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Nathan Chen, triple champion du monde en titre et en position idéale pour se parer d'or olympique aux Jeux de Pékin jeudi, est le patineur à l'origine de la surenchère des quadruples sauts observée ces dernières années.

Il faut bien savoir chuter pour ensuite mieux s'envoler. À Pyeongchang (Corée du Sud) en 2018, celui qui, à 18 ans, était la nouvelle pépite du patinage américain avait craqué sous la pression, plombé par une 17e place du programme court.

« J'ai fait toutes les erreurs qu'il était possible de faire », lâchait-il alors.

Tout espoir de médaille perdu, c'est totalement libéré que Chen avait abordé le libre pour entrer à sa façon dans l'histoire olympique, en devenant le premier homme à réussir cinq quadruples sauts aux Jeux, ce qui lui avait permis de remonter au cinquième rang au classement final.

« Cette saison-là était vraiment stressante. J'étais focalisé sur l'objectif de médaille. Je me disais que, si je passais quatre heures de plus sur la patinoire - quel que soit le temps déjà passé à m'entraîner -, j'y arriverais. Mais j'ai fini par m'épuiser, expliquait-il l'année dernière à la chaîne olympique. J'ai alors compris l'importance de trouver un bon équilibre entre tout donner sur la glace et se donner du temps pour soi. »

C'est ce qui l'a conduit d'un bout à l'autre de son pays, de la côte Ouest à la côte Est, sur les bancs de la prestigieuse université de Yale à la rentrée 2018. Loin de la patinoire californienne de Lakewood, où il s'entraînait - et s'entraîne de nouveau - auprès de Rafael Arutiunian, et de Salt Lake City, où il est né le 5 mai 1999.

« Quad King »

Des études mises entre parenthèses pour se concentrer sur l'échéance olympique mais que Chen prévoit de reprendre à la rentrée prochaine.

C'est à 3 ans, alors que la ville principale de l'Utah accueille les JO-2002, que le petit Nathan, benjamin d'une fratrie de cinq nés de parents chinois venus vivre aux États-Unis à l'âge de 20 ans, chausse ses premiers patins.

« Je me souviens d'avoir regardé le patinage artistique à la télévision, d'être allé à la patinoire et d'avoir fait semblant de participer aux Jeux olympiques », raconte-t-il.

Poussé par sa mère - « qui passait son temps libre à me regarder patiner » -, Chen devient à 10 ans le plus jeune champion novice (catégorie des -13 ans) des États-Unis. Deux ans plus tard, il rencontre Arutiunian, qui va façonner le futur "quad king" (roi du quadruple).

Champion des États-Unis juniors en 2012 et 2014, il échoue à en faire autant en seniors en 2016. Mais il réussit ce qu'aucun patineur n'était parvenu à faire auparavant : quatre quadruples sauts dans un programme. Sa troisième place relance alors le débat sur l'équilibre entre performance athétique et qualité artistique.

D'autant que quelques heures plus tard, lors du gala, sur un saut justement, il subit sa plus grave blessure, à une hanche, qui l'éloigne de la glace durant six mois.

Fin d'invincibilité

Pas de quoi couper les ailes de Chen. Un an plus tard, il devient le premier patineur à réaliser cinq « quads » dans un programme.

« J'ai un corps bâti pour le saut », assure celui qui axe son travail hors glace sur la force et la puissance, quand la pliométrie (détente et explosivité) est généralement privilégiée par les patineurs.

En 2018, un mois après l'échec à Pyeongchang, il surmonte la déception et devient champion du monde pour la première fois, en tentant de nouveau six « quads » (un retourné).

Deux autres sacres mondiaux suivront en 2019 et 2021 pour Chen, qui restera invaincu toutes compétitions confondues jusqu'en octobre 2021 et une troisième place en forme d'accident au Skate America, premier Grand Prix de cet hiver olympique.

Une olympiade au sommet émaillée d'une polémique, quand il a exprimé son agacement s'agissant des stéréotypes liés au fait d'être un patineur hétéro dans un « sport dominé par les homosexuels ». Des propos pour lesquels Chen, à l'image habituellement lisse et si peu expansif, s'est excusé.

À l'université, où il s'est spécialisé dans les statistiques et sciences des données, certains cours lui ont donné des idées pour la glace. Il a ainsi découvert des morceaux du compositeur Philip Glass, qu'il a empruntés pour sa saison pré-olympique.