son chandail qui flottait au-dessus de la patinoire du Nassau Coliseum, de Barclay Center et flotte aujourd’hui au UBS Arena, le nouveau domicile des Islanders, malgré sa place bien en vue au Temple de la renommée, Bossy n’a jamais reçu, du moins c’est mon impression, l’attention qu’il méritait.

 

Mais quand on voit défiler les commentaires de ceux qui ont partagé la patinoire avec lui, quand on entend les entrevues qu’il accordait alors qu’il était au faîte de sa carrière, on se rend compte que cette place dans l’ombre des autres grands met davantage en évidence l’humilité de cet homme qui aurait pourtant facilement pu réclamer que tous les projecteurs soient braqués sur lui.

 

La LNH perd aujourd’hui un de ses géants.

 

Le Québec perd aujourd’hui l’un de ses plus grands joueurs.

 

Mais la plus grosse perte, c’est la famille de Mike Bossy qui l’encaisse : car elle perd un homme qui était bien plus grand encore que le joueur de hockey qui l’a rendu célèbre.

 

Sincères sympathies à son épouse, leurs enfants et tous les proches de Michael Bossy.