MONTRÉAL – Pour la première fois en trois ans, la Suisse a été en mesure de résoudre le mystère danois. Et conséquemment, pour la première fois de l'histoire du Championnat du monde de hockey junior, les champions en titre ne seront même pas des quarts de finale.

Submergée par le raz-de-marée scandinave en première période, la Suisse a réussi à combler un retard de trois buts pour se sauver avec une victoire de 5-4 en fusillade et confirmer sa propre place en quarts, vendredi.

Belle déviation devant le filet

Contre un adversaire qui disputait un deuxième match en 24 heures, la Suisse a forcé le gardien Kasper Krog à effectuer 48 arrêts avant qu’il ne soit battu par l’attaquant Marco Miranda au tout début de la séance de tirs de barrage. À l’autre bout de la patinoire, Joren van Pottelberghe n’a fait face qu’à 22 lancers et a été parfait devant trois tireurs en fusillade.

« Je n’arrêtais pas de dire aux gars que si on continuait à jouer comme on le faisait, à lancer aussi souvent et à foncer pour les retours, ce n’était qu’une question de temps avant qu’on finisse par remplir le filet », a confié l’entraîneur Christian Wohlwend après la rencontre.

« Notre réservoir était vide, a candidement admis l’entraîneur danois Olaf Eller, qui s’est permis de critiquer poliment les caprices du calendrier. Nous avons fait de notre mieux, mais il ne nous restait plus assez d’essence. Je suis fier de ce que nous avons donné contre une équipe mieux classée que nous et qui se battait pour sa survie. »

La victoire suisse a eu comme effet collatéral d’éliminer la Finlande, médaillée d’or il y a un an et désormais assurée de terminer le tour préliminaire au dernier rang du groupe A. Les champions en titre seront donc contraints de jouer pour la 9e place en ronde de relégation.

La Suisse, quant à elle, a consolidé sa place au quatrième rang du groupe avec quatre points et aura l’occasion d’améliorer son sort samedi en disputant son dernier match de classement contre la Finlande.

« C’est une grosse surprise, mais il ne faut pas oublier qu’il leur manquait deux joueurs incroyables, a rappelé Wohlwend en faisant référence à Patrik Laine et Jesse Puljujarvi, deux joueurs admissibles qui évoluent dans la LNH. Dans n’importe quelle ligue, un ou deux attaquants peuvent faire toute la différence. Ils n’ont marqué que quatre buts en quatre matchs si on compte leur partie hors-concours contre le Canada. Ce n’est pas assez pour gagner. »

Zehnder ne manque pas sa chance

« Ça ne me fait pas trop de peine parce que l’une des raisons pour lesquelles ils en sont là, c’est qu’ils ont perdu contre nous », a répondu Eller, pince-sans-rire.

Avec six points en banque, le Danemark peut toujours espérer terminer au deuxième rang du groupe A. Pour ce faire, il aura besoin de défaites de la République tchèque et de la Suisse lors de la dernière journée de la ronde préliminaire.

« Si on m’avait dit, quand nous avons quitté le Danemark le 14 décembre, qu’on terminerait la ronde préliminaire avec six points dans un groupe avec la Suède, la Finlande, la Suisse et les Tchèques, j’aurais dit ‘Merci beaucoup!’, a relativisé Eller. C’est fantastique pour le hockey danois. Pour la deuxième fois en trois ans, nous venons de récolter des points dans trois matchs sur quatre. »

Si les astres s’alignent en conséquence, le Danemark pourrait de nouveau retrouver la Russie sur son chemin en quarts de finale. Les deux pays se sont livrés d’épiques batailles au cours des deux dernières années au Mondial junior. En 2015, en lever de rideau du tour préliminaire présenté à Toronto, la Russie avait eu besoin de la fusillade pour éviter d’être surprise. L’an dernier, les favoris avaient évité le désastre en créant l’égalité avec 44 secondes à faire en troisième période et en l’emportant éventuellement en prolongation.

« Nous avons affronté les Russes quatre fois dans les trois dernières années et trois de ces matchs étaient à égalité après le temps réglementaire, a précisé Eller. Ils ont eu le dernier mot à chaque fois, mais ça devrait être agréable de les revoir. »

Un but refusé qui aurait pu coûter cher

Contre un adversaire qui avait plus à gagner, les Danois ont vite démontré que le degré de motivation ne serait pas un enjeu. En fait, coach Eller n’avait même pas eu le temps d’amorcer la rotation de ses trios que son équipe s’inscrivait déjà au pointage.

Seulement vingt secondes étaient disparues du cadran quand le capitaine Alexander True a fondu sur le retour d’un lancer du défenseur Oliver Gatz et a visé la lucarne avec autorité pour faire scintiller la lumière rouge derrière le filet de van Pottelberghe.

Le Danemark a accentué son avance à peine trois minutes plus tard quand Joachim Blichfeld a subtilement fait dévier un tir de la pointe pour inscrire son troisième but du tournoi. Puis à 13:40, Niklas Anderson a complété un bel échange sur le jeu de puissance en touchant la cible avec un tir sur réception.

Les Suisses ont montré signe de vie avant la fin du premier vingt. La jeune sensation Nico Hischier, l’un des plus beaux espoirs en vue du prochain repêchage de la LNH, a inscrit son équipe au tableau avec son deuxième but et son cinquième point du tournoi.

« C’était comme un coup de poing en plein visage quand ils ont pris l’avance de 3-0, a illustré le joueur vedette des Mooseheads de Halifax. Ça a fait mal, mais le match était encore jeune. Dans les matchs préparatoires, on avait comblé un déficit semblable contre le Canada, alors on savait qu’on pouvait faire la même chose contre le Danemark.

Mathias From a redonné un coussin de trois buts aux meneurs dès le début de l’engagement médian, mais un doublé de Yannick Zehnden et un but du jeune Nando Eggenberger ont permis aux retardataires de rétablir la parité.

Les Suisses croyaient même avoir pris les devants quelques minutes plus tard quand Damien Riat a semblé pousser une rondelle libre sur la jambière de Krog qui se trouvait derrière la ligne rouge. Le but a toutefois été refusé après une longue révision de la reprise vidéo, une décision qui a soulevé l’ire du pilote helvète selon qui la présence de deux de ses protégés dans le demi-cercle du gardien n’a jamais été mentionnée pour justifier la rectification. Les officiels auraient plutôt jugé qu'ils ne pouvaient établir hors de tout doute que la rondelle avait pénétré dans le filet.

« C’est une question de gros bon sens, tout le monde sait que cette rondelle était dans le but, a calmement déploré Wohlwend devant les journalistes. On espérait qu’au moins un angle de caméra allait nous donner raison, mais ce n’était apparemment pas le cas. C’était un peu frustrant. »

« Je n’aurais pas célébré de cette façon si je n’étais pas convaincu que j’avais marqué, rigolait Riat après le match. Mais maintenant qu’on a gagné, ça n’a plus d’importance. »

Ce qui a de l’importance, c’est que la Suisse pourra améliorer son positionnement au classement samedi contre la Finlande et que pour l’occasion, elle pourra pour l’occasion compter sur le retour au jeu de son capitaine Calvin Thurkauf, qui purgeait un match de suspension contre les Danois.

« On veut terminer deuxième, assure Wohlwend. De toute façon, c’est toujours dangereux d’amorcer un match sans se donner à 100 %. On ne peut offrir de demi-mesure sans courir le risque de se faire punir. On ne peut pas tricher. »