Coach Mac, « l’homme idéal » pour les Sea Dogs
LHJMQ samedi, 4 juin 2022. 07:00 mercredi, 20 nov. 2024. 01:14MONTRÉAL – On est au printemps 2018. Alex Dubeau, gardien des Varsity Reds de l’Université du Nouveau-Brunswick, referme la porte du bureau de l’entraîneur-chef Gardiner MacDougall derrière lui. La défaite en demi-finale du Championnat canadien contre l’ennemi juré, les X-Men de St. Francis Xavier, passe encore mal. Et il vient d’être « placé au pied du mur ».
« T’as bien fait Alex, mais je te donne une dernière chance. L’année prochaine, c’est ton net, mais je veux que t’arrives le plus prêt possible. Je veux qu’on gagne tout. »
« C’était ma dernière journée à Fredericton », se souvient aujourd’hui Dubeau de cette discussion avec son ancien coach. « Ça m’avait vraiment motivé. L’année d’après, j’ai eu une grosse saison, probablement ma meilleure. »
Au printemps suivant, le portier est rentré de Lethbridge en Alberta avec le titre de joueur par excellence du Championnat canadien, une moyenne de buts alloués de 1,33, un taux d’efficacité de ,948, et, avant tout, un troisième titre national en quatre ans dans les rangs universitaires.
« Il (MacDougall) sait vraiment aller chercher le meilleur de tout le monde. »
Un motivateur sans pareil. Voilà ce qu’ont embauché les Sea Dogs de Saint John, équipe hôte de la Coupe Memorial, pour sauver leur saison après une élimination surprise au premier tour contre l’Océanic de Rimouski qui a chassé Gordie Dwyer du TD Station.
« Tu ne peux pas aller chercher un autre coach qui va te motiver plus que lui », jure Dubeau, un ancien des Cataractes de Shawinigan et des Wildcats de Moncton dans la LHJMQ.
« C’est un très grand motivateur », atteste quant à lui l’attaquant Philippe Halley, membre de deux équipes championnes canadiennes (2016 et 2017) dirigées par MacDougall.
« Je n’avais encore jamais eu personne comme lui, et je suis pas mal sûr que je n’en reverrai pas d’autres comme lui », renchérit Halley, qui a joué quatre campagnes dans le circuit Courteau avec les Olympiques de Gatineau et les Tigres de Victoriaville, avant de représenter les Reds pendant quatre ans, pour ensuite graduer dans les rangs professionnels français.
B.E.S.T.
Les tournois annuels, MacDougall en a fait sa spécialité. Des huit titres nationaux remportés par les Reds au cours de leur histoire, sept sont l’œuvre de Coach Mac qui, entre 2007 et 2019, a enfilé les bagues à un rythme qui pourrait rendre jaloux même Tom Brady.
D’où l’attrait pour les Sea Dogs de l’appeler à la rescousse, ne serait-ce que pour l’instant d’une Coupe Memorial.
« Nous avons identifié un petit groupe d'entraîneurs gagnants avec de l'expérience ayant remporté des tournois. Il n'y a pas d'entraîneur actif au Canada qui ait préparé des équipes et gagné plus de tournois que Gardiner. C'est un motivateur et il a dirigé dans des situations à haute pression », justifiait le directeur général des Sea Dogs Trevor Georgie lors de la confirmation de l’embauche de son entraîneur de location, le 24 mai dernier.
Limoger Dwyer à un mois du début de la Coupe Memorial, et ce après que la puissance des Maritimes ait bouclé le calendrier régulier avec un dossier de 47-17-3-1 et 15 victoires consécutives, était certes un pari aussi audacieux que curieux. Mais il pourrait s’avérer payant.
« C’est un bon risque à prendre parce que je crois que ça va leur donner un petit vent de renouveau », estime Halley. « Quand tu viens de te faire éliminer comme ça en première ronde, c’est sûr que le moral est un p’tit peu plus dans les talons. Mais [MacDougall] est tellement positif qu’il va être capable de remotiver les gars et de leur redonner le goût de jouer après une longue pause. »
« Pour une année complète, ce serait intéressant de le voir aller. Mais dans un tournoi comme ça, je pense que c’est l’homme idéal », croit dur comme fer Dubeau.
« Il vient te chercher dans les tripes. Il a une façon, avec les mots, et il te regarde droit dans les yeux. On dit parfois que Martin St-Louis a le feu dans les yeux. Il a un peu le même regard. »
« Sa passion, il réussit à la propager dans le vestiaire, détaille de son côté Halley. Il peut te sortir toutes sortes de statistiques pour te montrer que finalement, t’es un joueur efficace dans l’équipe, que t’es utile et que si tu ne jouais pas ce rôle-là, l’équipe ne performerait pas autant. Il prend chaque joueur en tant qu’individu, c’est comme ça qu’il est capable d’atteindre le cœur de ses joueurs. »
« Il a ses propres termes à lui », se souvient notamment Halley du style bien singulier du pilote de 62 ans. « Il utilisait souvent des acronymes et nous disait par exemple : "Les gars vous êtes les B.E.S.T.", comme dans Best Every Single Time (meilleur chaque fois). Il avait toujours des acronymes dans ce style-là. Il les répétait et ça rentrait dans la tête. Il utilise beaucoup de renforcement positif et ça fonctionne très bien. »
« J’ai fait un méchant saut »
MacDougall aura disposé d’exactement 27 jours pour faire opérer sa magie entre l’annonce officielle de son embauche et le premier match des Sea Dogs à la Coupe Memorial le 20 juin contre les champions de la Ligue junior de l’Ontario. D’ici là, ses séances d’entraînement s’annoncent... « intenses », devinent Dubeau et Halley.
« Je me souviens, dans l’temps, les pratiques c’était du solide », témoigne Dubeau.
« J’ai fait un méchant saut à ma première pratique », se rappelle Halley de son introduction à la façon MacDougall, que certains joueurs surnommaient affectueusement aussi « G-Mac ».
« Il n’y a pas une seule seconde qui se perd au tableau durant les entraînements », développe Halley. « Chaque exercice a un nom. Tu en finis un, il dit le nom du prochain, tout le monde se place et ça roule. Il y a environ 20 secondes entre les drills. Il y a tellement de rythme que ça fait juste t’inciter à être toujours concentré et engagé dans ta pratique. Quand t’es sur la glace, t’es là pour travailler, il n’y a pas de moments de repos. Tout est structuré et c’est un p’tit peu aussi le style de jeu qu’il préconise. Il ne changera pas le système de jeu des Sea Dogs. Lui, le système qu’il veut, ça s’appelle Fast and Faster. C’est rapide et encore plus rapide. »
C’est peut-être en plein ce dont ont besoin les Sea Dogs, eux qui n’auront joué aucun match en 38 jours au moment où s’amorcera ce qu’ils espèrent être le tournoi de la rédemption.
« C’est possible, avec Shawi on l’a fait », fait remarquer Dubeau, qui était le gardien auxiliaire de Gabriel Girard lorsque les Cataractes ont dû patienter 31 jours avant de racheter un échec au deuxième tour des séries avec une conquête de la Coupe Memorial sur leur patinoire en 2012.
« C’était tough. C’était tough... On faisait trois jours intenses, une journée off. Trois jours intenses, une journée off. Pendant 31 jours. Là-dedans, il y avait des [sprints] suicides à la fin de toutes les pratiques. Les gars étaient en forme, mais il fallait sortir les poubelles pendant les pratiques tellement c’était intense. La première fois que j’ai vomi sur la glace, c’était à Shawi dans ce temps-là.
« Des fois, on voyait noir, les boys. On se disait : "Voyons, ça n’a pas de sens!". Mais en bout de ligne, on voit bien que ç’a été bénéfique parce qu’on est arrivé ultra en forme. On était un peu rouillés en partant. C’est peut-être ce qui va arriver avec Saint John à leur première rencontre, mais la shape va être là. »
Et l’esprit aussi. Assurément, prédit Dubeau.
« Je suis persuadé que MacDougall va les gonfler à bloc. Je suis certain que les joueurs vont l’écouter à la lettre, parce que ce gars-là, ils vont vraiment voir qu’il prend ça à cœur, qu’il veut gagner. C’est impossible que tu ne sois pas motivé avec ce gars-là. Il va trouver le moyen d’aller chercher le meilleur des joueurs. C’est clair. »