Sportstats. La révolution par la puce
Amateurs dimanche, 18 oct. 2015. 12:27 samedi, 16 nov. 2024. 20:33Si vous êtes un coureur et que vous avez déjà participé à une compétition au Canada au cours des dernières années, il y a de très fortes chances que vous ayez porté une pièce d'équipement de cette compagnie d'Ottawa. C'est grâce à cette petite pièce de Sportstats, une puce électronique, que vous êtes assurés d'avoir le chrono exact de votre course, que vous pouvez consulter certains de vos temps de passages et que votre famille ou vos amis sont capables de vous suivre en temps réel et d'être là au bon moment pour vous accueillir triomphalement à votre arrivée!
La puce électronique a littéralement révolutionné le chronométrage de nombreuses épreuves sportives au cours des dernières années. Il est loin le temps où on donnait un petit bâtonnet de Popsicle numéroté aux participants lorsqu'ils franchissaient le fil d'arrivée pour aider les organisateurs à établir les chronos manuellement. Terminé les frustrations associées à un temps établi en se basant sur le coup de départ (gun time) plutôt que sur le moment où le coureur franchit réellement le départ pour amorcer son épreuve (chip time).
Marc Roy et son épouse, Isabelle Fradette, sont les propriétaires de Sportstats, dont le siège social est Ottawa, et s’y investissent totalement depuis plusieurs années. Avec une présence sur une trentaine d’événements chronométrés par fin de semaine un peu partout dans le monde, ils se doivent de faire des choix et de déléguer régulièrement.
Ils ne sont pas les fondateurs de ce qui est devenu la plus importante compagnie de chronométrage au monde. Ils ont plutôt acheté l’entreprise en 1995. À cette époque, Sportstats était appelé à œuvrer sur quelques compétitions seulement par année. Mais le potentiel était là et ils ont su en faire une référence.
Une expansion rapide
Désormais, 110 employés travaillent pour Sportstats à travers le monde. En plus de celui d’Ottawa, la compagnie a des bureaux à Québec, Vancouver, aux États-Unis et en Asie. En 2015 seulement, leur système de chronométrage à puce se retrouvera sur 820 événements sportifs divers accueillant 1,1 million de participants.
Si aujourd’hui, l’utilisation d’une puce électronique est une évidence pour chronométrer un vaste plateau de coureurs, ce ne fut pas toujours le cas. Marc Roy se souvient qu’au milieu des années 90, il n’avait eu aucune difficulté à convaincre les organisateurs d’événements de masse accueillant jusqu’à 5 000 participants. Il les prévenait que ce serait un peu plus dispendieux, mais que le résultat serait nettement plus efficace. «Cela a eu un effet boule de neige. Les plus petites compétitions ont tout simplement voulu copier les plus importantes, si bien que vers 2001, tous nos événements faisaient confiance à la technologie par puce et abandonnaient le chronométrage manuel », raconte-t-il.
Lors des premiers événements chronométrés par Sportstats, le principal défi résidait en la synchronisation des systèmes entre le départ et l’arrivée. Monsieur Roy précise toutefois qu’après avoir éprouvé de petits ennuis, des ajustements furent rapidement apportés. «Ensuite, tout a bien fonctionné. Nous avons été chanceux d’adopter la bonne technologie dès le départ en plus d’installer un système secondaire manuel juste au cas. Nous procédons encore de la sorte à chaque compétition et c’est ce qui fait notre force et notre renommée. On ne veut surtout pas prendre la chance de rater le passage d’un seul participant. »
Les différentes technologies reliées au chronométrage par puce ont évolué au cours des dernières années. La plus grosse révolution est venue de la technologie Chronotrack en 2002. La puce est alors passée du soulier ou du poignet au dossard. Actuellement, Sportstats utilise le système Mylaps qui offre la puce sur le dossard des coureurs. Cette technologie est tellement efficace qu’elle permet facilement d’identifier les participants qui trichent volontairement ou involontairement.
Difficile de tricher
En effet, les données obtenues par la puce électronique portée par un coureur sont scrutées minutieusement par le système informatique de Sportstats lors des compétitions. Une alerte de tricherie (cheater flag alert) est lancée dès qu’il y a un doute sur un résultat. Au moment de l’entrevue, le président de Sportstats revenait d’un triathlon à Cozumel, au Mexique. Pas moins de 41 participants avaient alors été disqualifiés. C’est beaucoup! De ce nombre, les temps enregistrés sur les différents tapis de chronométrage avaient permis de constater que 31 d’entre eux avaient effectué une seule des deux boucles règlementaires de 21,1 kilomètres de la dernière épreuve, la course à pied. Ces participants avaient tout de même franchi le fil d’arrivée et réclamé leur médaille avant d’être disqualifiés par la suite.
La moyenne de disqualifications pour un événement majeur varie habituellement de cinq à dix. La plupart du temps, il s’agit de coureurs qui décident d’abandonner, mais qui traversent tout de même la ligne d’arrivée avec leur dossard après avoir court-circuité le parcours. Le système enregistre leur chrono avant de signaler la faute. «Ici à Montréal, lors du marathon de septembre, les coureurs sont disciplinés. On dénote annuellement seulement trois ou quatre cas de tricherie. Ces participants ont un temps de départ et un temps d’arrivée, mais ne sont pas passés sur les tapis de chronométrage au 10km, au 21km et au 30km », explique Marc Roy. « Il arrive également parfois qu’un coureur passe au 21e kilomètre en 1h42, il n’enregistre ensuite aucun autre temps de passage et on le retrouve à l’arrivée à peine 1h30 plus tard! Disons que ça ne semble pas réglo tout ça. »
Innover grâce aux médias sociaux
La force de Sportstats et des résultats obtenus grâce à la technologie de la puce électronique réside aussi dans le lien qu’il crée entre les participants et leurs supporters. Lors du plus récent Championnat du monde Ironman, à Kailua-Kona (Hawaii), une nouvelle technologie avec écran LED a été mise à l’essai pour la toute première fois. Les noms des participants s’affichaient automatiquement avec leurs chronos dès qu’ils franchissaient le fil d’arrivée. Que de chemin parcouru en à peine une quinzaine d’années alors que les résultats devaient être imprimés sur de longues feuilles affichées sur des tableaux.
En 2009, l’entreprise a d’abord offert à ceux qui le souhaitaient la possibilité d’envoyer par messagerie texte les résultats. On a cependant constaté que peu de gens pouvaient ainsi être rejoints. Les dirigeants de la compagnie d’Ottawa se sont rapidement tournés vers les médias sociaux. « Nous avons été la première compagnie en Amérique du Nord à envoyer les résultats via cette plate-forme. Aujourd’hui, dès qu’un participant franchit le départ, le 10km ou l’arrivée, ses résultats sont envoyés automatiquement sur sa page Facebook pour que ses amis puissent les consulter et le suivre. Les gens peuvent également créer leur propre compte sur notre page officielle.»
L'avenir de la puce
Dans le monde des puces électroniques, impossible de demeurer compétitif sans continuellement innover. À ce sujet, l’avenir de la technologie de chronométrage demeure ouvert. Une utilisation généralisée d’une puce GPS pour donner en temps réel la position d’un coureur sur le parcours semble être la prochaine étape. Cette technologie existe déjà et est utilisée par des coureurs élites lors de certaines compétitions, mais, selon Marc Roy, on ne verra pas cela du jour au lendemain chez les coureurs de tous les jours.
«Honnêtement, je ne sais pas si ça se réalisera prochainement pour la vaste majorité des coureurs tellement c’est dispendieux. Nous pourrions, plutôt que d’utiliser le GPS, installer nos propres antennes de détection à chaque borne kilométrique d’une course. Ça fonctionnerait, mais le coût d’intégration demeurerait encore trop élevé. Tant qu’une compagnie n’arrivera pas à produire une puce GPS à moins de 20 dollars par participant, cela devra attendre. Et de toute façon, rien ne va remplacer la puce pour le chronométrage, surtout pas le GPS qui n’est pas encore assez précis », conclu-t-il.
Une chose est cependant certaine, il est maintenant impossible d’envisager l’organisation d’une compétition de course à pied sans le chronométrage par puce. Plus besoin pour les participants de se masser à ligne de départ pour obtenir leur véritable chrono à la fin. Grâce à une merveilleuse petite puce comme celles de Sportstats, les coureurs peuvent se concentrer uniquement sur leurs courses en prenant un départ sécuritaire. Ils savent également qu'ils ne sont plus seuls sur le parcours, car à chacun de leur passage sur un tapis de chronométrage, la petite puce se charge de relayer à la famille et aux amis la progression et l'allure de leurs déplacements. Une bien grande utilité pour une si petite pièce d'équipement!