Blake et Robitaille se souviennent… eux aussi
LNH mercredi, 10 oct. 2018. 12:35 jeudi, 14 nov. 2024. 14:47
Jacques Demers, Guy Carbonneau, Vincent Damphousse, Kirk Muller et leurs coéquipiers qui ont orchestré la 24e conquête de la coupe Stanley du Canadien et les partisans qui l’ont célébrée ne seront pas seuls à replonger à et à ressasser des souvenirs vieux de 25 ans, jeudi soir, au Centre Bell.
Pour des raisons bien différentes, leurs rivaux d’antan le feront tout autant.
« Disons que ce ne sont pas de très bons souvenirs », réplique Luc Robitaille lorsque je lui demande quels souvenirs lui viennent lorsqu’il pense à la finale de la coupe Stanley en 1993.
À lire également
Président des Kings de Los Angeles, Robitaille avait 27 ans lorsqu’il est débarqué à Montréal avec Wayne Gretzky, Jari Kurri, Tomas Sandstrom et ses coéquipiers qui venaient d’éliminer Pat Burns et les Maple Leafs de Toronto en finale de l’Ouest. Il était au sommet de son art comme le confirmait sa saison de 63 buts et 125 points, sa meilleure en carrière.
Même si le Canadien se présentait en finale plus reposé – trois défaites seulement lors des trois premières rondes, dont deux face aux Nordiques lors des deux premiers matchs des séries – que les Kings qui en avaient éliminé Vancouver et Calgary en six parties avant de battre les Leafs en sept rencontres, Los Angeles qui se retrouvait en grande finale pour la première fois de son histoire partait favoris.
« On avait une très bonne équipe. On était très fort à l’attaque et même si nous avions une très jeune défensive, on avait une grande confiance », se souvient Robitaille.
Fort de deux buts marqués en avantage numérique, Robitaille avait d’ailleurs contribué à une victoire de 4-1 des Kings lors du tout premier match de la finale. Kurri et Gretzky avaient marqué les deux autres buts.
Les Kings profitaient d’une avance de 2-1 lors du deuxième match lorsque la finale a changé du tout lorsque l’entraîneur-chef Jacques Demers a fait mesurer le bâton de Marty McSorley qui évoluait avec un bâton dont la lame était illégale. Le Canadien a profité de cette pénalité pour niveler les chances 2-2. Puis, en prolongation, le défenseur Éric Desjardins a complété son tour du chapeau pour donner la victoire au Canadien.
Les jeux étaient faits. Le Canadien a gagné les trois matchs suivants pour réaliser la conquête surprise qui sera soulignée jeudi alors que les Kings feront escale au Centre Bell pour lancer la saison 2018-2019 du Tricolore à domicile.
Saint-Patrick et ses poteaux!
Parce que Jacques Demers profitait d’informations privilégiées – le Canadien avait «espionné» les bâtons de leurs adversaires entre les matchs 1 et 2 près du vestiaire des visiteurs au Forum – plusieurs observateurs ont souvent parlé de vol dans le cadre de cette victoire du Tricolore dans le deuxième match. Un vol qui a mené à la coupe.
Luc Robitaille n’est pas d’accord.
« Est-ce que le Jacques et le Canadien ont « fouiné » dans nos affaires? Peut-être. Mais il y avait pas mal de bâtons illégaux sur la patinoire dans le temps. Marty s’est fait prendre et c’est sûr que cela a eu une grande influence sur le match. Mais je n’ai jamais parlé de vol et je n’en parlerai jamais », assure Robitaille.
De fait, les vrais « voleurs » aux dires de Robitaille sont les poteaux et un certain Patrick Roy.
« Tu ne te souviens peut-être pas du deuxième match, mais moi je m’en souviens. Avant que Desjardins ne marque en prolongation, Kurri a frappé le poteau pour nous. S’il marque sur le jeu et qu’on prend les devants 2-0 dans la finale alors qu’on s’en retournait à Los Angeles, l’histoire aurait peut-être été différente », ajoute Robitaille.
« Ce n’est pas le bâton de Marty qui a changé l’histoire de la finale. C’est Patrick Roy. Il a été sensationnel contre nous. Le Canadien a gagné trois fois en prolongation en grande finale contre nous. Il a gagné dix fois en prolongation – dont une victoire en deuxième prolongation en finale de l’Est contre les Islanders de New York --. Pas juste dix fois, mais dix fois de suite. Patrick avait été magique en séries et en finale. On ne l’appelait pas Saint-Patrick pour rien », ajoute Robitaille.
S’il a vu la coupe lui glisser entre les mains en 1993, Robitaille a pu la soulever à titre de joueur en 2002 avec les Red Wings de Detroit. Il s’est ensuite repris à deux reprises avec les Kings, mais à titre de membre de l’état-major.
Luc Robitaille ne sera pas à Montréal jeudi pour «célébrer» la victoire du Canadien et du même coup la défaite des Kings. «Je serai à Berlin où je dois passer la semaine parce que nous avons acheté une équipe là-bas et que nous amorçons la construction d’un projet qui ressemblera au L.A. Live qui entoure le Staples Center ici à Los Angeles.
Blake : fait saillant de ma carrière
Si Robitaille brillera par son absence jeudi, le directeur général Rob Blake sera quant à lui de la fête. Et contrairement à son patron, le directeur général des Kings garde, malgré la défaite, un très bon souvenir de la finale.
« J’étais encore bien jeune et je me souviens que j’étais vraiment impressionné. Imagine : un petit gars de l’Ontario, comme moi, qui venait de battre les Maple Leafs en finale de l’Ouest et qui se retrouvait contre le Canadien de Montréal en grande finale, c’était magique. Le Maple Leafs Gardens et le Forum étaient les endroits les plus mythiques du hockey. Le simple fait de vivre coup sur coup ces deux grandes séries demeure un fait saillant important de ma carrière »,assure Blake.
Choix de quatrième ronde des Kings, Rob Blake complétait sa troisième vraie saison dans la LNH en 1993. Il évoluait au sein d’une brigade qui comptait sur deux autres très bons jeunes défenseurs en Alexei Zhitnik et Darryl Sydor. Marty McSorley, Mark Hardy, Tim Watters et Charlie Huddy étaient les vétérans.
Comme Robitaille, Blake esquisse une moue lorsque je lui demande si le bâton illégal de Marty McSorley a coûté la coupe Stanley aux Kings.
« Sur le coup, je ne réalisais pas l’importance accordée à cette pénalité. Le Canadien a misé gros en réclamant cette vérification et c’est clair aujourd’hui que cet événement a marqué l’histoire. Mais je trouve ça vraiment injuste. Injuste pour tout le monde, à commencer par Marty. Le nom de Marty est associé à ce damné bâton illégal. Non seulement plusieurs joueurs avaient des bâtons illégaux à l’époque, mais cette pénalité a fait oublier que Marty avait joué du très gros hockey et de très grosses minutes pour nous en séries et en finale contre Montréal. »
Comme Luc Robitaille, Rob Blake a pu finalement soulever la coupe Stanley au cours de sa carrière. Il l’a fait avec l’Avalanche du Colorado en 2001. Il l’a fait aussi deux fois à titre de membre de l’état-major des Kings.
Les souvenirs, heureux comme malheureux, de 1993 l’ont toujours guidé dans sa carrière. Et ils sont utiles encore aujourd’hui.
« Le simple fait de jouer contre le Canadien et les Leafs dans les deux finales, de jouer à Montréal et Toronto m’a toujours impressionné. Mais quand j’ai réalisé que j’étais passé si près de la coupe sans pouvoir y toucher, je me suis dit : pas de problème, j’aurai une autre change l’an prochain. Mais ce n’est pas aussi facile que ça. Avec le temps, j’ai réalisé que lorsque tu as la chance de toucher à la coupe, tu ne dois pas la gaspiller. Tu dois tout faire pour y arriver. J’ai servi ce message à plusieurs reprises à des jeunes coéquipiers au cours de ma carrière. Je l’ai fait aussi après ma carrière dans l’état-major des Kings. Et je le ferai encore comme directeur général. Cette expérience est tellement importante que tu dois la partager. »
Comme membre de l’état-major des Kings, Rob Blake et Luc Robitaille ont bien sûr célébré les deux conquêtes des Kings en 2012 et 2014.
« C’est toujours plaisant de célébrer la conquête de la coupe Stanley. Mais en complet et cravate, il te manque quelque chose. Quand tu as l’équipement sur le dos, que tu ris, que tu pleures en repensant à tout ce que tu as traversé avec tes coéquipiers en saison et en séries, en repensant à tous les sacrifices et toutes les épreuves traversées pour arriver là, il n’y a pas de plus belle sensation qui soit. Mais jeudi, malgré la défaite, je vais quand même célébrer des souvenirs heureux de la défaite de 1993 », conclut Rob Blake lors d’un entretien avec RDS.CA.