« Dans une cuvée moins forte comme cette année, il aurait sorti dans le top-5 »
Canadiens vendredi, 2 juil. 2021. 07:58 jeudi, 21 nov. 2024. 21:30MONTRÉAL – Que s’est-il passé, le soir du 21 juin 2019, pour que Cole Caufield glisse jusque dans les mains du Canadien de Montréal lors de la première ronde du repêchage? Deux ans plus tard, ce déroulement apparaît comme une bénédiction.
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Pour y voir un peu plus clair, on a sondé quelques recruteurs qui ont participé à cette soirée à Vancouver. Le constat commun qui en ressort, c’est que la glissade de Caufield au 15e rang n’était pas si étonnante, à ce moment.
Sans même avoir suivi de près le parcours éliminatoire actuel du Tricolore, ce jugement semble difficile à croire. Mais ça s’explique plus facilement quand on laisse de côté l’excitation collective et qu’on constate que Caufield a progressé au rythme où il récolte des points depuis sa sélection par Montréal.
Mais retournons quelques instants, en juin 2019, dans l’enceinte du repêchage, au Rogers Arena. Le portrait est devenu fort intrigant pour Trevor Timmins et Marc Bergevin après la sélection, au neuvième échelon, de Trevor Zegras par les Ducks d’Anaheim.
Zegras devenait déjà le troisième espoir de l’exceptionnelle cuvée du programme de développement américain à être repêché (après Jack Hughes au 1er rang par les Devils et Alex Turcotte au 5e rang par les Kings).
C’est à partir de là que la suite devient, avec les données de 2021, plus difficile à comprendre.
« Oui, son gabarit lui a fait mal au repêchage et il a chuté, mais c’était une très bonne cuvée. S’il avait été deux ans plus jeune et qu’il devait être repêché dans la cuvée de 2021 qui n’est pas aussi forte, il serait assurément dans le top-5 », a tenu à rappeler un recruteur d’expérience d’une équipe de la LNH.
Ainsi, au lieu de poursuivre dans la veine du programme américain, les Canucks ont opté pour l’attaquant russe Vasili Podkolzin et les Coyotes ont enchaîné avec le défenseur suédois Victor Söderström.
La tension grimpait à la table du Canadien qui ne cachait pas son intérêt pour le petit droitier surdoué. Pat Brisson, l’agent de Caufield, était même surpris que Bergevin invite son protégé à souper avant le repêchage car il ne serait assurément plus disponible, selon lui, au 15e rang.
Au 13e échelon, les Panthers de la Floride ne voulaient pas échapper l’occasion de repêcher le gardien très prometteur, Spencer Knight, et ça se justifie très bien.
Mais, au 12e rang, le Wild du Minnesota a préféré se tourner vers l’imposant ailier Matthew Boldy. D’après nos informations, Caufield était classé dans le top-10 sur la liste de cette organisation, mais il était devancé par Boldy sur ce classement.
On arrive donc à la 14e sélection, celle du défenseur Cam York par les Flyers de Philadelphie.
« Les Flyers ont eu peur avec la grosseur. Personnellement, je l’avais haut sur ma liste personnelle, dans le top-10 », a confié, de manière ce premier un dépisteur contacté.
« Il y avait beaucoup de bons joueurs dans son équipe. Ils étaient nombreux à produire. Quand ça arrive, c’est parfois difficile de tous les classer dans le bon ordre », a admis un deuxième dépisteur pour nous aider à débroussailler ce qui s’est passé.
D’après celui-ci, ce classement se justifiait, sans aucun problème, en juin 2019.
« C’est vraiment basé sur le portrait qu’on avait à notre disposition. Présentement, Caufield est au cœur de l’action et c'est beau de voir ce qu’il fait. Il patine si facilement et il marque des buts. Aujourd’hui, les gens se disent ‘Oh, mais pourquoi ils ne l’ont pas pris plus tôt ?’. Il y a une raison, c’est parce qu’il y avait d'autres très bons joueurs. Peut-être qu’ils n’atteindront jamais son niveau, mais ça s’expliquait », a noté cet intervenant.
Les dirigeants de quelques équipes doivent s’en mordre les doigts ces jours-ci, mais ils pourraient mieux accepter ce dénouement si les Podkolzin, Söderström, Boldy et York remplissent leurs promesses. Par exemple, York détient le potentiel de jouer plus de 25 minutes par match et d’évoluer sur la première unité du jeu de puissance.
« Mais si Caufield finit par compter 500 buts dans sa carrière, il y a du monde dans le milieu qui... », a admis un recruteur sans avoir besoin de finir sa pensée.
Une progression fulgurante depuis Noël
L’un des recruteurs sondés a eu l’occasion d’épier Caufield à de multiples reprises. Il tient à rappeler que le petit droitier a connu une évolution phénoménale dans son jeu depuis quelques mois. Oui, il marquait des buts à la tonne avant, mais son jeu ne s’approchait guère de ce qu’il expose avec le Canadien.
« Plusieurs de ses parties au Championnat mondial junior étaient bien normales. De ce que j’ai vu de lui au niveau universitaire, il donnait l’impression que ce serait compliqué de jouer à ses côtés. Il fallait que tout passe par lui. S’il ne comptait pas, tu voyais qu’il se mettait bien de la pression. Mais tout ça a changé vraiment après Noël. Des fois, il y a une prise de conscience qui s’opère », a-t-il décrit.
« Je voyais ses buts en avantage numérique et son lancer typique en angle, mais il ne jouait pas comme il le fait maintenant », a ajouté cette source.
La séquence de son superbe but, lors du sixième match contre Robin Lehner des Golden Knights, mène un recruteur à ce constat.
« Juste son petit jeu sur ce but pour se donner plus de marge de manœuvre, c’est de l’anticipation, du sens du hockey et un geste action-réaction à un niveau élite. Tu ne peux pas lui donner plus qu’une note parfaite. Probablement que ce côté de son jeu a été sous-évalué. »
Caufield a encore bien du temps devant lui pour raffiner son art, mais il démontre qu’il rehausse son calibre en évoluant avec la crème de la crème. Dire que ça pouvait se comprendre de penser qu’il avait marqué un grand part de ses buts car il était jumelé à Hughes dans l’uniforme américain.
« C’est une autre chose qui est difficile à évaluer pour nous. Plus le niveau est fort, meilleur il devient. C’est un gros plus », a convenu ce recruteur.
Au final, Caufield semble même surprendre les dirigeants du Canadien qui avaient choisi la prudence avant de le lancer dans l’action des séries. Ça ne peut qu’être de bonne augure pour l’avenir.