Vous vous levez un matin, encore courbaturé par vos diverses activités de la veille. Cette brillante idée de suivre un ami pour une randonnée supposément facile de vélo de montagne a laissé des séquelles. Vous jetez un coup d’œil à votre calendrier d’entraînement. Misère! C’est votre longue sortie de course à pied de la semaine. Un 18 kilomètres au programme!

Comment allez-vous réussir à réaliser cet exploit alors que c’est avec beaucoup de peine que vous mettez un pied devant l’autre? Vous vous apprêtez à donner un exemple probant de ce qu’on appelle la fameuse « force du mental »! Car, même si tout votre corps est en quête de repos vous décidez de ne pas l’écouter et d’aller courir.

Les premières minutes de votre course ne sont pas du tout agréables. C’est un phénomène souvent vécu par les coureurs qui envisagent les kilomètres à parcourir avant la fin de l’activité. Vos muscles et tendons sont raides et douloureux. Vous avez l’impression d’être déjà à bout de souffle.

Pourtant, vous persévérez. Et au bout d’une vingtaine de minutes, vous voilà dans un état de bien-être. Vous goûtez au bonheur! Vous n’avez plus mal, votre respiration est régulière et votre cadence est celle d’un métronome. Vous terminez votre entraînement avec un large sourire et fredonnez un air connu jusqu’à votre douche. Le reste de la journée s’annonce belle.

Que s’est-il passé? Pourquoi, en si peu de temps, un entraînement de course à pied qui s’annonçait pénible s’est-il transformé en moment d’extase et de fierté? C’est grâce aux endorphines, un antidouleur naturel produit par l’organisme. Plusieurs sportifs sont accros à cette hormone sécrétée lors d’un entraînement vigoureux.

Une découverte récente

Ce sont les biologistes Hans Kosterlitz et John Hughes qui ont découvert l’endorphine au début des années 1970. En travaillant avec des souris et des cochons, ils parvinrent à démontrer que le cerveau produisait un antalgique naturel qui essaimait le corps et produisait une sensation de plaisir. Cette substance avait un effet de longue durée en intervenant sur des zones du cerveau associées à la perception de la douleur.

Ainsi, l’exercice physique entraîne une sécrétion importante d’endorphines. Mais attention, cet exercice doit être d’une certaine longueur. Inutile d’attendre des résultats après une simple petite marche digestive de dix minutes. Les endorphines produites augmentent proportionnellement à la durée de l’entraînement. Déjà, après une trentaine de minutes, le taux d’endorphines est jusqu’à cinq fois supérieur à celui observé au repos. Encore mieux, les effets euphorisants et sédatifs perdurent jusqu’à six heures après la fin de l’activité.

Des sports d’endurance comme la course à pied, le vélo, la natation ou le ski de fond sont ceux qui aident à la plus grande sécrétion d’endorphines. Cette « drogue naturelle » est peut-être gratuite, mais requiert tout de même une certaine quête. Pour en bénéficier au maximum, il importe de maintenir un effort pendant une bonne demi-heure à 60-70 % de sa capacité cardio-respiratoire maximale. C’est un effort important, mais accessible à tous.

La très grande majorité des spécialistes de la santé recommandent aux personnes stressées, angoissées, anxieuses ou déprimées de pratiquer une activité physique à bonne intensité. La production d’endorphines soulage leurs symptômes.

Mais attention à la dépendance! Certaines personnes peuvent devenir obsédées par leurs performances sportives et sont incapables de prendre des pauses. Elles sont carrément en manque et ont besoin de leurs endorphines quotidiennes. Elles deviennent irascibles si elles ratent une seule journée d’entraînement ou bien augmentent continuellement la durée de leurs sessions en croyant obtenir de meilleurs résultats.

Cette quête inavouée d’endorphines peut mener à un surentraînement à l’origine de blessures ou d’une grande fatigue. Un sentiment de culpabilité s’installe. Il importe donc de bien doser ses efforts.

Ne pas bouder son plaisir

La prochaine fois que vous entreprendrez une séance de course à pied, attendez au moins une vingtaine de minutes après le début de votre activité pour porter un jugement sur votre condition physique.

Lorsque vous sentirez le plaisir s’installer, que vos pensées deviendront plus lucides et, surtout, que votre « second souffle » sera arrivé, n’oubliez pas de vous émerveiller sur la magnificence du corps humain. Quelque part, de petites glandes situées près de votre cerveau travaillent d’arrache-pied à la production d’endorphines pour vous permettre de maintenir votre effort en diminuant la douleur.

Ce moment d’extase est gratuit et accessible à tous. Mais il n’y a qu’un seul chemin pour y parvenir: l’activité physique. Je vous invite fortement à l’emprunter.