PARIS - L'image impressionnante d'Usain Bolt et d'un éclair zébrant le ciel de Moscou après sa victoire sur 100 m aux Mondiaux d'athlétisme a fait le tour du monde et du Web, se voyant largement partagée sur les réseaux sociaux.

Usain Bolt lui-même a partagé le cliché, avec ce commentaire sur Twitter : « Il paraît qu'une image vaut mille mots... mais cette photo prise par Oliver (sic) Morin... Certainement une image pour la vie #épique ».

Olivier Morin, 47 ans, du bureau AFP de Milan, s'est simplement contenté de dire qu’un pour cent de mérite lui revenait dans cette photo. Photographe à l'AFP depuis 23 ans, il avait choisi d'installer cinq appareils photo le long de la piste, tous focalisés sur le couloir de Bolt. Il voulait obtenir un cliché du futur vainqueur en train de lever les bras au ciel. L'éclair a frappé, en bonus.

Derrière Bolt, le dopage a fait le ménage

Derrière son icône Usain Bolt, l'athlétisme a vécu une année noire, de gros poissons se faisant prendre dans les filets de la lutte antidopage.

La Foudre s'est abattue sur l'athlétisme en 2013, dans tous les sens du terme.

Dans les coulisses surtout, dans les semaines qui ont précédé le grand rendez-vous mondial moscovite, et ces annonces de plusieurs contrôles positifs de grands noms du sprint qui ont court-circuité l'enthousiasme.

En mai, c'est d'abord une des icônes du sprint jamaïcain, Veronica Campbell-Brown, qui voit stoppé son élan vers les Mondiaux. « VCB », c'est le chaînon manquant de l'athlétisme jamaïcain, entre l'ère Merlene Ottey et l'ère Usain Bolt, mais c'est surtout la première Jamaïcaine championne olympique de l'histoire sur 200 m, en 2004, avant de récidiver en 2008, à Pékin. Des Jeux où les sprinteurs de l'île allaient signer un carton plein, chez les hommes comme chez les femmes.

Gay et Powell hors course

La championne est déclaré positive à un diurétique considéré comme un produit masquant. Suspendue provisoirement, elle n'écopera finalement que d'un avertissement, en octobre.

Le 14 juillet, trois semaines avant les Mondiaux de Moscou, le coup de semonce est encore plus terrible pour la famille de l'athlétisme.

En l'espace de quelques heures, l'Américain Tyson Gay, alors meilleur performeur mondial de l'année sur 100 m, puis le Jamaïcain Asafa Powell, ancien recordman du monde de la spécialité, reconnaissent des contrôles positifs.

Gay, triple champion du monde 2007 (100, 200, 4 x 100 m), s'est fait pincer hors compétition en mai et lors des sélections américaines fin juin, comme Powell lors des sélections jamaïcaines.

Les deux hommes, qui dominaient le sprint mondial avant l'avènement d'Usain Bolt, plaideront l'erreur involontaire tout en acceptant leur responsabilité.

Le coup est d'autant plus rude que le sprinteur américain, en particulier, bénéficiait d'une belle cote de confiance. Durant les premiers jours de l'affaire, l'agence américaine antidopage (Usada), tombeuse de Lance Armstrong en cyclisme, soulignera à plusieurs reprises l'attitude responsable du sprinteur américain, et sa très grande coopération dans l'enquête.

Mais le mal est fait et dès lors chaque rendez-vous athlétique de la saison va voir au-dessus de lui les nuages du dopage s'amonceler.

Quatre jours plus tard, à Monaco, l'Américaine Carmelita Jeter et la Jamaïcaine Shelly-Ann Fraser-Pryce préfèrent quitter la conférence de presse plutôt que de répondre aux questions.

Le Kenya visé comme la Jamaïque

Une semaine après, soit un an après les Jeux, le meeting anniversaire de Londres se transforme en questionnaire grandeur nature sur la sincérité des performances.

Le roi Bolt reste zen, accepte, lui, de répondre aux interrogations et reconnaît même prendre des vitamines.

Mais les sprinteurs ne sont pas les seuls visés. Et la fin de l'année va être marquée par de fortes interrogations sur le haut niveau au Kenya.

Depuis un an, des reportages montrent ainsi une léthargie inquiétante face à la distribution et l'utilisation d'EPO.

Récemment, la question de la création d'un centre de lutte contre le dopage, ou d'une agence digne de ce nom, a ressurgi, dès lors que l'Agence mondiale antidopage et la Fédération internationale d'athlétisme ont fait part de leur circonspection quant à l'action des pouvoirs publics kényans.

À vrai dire, les mêmes interrogations touchent la Jadco, l'agence jamaïcaine antidopage, dont les responsables ont démissionné en bloc fin novembre face aux critiques.

Sans grand championnat au programme, hormis la première édition des championnats du monde de relais aux Bahamas, la saison 2014 peut donc être synonyme de remise à plat de la lutte antidopage.

Elle sera en tout cas une année charnière avant les Mondiaux de Pékin (2015) et les Jeux de Rio (2016), les deux derniers grands objectifs d'Usain Bolt.