Dans les circonstances, Francis Ngannou se considère tout de même en territoire connu.

Bien sûr, d’étranges choses se passent à l’hôtel où logent les combattants qui prendront part à l’UFC 249 en fin de semaine à Jacksonville. D’abord, l’établissement est pratiquement vide. Les interactions avec les autres combattants et les membres de leur équipe sont limitées. Les rares personnes croisées dans les corridors portent un masque. Les entraînements et autres efforts pour la coupe de poids se font en solitaire.

« Mais pour moi, rien n’a changé, argue Ngannou. Je passe toujours la semaine avant un combat dans ma chambre de toute façon. C’est ce que je fais depuis que je suis ici. Je reste dans ma chambre. »

Le sentiment de familiarité du poids lourds camerounais ne se limite pas au confinement qu’il s’impose depuis son arrivée en Floride. Depuis sa victoire contre Junior Dos Santos il y a bientôt un an, Ngannou est considéré comme le deuxième aspirant au titre de sa division. Mais les choses stagnent.

Depuis qu’il a repris sa ceinture des mains de Daniel Cormier, en août 2019, le champion Stipe Miocic se tient loin des feux de la rampe. Certains commencent à l’accuser de protéger craintivement sa possession. Miocic, qui est un premier répondant dans sa région de l’Ohio, se défend en prétextant que le devoir l’appelle tout simplement ailleurs. Se préparer pour un combat ne fait pas partie de ses priorités en temps de pandémie.

Ngannou, qui a remporté ses trois derniers combats, croit parler au nom de bien des poids lourds lorsqu’il exprime son impatience.

« Il y a beaucoup de frustration dans la division, a dit celui qu’on surnomme « le Prédateur » lors d’une sortie médiatique organisée de façon virtuelle par l’UFC jeudi. Ça fait longtemps que ça ne bouge pas trop. Il est temps de remettre la division des poids lourds en opération. C’est étrange ce qui s’y passe présentement. »

« Ça fait un an que le titre n’a pas été mis en jeu. Quand sera le prochain combat de championnat? Personne ne le sait », déplore-t-il.

Ngannou, qui s’est incliné devant Miocic en combat de championnat en 2018, aimerait au moins sentir qu’une victoire contre Jairzinho Rozenstruik samedi le rapprocherait concrètement de son but. Il a milité auprès du président Dana White pour qu’une ceinture de champion intérimaire soit à l’enjeu, mais sa vision ne cadrait pas avec celle de la compagnie.

Ce n’est pas la première fois que Ngannou ne partage pas la même vision que son patron quant à la prochaine étape de sa carrière. Les nombreux différends entre les deux hommes semblent avoir eu raison de l’acharnement du combattant, qui dit ne plus s’en faire avec les ramifications d’une potentielle victoire contre Rozenstruik.

« Je ne sais pas ce que je pourrais faire de plus que gagner le combat [pour avoir une deuxième chance pour le titre], déclare-t-il, résigné. Et je vais gagner, mais après, qui sait ce qui va se passer? Il n’y a pas de règle : tout ce qui compte, c’est ce que souhaite l’UFC. Si l’UFC le veut, ça va arriver. Si l’UFC ne le veut pas, ça n’arrivera pas. Mais c’est correct. J’ai fait la paix avec ça. »

Même s’il a remporté ses trois derniers combats en moins de 80 secondes et qu’il a l’avantage d’être plus expérimenté que son prochain adversaire, Ngannou ne peut se permettre de prendre ce dernier à la légère.

Rozenstruik n’a peut-être pas affronté une brochette de pugilistes aussi impressionnante que Ngannou, mais la puissance de ses coups ne fait aucun doute. Depuis son entrée dans l’UFC, il a obtenu deux victoires par K.-O. dans la première minute d’un combat. Il a aussi épinglé à son tableau de chasse l’ancien champion Alistair Overeem. L’athlète de 32 ans n’a toujours pas connu la défaite en dix combats professionnels.

Le choc entre les deux cogneurs mettra fin à de longs mois d’anticipation. Le combat devait originalement être l’attraction principale d’un gala organisé à Columbus le 28 mars, mais avait été annulé en réaction au début de la crise causée par la propagation de la COVID-19. La date du 18 avril avait alors été ciblée pour déplacer l’affrontement, mais celui-ci n’a jamais eu lieu.

Les poids lourds s’affronteront finalement samedi. Le combat sera présenté lors des préliminaires de l’UFC 249 qui seront diffusées en direct sur RDS à compter de 20h.

« Les derniers mois ont été assez difficiles, mais c’est le cas pour tout le monde, pas juste pour moi. Dernièrement, rien n’est normal. Le monde entier est en train de changer et tout le monde doit s’adapter à ce nouveau monde », a philosophé Ngannou.