EKATERINBOURG, Russie - Le Pérou cherche son sauveur : au bord de l'élimination au Mondial 2018 avant d'affronter la France jeudi, les Incas s'en remettent à leur « Prédateur » Paolo Guerrero, idole d'un peuple déjà ressucité d'une suspension pour dopage juste avant le tournoi et qui doit désormais raviver le rêve de sa sélection en Russie.

Contre le Danemark samedi, le talisman inca aux 35 buts en 90 sélections n'a joué qu'une demi-heure, laissé sur le banc au coup d'envoi par son sélectionneur Ricardo Gareca qui a surpris en préférant faire jouer Jefferson Farfan, l'autre atout offensif péruvien, seul en pointe.

« On a estimé qu'il était préférable de débuter comme ça parce que Guerrero manque de rythme et qu'il est arrivé le dernier au rassemblement. Mais il est bien entré dans le match », a justifié le technicien argentin.

Sur son temps de jeu, Paolo le « Guerrier » a tout tenté, sans parvenir à marquer ce but qui aurait permis au Pérou d'égaliser contre les Danois (1-0).

« Il faut toujours respecter les décisions du sélectionneur et quand il fera appel à moi, je serai prêt. Il reste deux matchs », a-t-il prévenu après la rencontre.

« Ceviche Guerrero »

Pour l'attaquant de 34 ans, la situation sportive des Incas paraît loin d'être insurmontable, en comparaison avec ce que le joueur de Flamengo a vécu ces derniers mois hors des terrains.

Suspendu 14 mois pour un contrôle positif à un métabolite de la cocaïne, il avait vu son rêve de participation à une Coupe du monde brisé, jusqu'à ce qu'une décision du tribunal fédéral suisse le 31 mai ne casse provisoirement cette sanction, libérant tout le peuple péruvien qui pourra compter sur son héros pour la première participation du Pérou à un Mondial depuis 36 ans.

Ce retentissant revirement de situation à deux semaines du Mondial avait embrasé le pays, le président Martin Vizcarra allant même jusqu'à parler d'un « triomphe du Pérou ». « Le rêve de mon fils va se réaliser », avait jubilé la mère du « Prédateur ».

À Lima, la ferveur fut telle que la gastronomie péruvienne a dédié à son sauveur une marinade de poissons traditionnelle. Servi sur une plaque de la forme des bateaux typiques de Chorrillos, quartier d'origine du « Prédateur », le « Ceviche Guerrero » sera « le plat phare des "Cevicherias" péruviennes » pendant le Mondial, comme l'assène à l'AFP Javier Vargas, président de l'association des restaurants de fruits de mer.

Force offensive

Quelle destinée pour ce jeune homme d'un quartier côtier de Lima, issu d'une famille où l'on pratique le football comme une religion!

« C'est pour ça que j'ai pris un ballon pour la première fois à l'âge d'un an, expliquait-il dans une interview en 2015. Quand j'avais six ans, j'ai rejoint une équipe et à partir de là, je pensais déjà que j'allais devenir un grand joueur et je n'ai jamais douté. »

Près de 30 ans plus tard, le meilleur buteur de l'histoire des Incas porte les espoirs de tout un peuple qui reste sur l'exploit du Mondial 1970 où sa sélection n'avait été battue qu'en quarts par le Brésil.

« La présence de Guerrero va apporter de la variété à l'attaque. Cela nous donne de vraies chances de passer la prochaine étape à la Coupe du monde », prophétisait d'ailleurs l'ancien sélectionneur Percy Rojas à l'AFP avant le Mondial. « Avec Guerrero et Farfan, nous sommes assez armés devant car ce sont deux joueurs de calibre international. Avec eux, on dispose d'une force offensive que d'autres sélections n'ont pas. »

Les situations désespérées, Guerrero connaît. Lors de son dernier match avant sa suspension en octobre, c'est lui qui a envoyé le Pérou en barrages contre la Nouvelle-Zélande grâce à une égalisation arrachée sur coup franc contre la Colombie dans les dernières minutes. Contre la France, il faudra au moins cela.