PÉKIN, Chine - Brandon Yip a grandi à Vancouver, en Colombie-Britannique. Lors de son enfance, sa grand-mère s'est dit qu'il devrait aussi porter un nom chinois pour honorer les origines de sa famille.

Elle a jugé que « Jinguang » lui allait bien, et le jeune Yip a poursuivi sa route pour atteindre son rêve au hockey.

Le nouveau nom est toutefois resté gravé dans sa mémoire.

« Je le traîne avec moi depuis ce temps », a mentionné l'attaquant de 36 ans.

Yip l'a transporté encore plus loin qu'il n'aurait jamais pu l'imaginer: aux Jeux olympiques de Pékin en tant que membre de la première équipe chinoise de l'histoire du tournoi olympique masculin.

« Ça fait longtemps qu'on travaille pour ça, a-t-il souligné. Tout le monde est excité et a hâte que ça commence. »

Yip n'est pas le seul joueur de la formation chinoise à être né ailleurs sur le globe.

Des 25 joueurs de l'équipe, 11 sont Canadiens, sept sont Américains et l'un d'eux est Russe, tandis que six autres sont nés en Chine. Le groupe évolue ensemble depuis plusieurs années au sein du Kunlun Red Star dans la Ligue continentale de hockey (KHL).

La majorité des membres de l'équipe ont des origines chinoises. Certains autres, comme Jake Chelios, fils de Chris Chelios, ont reçu la permission de représenter la Chine puisqu'ils habitent au pays depuis suffisamment longtemps.

« Nous avons un groupe tissé serré au maximum, car nous n'avons pas le choix de l'être, a expliqué Jake Chelios. Avec tous les problèmes liés à la pandémie, les confinements, les quarantaines, et ceux liés aux visas pour nos familles, nous sommes toujours ensemble. »

« Nous avons une bonne chimie », a renchéri le gardien de 32 ans Jeremy Smith, qui est né au Michigan.

« Si nous conservons notre style de jeu, je crois que nous pourrons avoir du succès », a indiqué celui qui a porté les couleurs de l'Avalanche du Colorado pendant 10 matches en 2016-2017.

Yip, qui a disputé 190 matches dans la LNH, en six saisons, croit que la diversité a permis de rassembler le groupe.

« Nous avons parcouru beaucoup de chemin », a souligné Yip en rapport au fait que l'équipe a été basée à Moscou au cours des 23 derniers mois, en raison de la pandémie.

Sauf qu'ils n'étaient pas autorisés à en parler davantage mercredi.

Les entrevues interrompues

Après que Yip, Chelios et Smith aient parlé aux journalistes mardi, il n'a plus été possible pour les journalistes de parler aux joueurs 24 heures plus tard, une décision très inhabituelle lors d'un événement comme les Jeux olympiques.

Tyler Wong, un attaquant de 25 ans originaire de Cochrane, en Alberta, venait à peine de commencer sa première réponse mercredi quand il a été interrompu et rapidement guidé hors de la zone mixte des médias par un officiel de l'équipe.

« Pas d'entrevues! Pas d'entrevues! » a crié l'attaché de presse.

La scène s'est répétée lorsque l'ailier Spencer Foo, qui a inscrit deux buts en quatre matchs avec les Flames de Calgary en 2017-18, s'est présenté au micro.

« Désolé tout le monde », a dit le joueur de 27 ans né à Saint-Albert, en Alberta, aux journalistes qui venaient de regarder l'entraînement de 90 minutes de son équipe.

La veille, l'entraîneur-chef Ivano Zanetta avait laissé entendre aux journalistes qu'il pourrait répondre à leurs questions, mais il ne s'est jamais présenté dans la zone mixte.

Il est évident que la Chine se préoccupe de la manière dont elle sera perçue lors du tournoi de hockey masculin aux Jeux.

Bien qu'aucun joueur de la LNH ne soit présent à Pékin en raison de problèmes liés à la COVID-19 en Amérique du Nord, le fossé entre la Chine et les autres pays demeure profond.

Mais ce n'est rien pour miner le moral des Chinois.

« Nous avons quelques avantages », a déclaré Chelios, qui a joué cinq matchs pour les Red Wings de Detroit en 2018-2019, et qui a vu son père être capitaine des États-Unis aux Jeux olympiques de 1998, 2002 et 2006.

« Nous sommes habitués à ces voyages et à la nourriture. Nous connaissons la culture et nous sommes ici depuis deux semaines. Le décalage horaire ne nous affecte pas.

« En plus, nous jouons ici ensemble depuis plus de trois ans. »

Yip, dont le nom complet est « Ye Jinguang » en chinois, a indiqué que la seule chose qu'il peut promettre est que le groupe laissera tout sur la glace lors du tournoi.

« Nous allons nous donner à fond, a-t-il assuré. Je pense que nous allons attirer quelques regards. »

La Chine jouera un match hors-concours contre le Danemark jeudi, avant d'amorcer le tournoi contre les États-Unis le 10 février. Les hôtes affronteront ensuite l'Allemagne (12 février) et le Canada (13 février) en ronde préliminaire.

Cela s’avère déjà une réussite pour les Chinois, qui sont passés bien près de ne pas participer à leurs propres Jeux olympiques.

La FIHG a envisagé de remplacer les Chinois par la Norvège, qui a raté de peu les JO de Pékin, mais leur a finalement donné son feu vert en décembre, après avoir déterminé que leur formation rencontrait les critères de sélection.

« Nous savions ce dont nous étions capables aux Jeux olympiques », a confié Smith, qui a par ailleurs indiqué qu'il n'avait pas renoncé à sa citoyenneté américaine pour jouer aux JO, et que les Chinois ne lui avaient jamais demandé de le faire.

« La FIHG a fait ce qu'il fallait. »

Trois des grands-parents de Yip sont nés en Chine avant de venir au Canada, mais ils sont tous décédés et n'auront pas l'occasion de le voir jouer sur la plus grande scène dans leur pays de naissance.

« Ils seraient extrêmement excités », a-t-il laissé entendre. « Je sais que ma famille à la maison, mes parents, sont ravis.

« C'est tellement une expérience formidable. »

Comment Yip et ses coéquipiers se débrouilleront-ils face aux puissances du tournoi? Cette question est pour l’instant sans réponse.