Alors que l’été bat son plein, que les chauds rayons du soleil nous dorent la couenne et que la COVID-19 semble vouloir s’estomper, il y a des choses difficiles à oublier quand on travaille dans le monde de la boxe. 

Pour moi, au cours des années, j’ai compris que le mois de juillet était sombre dans ma mémoire. 

Par exemple; ce lundi, cela fera 12 ans qu'Arturo Gatti est décédé, à Porto de Galinhas, au Brésil. 

Comment oublier les prouesses de Thunder, Italien d’origine, Québécois d’adolescence et Américain d’adoption. 

Prêt à se joindre à l’équipe olympique canadienne après avoir participé au championnat mondial junior de 1991, il a fait demi-tour et est allé rejoindre son frère Joe, lui aussi boxeur, au New Jersey. 

On l’a connu à la Télé 

C’est à la télévision que les Québécois ont le plus connu Arturo, (40-9-0—31/K.-O.) car il n’a livré qu’un match à Montréal. 

C’était le 8 septembre 2000, au Centre Molson, que Thunder s’est battu et a vaincu par décision en dix rounds un certain Joe Hutchinson (18-0-2) invaincu jusque-là. 

Deux fois, il a été couronné champion mondial chez les super plumes de l’IBF, en 1995 et chez les super légers de la WBC, en 2004. 

Comment ne pas revoir sa trilogie avec son bon ami Mickey Ward?

Gatti est un homme qui a rendu l’âme de façon tragique après avoir vécu à cent milles à l’heure pendant une bonne partie de sa vie. 

Le plus spectaculaire 

Peut-être Gatti n’a pas été le meilleur boxeur canadien de tous les temps, mais il a certes été le plus spectaculaire. Tellement qu’un vestiaire porte son nom dans le Boardwalk Hall d’Atlantic City, où il a livré ses neuf derniers combats. 

C’est sur ce bord de mer du New Jersey, à l’intérieur de son aréna préféré qu’il a mis fin à sa carrière, après avoir été mis K.-O./7 par Alfonso Gomez, le 14 juillet 2007.

Disons qu’il était la coqueluche d’Atlantic City. Il a boxé au Harrah’s Marina Hotel et Casino, au Merv Griffin Resorts, au Sands, au Convention Hall, au Cesar’s Palace et au Bally’s. Chaque fois en fin de carrière, le théâtre des hôtels où se déroulaient les combats était rempli à craquer. 

Gatti n’a jamais reculé devant personne. Il a vaincu quatre boxeurs qui n’avaient jamais connu la défaite avant de l’affronter. Ce sont Joe Hutchinson, Gianluca Branco, Leonard Dorin et Thomas Damgaard. 

Quatre de ses combats ont été choisis le match de l’année par la revue Ring Magazine. 

Ces victoires ont eu lieu en 1997 contre Gabriel Ruelas. Ce match lui a aussi valu le K.-O. de l’année. 

En 1998, il a vaincu Ivan Robinson pour le combat de l’année. Ce fut aussi la surprise de l’année. 

En 2002, son premier match contre Mickey Ward fut choisi non seulement le combat de l’année par la revue Ring, mais aussi par l’Association des chroniqueurs de boxe d’Amérique. 

En 2002, Gatti a fait un retour sur le tapis de l’arène et la revue Ring lui a accordé le titre de retour de l’année. 

Finalement, en 2003, le troisième match contre Mickey Ward fut à nouveau choisi le combat de l’année par Ring. 

Sa mort 

Sa mort, au Brésil, pendant son deuxième voyage de noces en 2009, a laissé un goût amer dans la bouche de plusieurs. Au début, on a cru à un meurtre, mais par la suite, la justice brésilienne et une autopsie tenue à Montréal ont montré que Thunder était mort par ses propres moyens. 

Que son âme repose en paix 

Il y a 41 ans 

Heureusement pour la boxe locale, notre dernière mortalité sur le ring remonte au 7 juillet 1980 alors que Cleveland Denny rendait l’âme à la suite de son revers par mise hors de combat aux mains de Gaétan Hart (57-30-4—25/K.-O.).

Aucun boxeur n’a perdu la vie à la suite d’un match de boxe au Québec depuis ce jour fatidique. 

Il y a eu un blessé grave et c’est Adonis Stevenson, passé K.-O. par Oleksandr Gvozdyk, le 1er décembre 2018 lors de la dixième défense de son titre WBC des mi-lourds, au Centre Videotron, de Québec. 

Heureusement, dans son cas, il a pu se réhabiliter après avoir subi une trépanation du cerveau à l’issue du combat. 

Précédemment, en 1980, Ralph Racine (28-9-1—16/K.-O.), un jeune et prometteur boxeur de Niagara Falls, avait quitté l’arène du Centre Paul-Sauvé sur une civière, des suites de sa défaite aux mains de Gaétan Hart, pourtant, un boxeur dont la force de frappe n’était pas perçue comme son point fort. 

C’est l’arbitre Guy Jutras qui avait mis aux hostilités au douzième round du match de championnat pour le titre canadien des légers.  

Heureusement, on a pu enlever la pression sur le cerveau de Racine à l’hôpital et, un peu comme Adonis Stevenson, lui aussi a pu continuer à connaitre une vie plus ou moins normale après réhabilitation 

C’est Claude Noël qui devait affronter Hart 

Ce n’est même pas Denny qui devait se mesurer à Hart ce 20 juin 1980. Le promoteur Bob Arum voulait plutôt que combat entre Gaétan Hart et Claude Noël, mais la Commission athlétique du temps exigeait le plus de boxeurs québécois possibles. Or, Denny, dont la seule défaite avait été une décision partagée contre Gaétan Hart, en avril 1978, fut le choix local en sous carte de l’affrontement entre Roberto Duran et Sugar Ray Leonard. 

Tout cela pour 18 000 $ 

Denny n’avait pas boxé depuis treize mois quand il a fait son entrée sur le ring du Stade olympique où s’entassaient 46 000 personnes sous une pluie fine. Mais il lui fallait bien faire vivre son épouse et son fils alors âgé de six mois. Il avait quitté le Canada pour aller vivre pendant deux ans en Californie où il avait livré deux combats à Los Angeles, mais les fins de mois venaient vite. 

Malgré cette absence du ring, il s’est tout de même assez bien comporté et rendu au dixième assaut, la décision pouvait aller d’un côté comme de l’autre, selon son entraineur du temps, Dave Campanile.  

Personnellement, j’avais Hart en avance par un point après neuf rounds. 

La dernière minute 

Jusqu’au dixième assaut, tout semblait bien normal chez Denny. Mais dans la dernière minute, Hart a augmenté le tempo. Il a coincé Denny dans le coin et y est allé d’une mitraille qui a duré environ vingt secondes. 

Bob Arum criait à l’arbitre de mettre fin au combat. Murray Sleep, alors président de la Fédération canadienne de boxe professionnelle exigeait l’arrêt des hostilités. Même Andy Nadon, le gérant de Gaétan Hart a admis que le match aurait dû être arrêté plus tôt, mais pas vingt secondes avant. 

Naturellement, l’arbitre Rosario Baillargeon fut pointé du doigt pour ne pas avoir réagi plus vite, mais à sa défense, Jean Guy Prescott, le secrétaire exécutif de la Commission athlétique de Montréal, a prétendu que Monsieur Baillargeon avait toujours la confiance de la Commission. 

« Il a fait du bon travail...» , a-t-il admis. 

En ambulance 

Il n’a fallu que quelques minutes d’observation au docteur Louis Leclerc, alors le médecin de la Commission athlétique, pour constater la nature extrêmement grave de Denny, inconscient, et exigea son transport à l’hôpital au plus vite 

A l’hôpital, on a procédé à une délicate opération du cerveau, pour abaisser la pression et à un certain moment, les médecins semblaient d’avis qu’il s’en sortirait, mais après trois ou quatre jours, on pouvait voir son état se détériorer. Les médecins l’avaient déclaré cliniquement mort cinq jours avant qu’il rende finalement l’âme à l’âge de 24 Ans. 

Toi aussi, dort en paix.

Neuf ans plus tôt 

Je ne peux pas non plus oublier la mort tragique de Danny Tucker à la suite de son combat contre Reynald Cantin, au Centre Paul Sauvé, le 26 juillet 1971. 

Le sort a voulu que ce soit Rosario Baillargeon, pourtant un officiel fort compétent, l’arbitre de ce match et huit ans plus tard, qu’il soit  l’officiel du combat Hart c. Denny. 

Tucker était inconscient quand il a quitté le tapis du ring et dans la nuit du 27 au 28 juillet 1971, il a rendu l’âme à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont des suites d’une hémorragie cérébrale. Il n’avait que 25 ans 

Le pire dans tout cela, c’est pour ceux qui ont été les auteurs de ces tragédies. Ils n'ont pas à pas se sentir coupables. Ils n’ont fait que leur métier de boxeurs, rien de plus.

J’espère que tu es bien où tu es Danny.

Une bonne pensée 

Enfin une bonne pensée pour le promoteur Régis Levesque. qui est décédé le 27 octobre dernier à l’âge de 85 ans. 

Pourquoi je vous parle de Régis ? Régis Lévesque

Parce que le 8 juillet 1935, à Ste-Angèle-de-Monnoir, naissait ce bébé qui devait devenir un chef de file de la boxe québécoise pendant quelques décennies. 

Mes respects et bon repos Régis.

Bonne boxe!