Q. Quels sont les faits saillants de la carrière junior de Guy Lafleur?

R. L'histoire de Guy Damien Lafleur commence à Thurso, en Outaouais. Dans les années 50, les perspectives d'avenir sont peu nombreuses pour les jeunes là-bas. Il y a l'usine de papier, l'église catholique et l'aréna. En choisissant la dernière option, le jeune Lafleur va sans le savoir écrire l'un des chapitres les plus fabuleux de l'histoire sportive du Québec.

Dès l'âge de 10 ans, sa réputation dépasse déjà les frontières de son patelin. Alors que le Carnaval de Québec bat son plein, Lafleur est le point de mire du tournoi pee-wee. Les amateurs se rendent en grand nombre au Colisée pour le voir à l'oeuvre.

Huit ans plus tard, le destin fait en sorte qu'il se retrouve encore au Colisée pour donner ses premiers coups de patins dans les rangs juniors. Grâce à Lafleur, les Remparts attirent les foules. En seulement deux saisons régulières, celui qui porte le numéro 4 en l'honneur de son idole Jean Béliveau inscrit 233 buts. Au printemps de 1971, il couronne son passage chez les juniors en remportant la Coupe Memorial.

Fiche avec les Remparts (saison régulière)
1969-70: 56 PJ, 103 B, 67 P, 170 PTS, 105 MP
1970-71: 62 PJ, 130 B, 79 P, 209 PTS, 135 MP

Fiche avec les Remparts (séries éliminatoires)
1969-70: 15 PJ, 25 B, 18 P, 43 PTS, 34 MP
1970-71: 14 PJ, 22 B, 21 P, 43 PTS, 49 MP

Q. Quels sont les moments marquants de Guy Lafleur avec le Canadien?

R. En juin 1971, les 13 équipes de la LNH participent au repêchage annuel dans un hôtel de Montréal. Même si le Canadien vient de remporter la Coupe Stanley, il profite du tout premier choix en raison d'une transaction complétée avec les Seals d'Oakland deux ans plus tôt (les Seals avaient reçu Ernie Hicke et un premier choix qui allait devenir Chris Oddleifson, contre François Lacombe et un premier choix qui allait devenir...Lafleur). Le directeur-général Sam Pollock ne surprend personne lorsqu'il annonce sa sélection de Lafleur.

L'arrivée de Lafleur avec le Bleu-Blanc-Rouge coïncide avec le départ de Jean Béliveau, qui annonce sa retraite quelques jours plus tôt. Lafleur n'a pas encore 20 ans mais déjà, la pression est grande. On le voit comme l'héritier de la tradition établie par les Morenz, Richard et Béliveau. Mais ses trois premières saisons à Montréal ne se déroulent pas comme prévu. Il marque en moyenne 26 buts mais les amateurs en veulent plus. Scotty Bowman laisse Lafleur de plus en plus souvent sur le banc, la foule se permet même de le huer cruellement lors d'un match en décembre. Le jeune joueur touche alors le fond du baril.

Marié depuis un an à Lise Barré, Guy Lafleur sort de sa coquille comme par magie lors du deuxième jour du camp d'entraînement de 1974. Il oublie alors son casque protecteur au vestiaire et connait une journée du tonnerre. Il ne le remettra plus jamais par la suite. Entre 1975 et 1980, Lafleur est l'athlète le plus dominant et le plus spectaculaire de la Ligue nationale.

Le Démon Blond est né. Il devient le premier joueur à connaître six saisons consécutives de 50 buts et 100 points, et permet à son équipe de mériter la coupe Stanley pendant quatre saisons de suite. C'est à cette époque que Jacques Lemaire devient le joueur de centre régulier sur le trio de Lafleur. Pendant trois ans, les deux hommes sont au diapason.

La fin de la décennie 70 marque un grand changement dans l'histoire du Canadien. Scotty Bowman délaisse son poste d'entraîneur-chef, des vétérans comme Lemaire et Dryden prennent leur retraite, et les performances de Lafleur deviennent moins éblouissantes.

Fiche avec le Canadien (saison régulière)
1971-72: 73 PJ, 29 B, 35 P, 64 PTS, 48 MP
1972-73: 69 PJ, 28 B, 27 P, 55 PTS, 51 MP
1973-74: 73 PJ, 21 B, 35 P, 56 PTS, 29 MP
1974-75: 70 PJ, 53 B, 66 P, 119 PTS, 37 MP
1975-76: 80 PJ, 56 B, 69 P, 125 PTS, 36 MP
1976-77: 80 PJ, 56 B, 80 P, 136 PTS, 20 MP
1977-78: 78 PJ, 60 B, 72 P, 132 PTS, 26 MP
1978-79: 80 PJ, 52 B, 77 P, 129 PTS, 28 MP
1979-80: 74 PJ, 50 B, 75 P, 125 PTS, 12 MP
1980-81: 51 PJ, 27 B, 43 P, 70 PTS, 29 MP
1981-82: 66 PJ, 27 B, 57 P, 84 PTS, 24 MP
1982-83: 68 PJ, 27 B, 49 P, 76 PTS, 12 MP
1983-84: 80 PJ, 30 B, 40 P, 70 PTS, 19 MP
1984-85: 19 PJ, 2 B, 3 P, 5 PTS, 10 MP

Fiche avec le Canadien (séries éliminatoires)
1971-72: 6 PJ, 1 B, 4 P, 5 PTS, 2 MP
1972-73: 17 PJ, 3 B, 5 P, 8 PTS, 9 MP
1973-74: 6 PJ, 0 B, 1 P, 1 PT, 4 MP
1974-75: 11 PJ, 12 B, 7 P, 19 PTS, 15 MP
1975-76: 13 PJ, 7 B, 10 P, 17 PTS, 2 MP
1976-77: 14 PJ, 9 B, 17 P, 26 PTS, 6 MP
1977-78: 15 PJ, 10 B, 11 P, 21 PTS, 16 MP
1978-79: 16 PJ, 10 B, 13 P, 23 PTS, 0 MP
1979-80: 3 PJ, 3 B, 1 P, 4 PTS, 0 MP
1980-81: 3 PJ, 0 B, 1 P, 1 PT, 2 MP
1981-82: 5 PJ, 2 B, 1 P, 3 PTS, 4 MP
1982-83: 3 PJ, 0 B, 2 P, 2 PTS, 2 MP
1983-84: 12 PJ, 0 B, 3 P, 3 PTS, 5 MP


Q. Qu'est-ce qui a mené au départ de Guy Lafleur de Montréal?

R. En 1981, le mariage de Lafleur bat de l'aile. Il n'a plus la tête au hockey et fréquente très souvent les discothèques. À la fin du mois de mars, Lafleur prend le volant après avoir passé plusieurs heures à consommer de l'alcool. Victime d'un accident de la route, il frôle la mort.

Trois ans plus tard, Jacques Lemaire accepte de remplacer Bob Berry derrière le banc du Canadien. Il tente alors d'implanter un système défensif dans lequel tous les joueurs sont mis à contribution, mais Guy Lafleur n'accepte pas le rôle qu'on veut lui confier. Lors de la saison 1984-85, Flower n'a marqué que deux buts en 19 matchs. Le coeur n'y est plus, il prend alors tout le monde par surprise et annonce sa retraite.

Trois mois plus tard, Lafleur fait l'objet d'une grande fête. On retire le chandail numéro 10 qu'il a porté pendant 14 saisons. Le Démon Blond fait un dernier tour de piste dans un Forum à la fois bruyant et ému. À l'âge de 33 ans, il occupe dorénavant un poste aux relations publiques chez le Canadien, mais ses fonctions ne sont pas très bien définies. Lafleur est malheureux et il le fait savoir à qui veut l'entendre. Le président Ronald Corey, qui veille à ce que l'image de son organisation ne soit jamais ternie, demande à son plus illustre employé de s'en aller. Pendant trois ans, Guy Lafleur se fera discret.

Q. Quels sont les moments marquants de Guy Lafleur avec les Rangers?

R. En juin 1998, Guy Lafleur est intronisé au Temple de la renommée de la Ligue nationale, mais quelques semaines plus tard, coup de théâtre! On apprend qu'il s'entraîne en secret dans le but d'effectuer un retour au jeu. Il a alors 37 ans.

Son programme de remise en forme, qu'on réserve habituellement aux boxeurs, lui permet de prendre part au camp d'entraînement des Rangers de New York, qui a lieu cet année-là à Trois-Rivières. Lafleur réussit un véritable tour de force en réussissant à se faire une place dans la formation. Cependant, une blessure à une cheville le force à rater son premier rendez-vous contre son ancienne équipe. Présenté à la foule du Forum, Lafleur fait alors un joli pied-de-nez aux dirigeants du Canadien qui ne croyaient plus en lui quatre ans plus tôt. Il enfile son chandail des Rangers sous un tonnerre d'applaudissements.

En février 1989, Guy Lafleur le dispute enfin ce match tant attendu à Montréal. Ce soir-là, les spectateurs sont divisés: on souhaite une victoire du Tricolore mais on veut assister à une bonne performance de Flower. Dans un scénario que les meilleurs auteurs de Hollywood n'auraient pu écrire, le Canadien l'emporte 7 à 5, et Lafleur marque deux buts.

Fiche avec les Rangers (saison régulière)
1988-89: 67 PJ, 18 B, 27 P, 45 PTS, 12 MP

Fiche avec les Rangers (séries éliminatoires)
1988-89: 4 PJ, 1 B, 0 P, 1 PT, 0 MP

Q. Quels sont les moments marquants de Guy Lafleur avec les Nordiques?

R. L'association entre Lafleur et les Rangers ne dure qu'une saison. À l'été de 1989, tout est à recommencer: il doit se trouver une nouvelle équipe et c'est Michel Bergeron, son ancien entraîneur à New York, qui lui donne un coup de main. Dix-neuf ans après avoir effectué ses derniers coups de patin dans l'uniforme des Remparts, Guy Lafleur effectue un retour à Québec. Cette fois, il endossera l'uniforme des Nordiques, les ennemis jurés du Canadien.

Lafleur dispute deux saisons avec une équipe qui en arrache mais encore une fois, il démontre qu'il peut être l'homme des grandes occasions. Son avant-dernier match dans la Ligue nationale a lieu à Montréal. Lafleur est applaudi à tout rompre pendant six minutes lorsqu'il apparaît sur la patinoire. Après avoir reçu quelques cadeaux d'anciennes gloires de l'équipe, il se rend derrière le banc du Canadien afin de serrer la main du président Ronald Corey. La hache de guerre est maintenant enterrée à tout jamais, et c'est le moment pour Lafleur de gâter ses milliers de partisans. Lafleur inscrit le dernier but de sa carrière, son 560e.

Le lendemain, les Nordiques et le Canadien s'affrontent à nouveau, cette fois au Colisée. C'est le dernier match de Lafleur et les gens de Québec font les choses en grand. On lui réserve une ovation de 11 minutes. Lafleur ne marque pas mais les Nordiques l'emportent. À la fin du match, le numéro 10 reçoit une autre ovation monstre lorsqu'il se présente sur la patinoire. Une fois dans le vestiaire, il enlève son chandail avec la satisfaction du devoir accompli. L'âme en paix, Guy Lafleur met un terme définitif à sa glorieuse carrière.

Fiche avec les Nordiques (saison régulière)
1989-90: 39 PJ, 12 B, 22 P, 34 PTS, 4 MP
1990-91: 59 PJ, 12 B, 16 P, 28 PTS, 2 MP

Q. Quels sont les honneurs remportés par Guy Lafleur?

R. Même s'il n'a fait qu'un séjour de deux saisons dans la LHJMQ, Guy Lafleur y a laissé une marque inoubliable. D'ailleurs, le chandail numéro 4 des Remparts et de toutes les équipes du circuit est retiré en son honneur. Il a aussi remporté le trophée Jean Rougeau (à titre de membre de la meilleure équipe de la saison) deux fois, la Coupe du Président deux fois, le titre meilleur marqueur des séries deux fois et le trophée Jean Béliveau, remis au meilleur pointeur en saison, lors de la saison 1970-71, campagne qu'il a conclue avec la conquête de la Coupe Memorial. En raison de ses exploits, le trophée Guy Lafleur est maintenant remis au joueur le plus utile des séries éliminatoires.

Guy Lafleur a remporté cinq fois la coupe Stanley, en 1972-73, 1975-76, 1976-77, 1977-78 et 1978-79. Il a aussi mérité le trophée Art Ross (remis au meilleur pointeur de la LNH) et le trophée Lester B. Pearson (remis au meilleur joueur de la saison selon les autres joueurs) trois fois en 1975-76, 1976-77 et 1977-78, en plus de remporter le trophée Hart (remis au meilleur joueur de la saison selon les journalistes) en 1976-77 et 1977-78. Il a aussi été sélectionné cinq fois sur la première équipe d'étoiles, de 1975-76 à 1979-80.

En 2017, à l'occasion du centenaire de la Ligue nationale, il est nommé parmi les 100 plus grands joueurs du circuit.

Du côté du Canadien, son numéro 10 est maintenant retiré, et il a aussi été le récipiendaire de la Coupe Molson pas moins de sept fois: en 1975, 1976, 1977, 1978, 1979, 1980 et 1982. Au point où Balle Courbe avait relayé la suggestion du journaliste sportif Tom Lapointe plus tôt cette année pour renommer le trophée en son honneur.

À l'extérieur de ses exploits sur la patinoire, Lafleur a aussi été décoré de plusieurs titres honorifiques comme celui de l'Ordre du Canada en 1980, de Chevalier de l'Ordre national du Québec en 2005 et de celui de l'Ordre du hockey au Canada en 2022.