« Il est un connard (jerk) avec tout le monde sauf moi! »

Kyries Hebert déborde de franchise quand on le questionne sur son ami et secondeur étoile Chip Cox. L’identifier comme un oiseau rare s’avère un jeu de mots facile, mais ça demeure la meilleure façon de le décrire pour ceux qui le côtoient tous les jours.

Véritable « machine à cumuler des plaqués », Cox brille depuis huit saisons dans l’uniforme des Alouettes et il s’illustre plus que jamais en 2013 avec une récolte de 95 plaqués après 14 parties. S’il garde cette impressionnante cadence, il pourrait même s’attaquer au record (130) qui a été établi par J.C. Sherritt en 2012.

Mais Cox ne ressort pas du lot uniquement pour ses talents, il possède une personnalité atypique. Pour être poli, disons qu’il n’est pas du style à être gentil avec ses coéquipiers.

« Chip, c’est Chip. Certains joueurs l’aiment et d’autres non, mais c’est un bon coéquipier », a confié, sans détour, le receveur S.J. Green après l’avoir encensé pour ses qualités sur le terrain.

De tels propos peuvent faire sursauter, mais les organisations sportives sont habituées de négocier avec des tempéraments particuliers. Dans l’univers du sport professionnel, le rendement sur le terrain prime avant tout et Cox est sans reproche à ce sujet. 

« C’est tout un leader! Tout ce qui compte pour lui, c’est de bien réussir dans son travail et il a toujours été ainsi. Il n’a pas besoin de l’attention des médias et il ne veut pas attirer les réflecteurs ou se donner en spectacle », a expliqué son directeur général et entraîneur Jim Popp.

Chip CoxLe dirigeant des Alouettes touche un point très intéressant à propos de son protégé, Cox déteste accorder des entrevues. On pourrait même ajouter qu’il a horreur de cela et on se demande parfois si c’est la chose qu’il hait le plus au monde!

Au grand plaisir de la confrérie journalistique – et des amateurs – Cox a légèrement tempéré son opinion là-dessus cette année et il a accordé quelques minutes de son temps jeudi. 

« Le football, c’est à propos de l’équipe et non de moi », a expliqué cet homme de peu de mots à propos de son aversion pour les feux de la rampe.

En insistant, gentiment, sur le fait qu’il mérite le statut de joueur d’exception, il demeure peu loquace.

« C’est l’équipe qui compte, mon talent n’importe pas. On ne gagnera pas la coupe Grey parce que je connais une bonne saison », a fait valoir l'auteur de 20 interceptions et 5 touchés en carrière.

« Il reçoit beaucoup d’attention et il la mérite, mais il a été excellent depuis plusieurs années pour nous. Il est l’un des meilleurs joueurs défensifs de la LCF sinon le meilleur depuis quelques saisons », a tranché Popp. 

La domination de Cox ne fait aucun doute cette année alors qu’il possède une avance de neuf plaqués sur Robert McCune (Argonauts) et Henoc Muambna (Blue Bombers) qui arrivent au deuxième rang du circuit canadien.

Avant 2013, son meilleur total de plaqués grimpait à 82 alors il semble connaître sa campagne la plus prolifique, mais il ne fallait pas compter sur le principal intéressé pour l’admettre.

« Je ne le sais pas, c’est à vous de décider. Je joue seulement avec intensité pour me rendre au ballon », a commenté Cox sans se lancer la moindre fleur ou même un pétale.

Noel Thorpe, son coordonnateur défensif, et son copain Hebert ont donc pris ce rôle en charge.

« Par où commencer, c’est un joueur exceptionnel et tellement dédié. C’est un grand étudiant du football qui laisse ses actions sur le terrain parler et il donne tout un exemple aux autres avec son travail », a vanté Thorpe dont le système n’aurait sûrement pas la même efficacité sans cet athlète aux instincts fabuleux.

Cox a même tenté sa chance à deux occasions dans la NFL en 2005 avec les Lions de Detroit et en 2007 avec les Redskins de Washington sans gagner son pari.

« Il m’a toujours dit qu’il avait dû se limiter à jouer un rôle de touriste dans ses tentatives NFL! J’ai appartenu à trois équipes dans la NFL (les Bengals, les Texans et les Vikings) et il est aussi talentueux que les joueurs là-bas sauf qu’il faut parfois se retrouver au bon endroit au bon moment pour s’établir », a témoigné Hebert.

Un homme de famille qui goûtera peut-être à l’alcool un jour

Le visage de Cox s’est illuminé quand le sujet de sa famille a été abordé et il s’est ouvert volontiers sur cet aspect de sa vie. Il a même souri à quelques occasions durant cette portion de l’entrevue, ce qui est assez inusité pour lui.

Chip Cox« J’ai trois petits frères (dont deux venant de l’adoption). La famille occupe une place très importante dans ma vie et mes parents ont presque vu tous mes matchs à domicile même s’ils doivent se déplacer de l’Ohio chaque fois. Nous sommes tous très près et c’est ainsi que j’ai été élevé », a dévoilé le numéro 11 qui maîtrise bien le taekwondo.

Cet attrait familial a permis de tisser des liens avec Hebert surtout qu’une intéressante coïncidence entre eux pour les noms de leurs enfants.

« Nous avons des affinités ensemble notamment parce que nous sommes les meilleurs à notre position et en raison des noms de nos deux filles. Mes filles se nomment Kaylin et Kaylie comparativement à Kaylin et Kayla pour les siennes! », a conté Hebert avec plaisir.

Cox a donc savouré les moments les plus agréables de sa carrière avec ses proches et sa deuxième conquête de la coupe Grey revêt un cachet légèrement plus spécial.

« En 2009 (à gauche du trophée sur la photo), on battait tout le monde et on savait que nous allions l’emporter même si le match a été difficile. Pour la deuxième, le parcours a été plus exigeant avec des hauts et des bas alors je dirais que celle-ci était plus spéciale », a comparé celui qui utilisait sa grande vitesse en athlétisme à l’université.

Pas surprenant que Cox, qui est âgé de 30 ans, consultera sa femme pour la suite de sa carrière.

« J’avais convenu avec elle que nous parlerions de ce sujet après 10 saisons dans la LCF. On verra où j’en suis et j’aimerais continuer aussi longtemps que les Alouettes voudront de moi », a déclaré celui qui complète sa huitième saison et qui n’aura sûrement pas à tordre un bras aux dirigeants de l'équipe.Chip Cox

Depuis son entrée dans la LCF en 2006 en tant que demi défensif, Cox a été transformé en secondeur sous les ordres de Marc Trestman. Il s’est encore plus épanoui dans ce rôle en utilisant sa lecture de jeux et un espace de travail plus vaste pour ses talents athlétiques.

C’est fascinant de constater qu’il a raté un seul match en 140 possibilités et c’était le dernier de la saison 2010 pour profiter d’un repos dans un affrontement sans enjeu. En plus de sa préparation reconnue par ses pairs, un autre facteur joue en sa faveur.

« Je ne sais pas ce que l’alcool goûte! Je n’ai jamais pris une gorgée de bière, de spiritueux ou de vin. C’est quelque chose que je ne fais pas et pourquoi je commencerais maintenant? », s’est-il demandé avant d’entrouvrir une porte.

« Je sais que je travaille très fort pendant la saison morte et j’en retire de la fierté. Mais on dit que c’est bon pour la santé de boire un verre de vin rouge par jour. Peut-être que je pourrai essayer ça un jour! », a-t-il conclu avec un sourire qui laissait croire que les entrevues ne sont pas le supplice qu’il anticipe.