PAU - Ils sont les travailleurs du jour de repos, les petites mains - dans le cambouis - de la Grande boucle, qui bichonnent, réparent, remettent à neuf les vélos soumis à rude épreuve : mardi à Pau, sur les parkings des hôtels où sont descendues les équipes, les mécanos sont à l'oeuvre.

Les coureurs dorment encore. Le soleil cogne déjà fort sur les Pyrénées-Atlantiques alors que s'ouvrent les grandes portes arrières des imposants bus-ateliers des formations, libérant boîtes à outils, chevalets de réparation, roues, cadres et guidons.

Perry Moerman, le chef mécanicien belge de la formation kazakhe Astana, aligne les deux roues de ses coureurs à l'arrière du grand bus bleu turquoise : "Un cycliste a besoin d'un vélo qui marche", lâche-t-il, débonnaire.

Le cyclisme est une grande famille dont tous les membres, quelle que soit leur activité sur le Tour, ont à un moment de leur existence enfourché un deux roues en compétition.

"Nous sommes des coureurs ratés, ajoute le mécano avec humour. Alors, nous sommes passés de l'autre côté du guidon, reclassement côté coulisses, au chevet des matériels".

Les deux roues sont montés un à un sur le chevalet de réparation pour un check-up complet. Chaque engin au cadre de carbone est un petit bijou, souvent prototype du constructeur, d'une valeur de quelque 10 000 euros.

Cinq vélos par coureur

À l'intérieur du bus, une centaine de roues sont suspendues et une cinquantaine de cadres complets alignés au sol : "Nous transportons cinq vélos par coureur (ils sont 9 par équipe), trois pour la route et deux pour les contre-la-montre", explique le chef mécanicien d'Astana.

"Il y a aussi trois types de roues au profilage et au poids différents en fonction du terrain, les plus légères pour la montagne et les plus lourdes pour le plat", ajoute-t-il.

Quant aux engins du contre-la-montre, véritables fusées du bitume sans le moindre confort, avec leurs roues pleines et leur cadre très incliné vers l'avant, les chevaucher au-delà d'une heure de temps devient une torture pour le coureur.

L'activité va bon train autour du grand bus kazakhe. Ca parle français, espagnol, italien et même flamand. Ici on graisse, là on joue de la clef à molette ou du tournevis, mais toujours avec des gestes doux et précis sur les différentes composantes des vélos, presque des gestes d'orfèvre.

Perry Moerman monte dans le bus-atelier et brandit une roue usagée : "c'est celle de Robert Kiserlovski, notre équipier croate qui s'est fracturé la clavicule après avoir éclaté dans la descente du col de Péguère sur la 14e étape Limoux-Foix, quand un imbécile a jeté des clous de tapissier sur la route", explique-t-il.

Le clou rouillé est toujours fiché dans le pneu. C'est une pièce à conviction qui attend les enquêteurs.

"Si on attrapait le semeur de clous, on lui casserait la roue sur la tête...", lance le chef mécano d'Astana.