Erik Guay : le cœur n’y était plus
Ski alpin jeudi, 22 nov. 2018. 16:59 jeudi, 12 déc. 2024. 03:03Quand il a annoncé qu’il continuait pour une ultime saison, Erik Guay a tout de même précisé que lorsque le cœur n’y serait plus, il passerait à autre chose. Le voici donc, à l’aube de la première Coupe du monde de vitesse à Lake Louise, mettre officiellement fin à une carrière internationale de plus de 20 ans durant laquelle il est devenu le Canadien le plus décoré en ski alpin.
Déjà en entrevue avec Sportcom plus tôt cet automne, le skieur de 37 ans donnait plus d’importance à sa santé qu’aux performances. Il savait qu’il n’était pas au niveau qu’il aurait voulu à ce moment de l’année et qu’il ne pourrait espérer viser les podiums cette saison. Ne souhaitant pas hypothéquer sa vie future, il s’était donné ce mot d’ordre cette année : au-delà des médailles et des titres, il prioriserait sa santé pour une fois.
Il y a une semaine, durant un entraînement à Nakiska, en Alberta, son coéquipier Broderick Thompson s’est blessé à un genou, mettant abruptement fin à sa saison. Erik Guay allait s’élancer derrière lui quand l’accident est survenu et il a été fortement ébranlé par l’événement.
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L’évacuation de son coéquipier Manuel Osborne-Paradis en hélicoptère mercredi à la suite d’une double fracture à une jambe a été l’incident de trop. Quand son tour est venu, pour la première fois, Erik Guay n’avait aucune envie de s’élancer dans le portillon de départ.
« Ça faisait plusieurs semaines que j’y pensais, mais avec les circonstances, plusieurs choses ont influencé ma décision. Les blessures des dernières semaines m’ont poussé vers ça. Au début, je pensais pouvoir faire la saison au complet et terminer sur une bonne note, mais dans la réalité, ce n’est pas toujours pareil. C’était aussi devenu vraiment difficile d’être loin de la maison », a-t-il admis.
Au repos forcé l’hiver dernier en raison d’une blessure au dos, Guay a raté les Jeux olympiques de PyeongChang et du même coup sa dernière chance de monter sur le podium olympique. Il a eu beaucoup de temps pour réfléchir à son avenir avec sa famille et aux risques qu’il prenait en dévalant les pentes à plus de 125 km/h.
« J’y ai pensé longuement. J’ai quatre jeunes filles et je veux rester actif avec elles. Je veux faire des sports après ma retraite du ski. Je veux pouvoir bouger. Plus je vieillis, plus j’ai ça en tête. Avec une jeune famille, ça change la donne », a-t-il dit.
Bien que le scénario ne devait pas s’écrire ainsi, le hasard a drôlement fait les choses. C’était justement à Lake Louise, en 2003, que le double champion du monde avait décroché sa toute première médaille du grand cirque blanc. Alors âgé de seulement 22 ans, il était monté sur la deuxième marche du podium en descente.
Erik Guay retournera à la maison à temps pour vivre la période des Fêtes avec ses quatre filles et sa femme, chose qu’il n’a pas pu faire souvent durant ses années de compétition.
Professionnellement, il ne sait pas ce que l’avenir lui réserve. Il préférait attendre de quitter la compétition avant d’y penser plus sérieusement.
« C’est sûr que je vais rester investi dans le ski, mais probablement plus au niveau local. Je n’ai pas trop envie de voyager comme entraîneur », a-t-il affirmé.
L’hiver dernier, il a pu être au bord des pistes du Mont Tremblant pour encourager son aînée qui a commencé le ski de compétition.
« C’est trippant! Tant qu’elle aime ça, j’y serai pour l’encourager », s’est-il exclamé.
Et la relève?
Blessé au dos et forcé de faire une croix sur les Jeux olympiques de Pyeongchang, Erik Guay a passé l’hiver dernier à la maison. Quand il a eu le feu vert pour enfiler ses skis, il a fait quelques virages sur les montagnes québécoises. Il a notamment passé quelques jours avec les équipes provinciales à l’entraînement au Mont-Édouard. Qu’en est-il de la relève du ski alpin au Québec, selon lui?
« C’est sûr qu’il faudra attendre quelques générations avant que mes filles embarquent sur le circuit de la Coupe du monde », a-t-il lancé en riant.
Blague à part, le vétéran a vu du potentiel chez les jeunes qu’il a côtoyés.
« Je pense que nous avons de bons jeunes skieurs qui s’en viennent tranquillement. Il y aura peut-être un petit creux de quelques années en vitesse, mais il y a du talent derrière pour le remplir. »
Depuis 2012, Erik Guay et Dustin Cook étaient les deux seuls représentants masculins de la belle province à participer aux épreuves de vitesse du circuit de la Coupe du monde.
Un jeune Québécois vient cependant de se joindre à l’équipe masculine technique. Simon Fournier, 21 ans, a participé à sa première épreuve de Coupe du monde la fin de semaine dernière, en Finlande.
La carrière d’Erik Guay en chiffres :
- 2 titres de champion du monde (super-G en 2017 et descente en 2011)
- 1 titre de vice-champion du monde (descente en 2017)
- 1 globe de cristal (super-G, saison 2009-2010)
- 25 podiums en Coupe du monde
- 3 participations aux Jeux olympiques (Sotchi 2014, Vancouver 2010 et Turin 2006)